Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Mes Univers
15 août 2012

Lettre à mes beaux-parents :

A

Danielle, Bébert,

 

De la même manière que Vanessa vous a écrit une lettre afin de vous faire part de son ressenti, de sa vision de sa vie, de son avenir, de ses besoins et de ses décisions, je profite, moi aussi, de l’occasion pour prendre la plume et vous informer d’un certain nombre de choses.

Tout d’abord, j’espère que vous aurez pris le temps de lire la lettre de Vanessa en entier. Elle a mis beaucoup de temps pour la rédiger. Elle y a mis tout son cœur, et elle a beaucoup pris sur elle parce que son but – comme le mien d’ailleurs – n’est ni de vous heurter, ni de vous blesser, ni de vous mettre en colère. Car, s’il y a quelque chose que Vanessa ne souhaite pas – ni moi, d’ailleurs – c’est de vous faire du mal. Et, si elle ne s’exprime jamais devant vous, justement, c’est parce qu’elle sait la manière extrême avec laquelle vous réagissez à chaque fois. Tes colères disproportionnées, Bébert ; tes idées fixes concernant l’habillement ou la nourriture de Vanessa, Danielle – par exemple – ne l’aident pas à s’en ouvrir à vous. Au contraire, et cela, que vous me croyiez ou non, je vous énonce un fait et non une opinion : lorsque Vanessa est avec moi ou avec d’autres personnes, elle est ouverte. Elle parle, elle exprime ce qu’elle pense, ce qu’elle veut, ce qu’elle aime ou ce qu’elle n’aime pas. Dès qu’elle se retrouve devant vous, elle se referme comme une huitre. Vos réactions intempestives la paralysent, et alors que vous souhaitez qu’elle s’affirme, cela a l’effet inverse.

Je suis également conscient que vous devez certainement considérer cette lettre, comme celle de Vanessa, comme une accusation à votre encontre. Ce n’est ni le but de la missive de Vanessa, ni de la mienne. Ne nous prêtez, ni à l’un, ni à l’autre, des intentions que nous n’avons pas. Mais, je sais depuis longtemps de quelle manière vous réagissez lorsque les propos que l’on tient – sur vous notamment, mais pas seulement – ne vont pas dans le sens que vous désirez. Vous vous braquez immédiatement. Je ne pense pas que ce soit la meilleure méthode face à ce genre de situation, parce que cela empêche d’avoir les idées claires et ne permet pas de rester objectif. La question est, dans le cas présent : « Etes vous capable – ou est-ce au-dessus de vos forces – d’entendre ce que votre fille, Vanessa, a à vous dire ? Êtes-vous capable de l’écouter sereinement, posément, sans, aussitôt, vouloir ruer dans les brancards en me fustigeant de toutes les insultes les plus grossières. D’autant qu’elles sont injustifiées et inutiles. Elles vous font autant de mal qu’à moi, et rendent les choses que pires encore. Or, j’ose espérer que vous êtes des personnes sensées, raisonnables, pondérées, et possédant assez de sagesse et d’expérience pour prendre le soin de l’écouter. Car ce sont des choses qui ont une grande importance à ses yeux, et qu’elle ne parvient pas à vous révéler depuis longtemps.

Car, les réactions intempestives que vous avez à chaque fois vont à l’encontre de ce que vous souhaitez pour Vanessa. Je sais très bien que vous pensez bien faire, que vous vous souciez d’elle, de son bien être, de sa santé, de son bonheur. Tous les parents en font de même, et c’est quelque chose de normal et de naturel. Mais, quand on aime son enfant  – et cela, quel que soit son état de santé -, la première chose à faire est de respecter ses volontés. Il est vital de respecter sa vision du bonheur, même si celle-ci ne correspond pas forcément à ce qu’on estime être le bonheur de son enfant. Vanessa, même si elle a un handicap et une maladie – tout comme moi puisque mon propre handicap est lié à une maladie nommée « maladie de Sturge-Weber » a le droit d’avoir une vision de son bonheur qui ne correspond pas à la votre. D’ailleurs, pour vous dire l’entière vérité, il est rarissime que la vie de ses enfants corresponde à la vie, telle qu’on la souhaite ou se l’imagine en tant que parents. Et ce, pour de nombreuses raisons qu’il me serait trop long et fastidieux à expliquer ici. Mais, replongez-vous dans votre propre passé, et demandez-vous si la vie que vous avez correspond à celle que vos propres parents rêvaient pour vous ? Et si vous êtes, francs, sincères et honnêtes avec vous mêmes, vous constaterez que ce n’est pas le cas. D’autant que je connais tout de même un peu votre histoire personnelle, et je sais très bien sur quelles péripéties familiales vous vous êtes construit tous deux, et que vous avez construit votre vie de couple, puis, votre vie de famille. Cette vie de famille extrêmement compliquée du fait des enfants handicapés que vous avez eu, je suis sur que ce n’est pas ce que vos parents désiraient pour vous. Et pourtant, c’est ainsi, et vous avez fait avec, comme vous le pouviez, en vous battant continuellement et de toutes vos forces pour le bien être et le bonheur de chacun d’eux. Vous avez fait ce que vous estimiez juste, nécessaire, et utile, pour qu’ils soient le plus heureux possible, selon votre propre jugement, et sans vous tracasser de ceux ou celles qui pensaient que vous ne faisiez pas forcément bien ; et vous aviez raison.

Aujourd’hui, en ce qui concerne Vanessa, les choses ont changé. Vanessa et moi vivons en couple depuis près de neuf ans maintenant. Nous formons un couple solidement établi ; d’autant que nous venons de nous Pacser. C’est un événement important dans la vie d’un couple. Cela veut dire que nous nous engageons l’un vers l’autre dans une perspective d’avenir commun pour la durée de notre existence. Nous vous en avions parlé à plusieurs reprises par le passé. Mais il est vrai que les événements que nous venons de vivre par rapport à la sclérose en plaques de Vanessa a encore renforcé l’amour que nous avons l’un pour l’autre. Et il nous a semblé nécessaire d’officialiser notre couple, pour montrer à tous combien nous tenons l’un à l’autre, et que ce n’est qu’avec l’autre que nous désirons mener notre vie jusqu'à la fin de nos jours. Par ailleurs, le comportement que vous avez eu envers nous – que ce soit Vanessa, en la considérant comme une enfant incapable d’assumer ses choix et ses actes si ce n’était pas ses parents qui prenaient les décisions la concernant à sa place ; ou vis-à-vis de moi, en me montrant combien ma place est précaire à vos yeux au sein de notre couple – nous a poussé à accélérer les choses. Car, et c’est mon opinion, j’ai souvent le sentiment que le fait que je vive en couple avec Vanessa est, pour vous, un mal nécessaire dont il faut absolument amoindrir l’influence ; d’une certaine manière, comme si je vous avais volé votre fille. Comme si, à vos yeux, que quelqu’un d’autre que vous puisse avoir l’importance que j’ai a ses yeux empêchait la relation parents-enfant que vous avez avec elle, d’exister. Je dirais simplement qu’il est temps de couper le cordon ombilical – et je ne suis pas le seul à le penser –, et que votre fille est désormais, surtout et avant tout, ma compagne. C’est un moment inévitable et nécessaire dans la relation parents-enfants au sein de chaque famille ; et il ne se fait jamais sans douleur. De fait, la décision de nous Pacser a été murement réfléchie en fonction de tous ces éléments, et je peux vous dire que beaucoup de personnes autour de nous, sont heureuses pour nous. De cette manière, désormais, le statut de chacun est clair, c’est un fait établi.

Je suis aussi convaincu que c’est peut-être la première fois depuis longtemps que l’un de vos proches, ou qu’une personne de votre entourage plus ou moins éloigné, tente de faire valoir ses opinions, ses idées, ses volontés ou ses décisions, alors que celles-ci ne sont pas en accord avec les vôtres. Je crois que vous avez trop pris l’habitude que les gens que vous côtoyez disent « amen » à votre arbitrage. Et que vous avez oublié, en fréquentant des personnes qui adhèrent systématiquement à votre point de vue, qu’il en existe d’autres qui sont ni meilleurs ni plus mauvais que les vôtres ; uniquement différents.

Je sais très bien que vous avez beaucoup de mal à me comprendre, que vous n’acceptez pas ma façon de fonctionner, mon mode de vie, mes centres d’intérêts, mes préoccupations. Je suis parfaitement conscient que je ne suis pas le genre d’homme que vous souhaitiez avoir pour gendre, que ce ne pas le genre de vie que vous désiriez pour Vanessa. Or, ce que vous semblez négliger, c’est que Vanessa est adulte. Elle m’aime comme je suis, avec mes qualités et mes défauts, mes failles et mes atouts, mes faiblesses ou mes forces. De la même manière que je le fais de mon coté vis-à-vis d’elle. Que vous le croyiez ou non,  c’est ainsi. Vanessa a fait son choix en unissant sa vie à la mienne, son destin au mien. Si vous souhaitez le bonheur de votre fille, il est primordial que vous acceptiez et respectiez ses choix, même si ceux-ci ne vous conviennent pas. Personnellement, j’ai toujours cru que la volonté de chaque parent est de voir son enfant heureux ; et je veux croire que c’est également votre cas.

Il est vrai, je le répète, que je suis différent de vous. Je ne peux le nier, c’est un fait. Cette différence ne fait de moi quelqu’un ni meilleur, ni moins bien que vous. Je ne me permettrai aucun jugement de cet ordre. Chacun est libre de ses opinions, de ses orientations, de ses choix, etc. Mais, ma vie s’est construite de manière différente que la votre ou celle de Vanessa. J’ai vécu beaucoup d’expériences différentes ; j’ai côtoyé de nombreuses personnes diverses et variées ; du chef d’entreprise à l’universitaire, du Chercheur à l’Historien, de l’Informaticien au Menuisier ou au Plombier,  du médecin au chômeur, Noir, Blanc, Beur, de Droite, de Gauche, Punk, Gothique, BCBG, violent, introverti, malheureux ou heureux, athées, chrétiens, musulmans, bouddhistes… Tous m’ont apporté quelque chose ; de la même manière que je leur ai apporté un peu de ce que je suis. Certains m’ont rejeté, se sont moqué de moi, d’autres m’ont considéré comme une personne comme les autres ; certains m’ont détesté, d’autres m’ont admiré. Et réciproquement. Mais, que ces rencontres aient été heureuses ou malheureuses, elles m’ont toutes appris une chose : que, même si on n’a pas les mêmes croyances, les mêmes points de vue, les mêmes opinions, les mêmes métiers, les mêmes rêves ou les mêmes passions, il faut les respecter. Mais, quand je dis respecter, ce n’est pas que l’un s’incline en face du point de vue ou de l’opinion de l’autre. C’est se dire : « Ok, nous ne sommes pas d’accord, mais cela ne nous empêche pas de se respecter, de s’apprécier, ou de s’aimer, sur le même pied d’égalité, malgré nos ambivalences ou nos contradictions, malgré nos failles ou nos faiblesses, nos blessures ou notre vécu, notre sensibilité ou notre caractère. ».

En outre, je suis persuadé que ce soit moi ou que Vanessa vive avec un compagnon n’ayant pas la même personnalité, le même caractère, les mêmes centres d’intérêts, ne venant pas du même milieu, etc. que moi, cela ne changerait rien à votre attitude. Vous lui trouveriez d’autres défauts, d’autres reproches à lui faire, d’autres moyens de le rabaisser et de lui montrer qu’il n’y a que vous qui savez vous occuper correctement de votre fille. Et je peux vous assurer qu’avec d’autres personnes, avec votre comportement systématiquement belliqueux, les réactions auraient pu être tout autres. Je suis quelqu’un de compréhensif, de raisonnable, de sensé, de non violent – ni verbalement, ni physiquement -. Mais il y en d’autres qui vous auraient remis à votre place depuis longtemps, et sans autant de ménagements que moi. Votre place, qui est celle de parents qui laissent leur fille vivre sa vie comme elle l’entend avec l’homme qu’elle aime, sans que ceux-ci n’essayent sans cesse de se mêler du fait qu’elle mène une existence différente de celle que ses parents souhaiteraient lui voir vivre.

Car, on a toujours beaucoup à apprendre de ce qui est différent de nous. Personnellement, je considère cela comme une richesse inestimable. De la même manière, ma curiosité intellectuelle, mon soif de savoirs et de connaissances livresques font parti intégrante de cette différence, et donc, de ma personnalité. Je me suis bâti grâce à cela. Lorsque j’ai souffert, que j’ai vécu des périodes particulièrement difficiles, c’est le coté intellectuel de ma personnalité qui m’a permis de me battre, et d’affronter toutes les épreuves que la vie a pu mettre sur ma route ; c’est encore le cas aujourd’hui. Mieux encore, je suis heureux et fier d’avoir acquis, et de continuer à acquérir tous ces savoirs – livres, télévision, Internet, etc. – qui font que j’ai une culture générale assez large et développée. Il s’agit là en effet de l’un des principaux piliers de mon existence. Et lorsque Vanessa a fait ma connaissance, puis, ensuite, lorsque nous avons commencé à construire notre vie de couple ensemble, cela fait parti des choses qui lui ont plu en moi. Ce sont des choses qu’elle aime partager avec moi, des sujets et des thèmes par lesquels nous avons beaucoup d’échanges, de nombreuses conversations. Notre couple s’est dès lors en partie construit, puis, a en partie évolué, sur ces bases. Et Vanessa est heureuse et s’épanouit énormément grâce à ce coté de ma personnalité… Mais, il est vrai, que c’est une approche totalement différente de l’éducation que vous lui avez donné jusque là. Or, si ce coté de ma personnalité contribue au bonheur, à l’épanouissement et au bien être de votre fille, n’est ce pas là le plus important ?

Hélas, depuis longtemps, par votre attitude envers le couple que Vanessa et moi formons, vous ne montrez pas que vous êtes heureux de voir votre fille heureuse avec un homme qu’elle aime et qui l’aime. Vous ne vous montrez jamais satisfaits de me voir souhaiter prendre soin d’elle autant qu’elle souhaite prendre soin de moi. Vous vous braquez constamment lorsque je veux être là pour elle en toutes circonstances, que ce soit dans le bonheur ou le malheur, la joie ou la souffrance, la guérison ou la maladie. Vous mettez toujours votre grain de sel lorsque je veux la protéger, la seconder, la soutenir, l’aider, autant qu’elle souhaite le faire à mon encontre. Et que je souhaite continuer à le faire jusqu’au dernier de mes jours. Vous ne savez que faire reproches, envoyer des piques, déformer les faits afin qu’ils correspondent à la réalité déformée que vous vous êtes inventé en ce qui concerne les relations que Vanessa et moi avons.

D’ailleurs, à ce propos, comment pouvez vous vous permettre de juger cela, alors que vous ne connaissez même pas 10 % de ce que Vanessa et moi vivons au quotidien, de la façon dont nous fonctionnons lorsque nous sommes tous les deux ? Qu’avez-vous cherché à savoir, alors que vous ne venez jamais voir Vanessa chez nous – et je dis bien chez nous, ni chez elle, ni chez moi ; chez nous ! Intéressez-vous à ce qui lui plait, à ce qu’elle aime partager avec moi, à ce dont nous parlons, à ce dont nous aimons vivre ensemble ? Êtes-vous curieux de connaître les moments de bonheur tranquille, de calme et de sérénité que nous vivons ? Quels livres elle lit, quelles émissions de télévision elle apprécie, quelle musique elle écoute ? Savez vous que Vanessa est gourmande ; qu’elle adore manger des cuillérées de Nutella à même le pot ? Savez-vous qu’elle rit aux éclats ou qu’elle pleure d’émotion devant certains films ou certaines émissions de télévision ? Savez-vous qu’elle me désapprouve parfois – c’est rare, mais ça arrive -, qu’elle me remet à ma place ou qu’elle m’engueule quand elle n’est pas d’accord avec moi ? Savez-vous qu’elle sait se montrer ferme et volontaire, que, quand elle a décidé quelque chose qui lui tient à cœur, elle sait se montrer résolue ? Savez-vous que nous nous prenons dans les bras l’un de l’autre plusieurs fois par jour, juste pour le plaisir de partager un instant câlin ? Savez-vous que, chaque matin, après avoir pris notre petit-déjeuner, le plus grand plaisir de Vanessa est de venir s’asseoir sur mes genoux pour que je puisse l’enlacer, l’étreindre amoureusement ?  Savez-vous que Vanessa prend plaisir à partager ma passion pour les figurines historiques, et qu’elle m’aide souvent à les déballer et les exposer ? Savez-vous que Vanessa et moi sommes invités par un de mes amis de jeunesse – de l’époque ou je participais à des jeux de rôles -, Olivier, chez lui, durant quelques jours quand nous le souhaiterons ? Savez-vous que mon amie Virginie, qui est chirurgienne plasticienne, a prochainement l’intention de nous inviter chez elle et son mari durant un weekend, en compagnie de d’autres des amis de cette dernière ? Savez-vous que Vanessa et moi avons sympathisé avec Bérengère, notre aide-ménagère du mois de Juillet, et que nous allons très vite nous revoir, et s’organiser, entre autres, des soirées vidéo ensemble ? Savez-vous qu’elle est heureuse lorsque ma mère vient nous rendre visite parce que – entre autres – celle-ci s’intéresse aux préoccupations et aux gouts touts simples de votre fille, qu’elle prend le temps de l’écouter, de lui donner confiance en elle sans la bousculer ; uniquement en la valorisant, et avec gentillesse ; et surtout, en ne la prenant pas pour une gamine qui n’est pas capable de se débrouiller sans que ses parents soient constamment derrière elle ?

Car, entre parenthèses, s’il y a une chose que ma mère m’a enseigné au cours de mon éducation, c’est que nos parents ne sont pas éternels. Un jour ou l’autre, malgré le handicap, malgré la maladie, ou autre, la vie nous impose une multitude d’épreuves et de difficultés ; il est donc nécessaire, vital même, de savoir se débrouiller sans eux. Il faut acquérir notre propre expérience, faire nos propres erreurs, surmonter nos propres difficultés, sans eux, par nos propres moyens, avec nos propres solutions. Il n’y a que de cette manière que les enfants deviennent des adultes responsables, qu’ils acquièrent la confiance en eux nécessaire pour affronter les mille et une péripéties de l’existence.  

Savez-vous encore que votre fille, contrairement à vous – et comme moi – n’aime pas le sport, que ce soit la randonnée, le vélo, ou n’importe quel autre ? Et qu’à tenter de les lui imposer comme vous le faites, vous obtenez exactement l’effet inverse à celui que vous attendez – de la même manière que ma mère a voulu le faire avec moi : elle a fini par m’en dégouter. C’est d’ailleurs pour cette raison que je ne veux jamais vous accompagner en promenade, même si je sais que cela me ferait du bien de temps en temps. Le résultat est le même avec Vanessa ! – Savez vous que votre fille – tout comme moi, une fois encore – ne va aux repas d’anniversaire que pour vous faire plaisir et avoir l’occasion de voir les autres membres de votre famille ? Car, tout comme moi – et ce, que ce soit du coté de la famille Ruiz ou de la mienne – elle s’ennuie et se sent seule au cours de ces rassemblements noyés par des brouhahas incessants qui la fatiguent physiquement, plus qu’autre chose. Encore, si elle avait la possibilité de s’exprimer, que ses parents lui donnent l’occasion de parler, sans la bousculer, cela lui rendrait les choses plus faciles ; juste en prenant le temps de se taire et d’être avec elle pour l’écouter, malgré le fait qu’elle bégaye ou qu’elle se répète. D’autant que les bégaiements de Vanessa s’accentuent en fonction de son stress ou de sa nervosité, et que ces derniers symptômes apparaissent avec d’autant plus de facilité que le nombre de personnes l’entourant est élevé. Mais non ! Ce qui compte, c’est uniquement qu’elle soit présente, afin de s’enorgueillir de savoir que l’ensemble du clan Ruiz-Lecostey est réuni.

De fait, lorsque je suis présent à ce genre de réunions – que ce soit chez vous ou du coté de ma propre famille -, si je souhaite que Vanessa et moi rentrions assez tôt chez nous, c’est non seulement parce que moi-même, je subis le même ennui et la même fatigue  que Vanessa. Mais, également, parce que, vivant au quotidien avec Vanessa depuis neuf ans, je connais parfaitement combien d’heures elle et moi sommes capables d’endurer ces repas interminables.

Bien-sur, je vous vois tout de suite sur le point de rugir votre colère et vous indigner, sur le point de m’étriper si j’étais en face de vous : « Que je ne suis qu’un égoïste, qui pense qu’à lui, qui veut empêcher Vanessa de voir sa famille, etc. ». Mais, vous mettez-vous un seul instant à la place de Vanessa ? Essayez-vous d’imaginer à quel point ce genre de réunion peut être épuisant, long, ennuyeux pour quelqu’un qui a besoin de calme et de tranquillité ? Cela ne veut pour autant pas dire qu’il ne faut pas qu’elle ne vienne pas – ni moi d’ailleurs – à ces tablées gigantesques qui donne l’occasion à tout le monde d’être ensemble en ces circonstances  exceptionnelles de la vie familiale. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit par votre manière de réaménager mes propos en fonction de vos fantasmes ! Non, cela doit juste rester des circonstances exceptionnelles, et d’une durée raisonnable. D’autant que, et là c’est mon point de vue personnel – il vaut ce qu’il vaut, mais c’est le mien – que c’est lorsque c’est exceptionnel que ces moments sont d’autant plus forts émotionnellement, et donc précieux pour celui ou celle qui les vit.

Savez-vous encore que la vision du bonheur de Vanessa consiste juste à partager tout ce qu’elle vis avec moi depuis que nous nous connaissons, que nous nous aimons, et que nous avons emménagé ensemble ? Juste cela ? Qu’elle ne désire rien de plus, rien d’autre ? Uniquement pouvoir continuer à vivre de la même manière avec moi, sans que nul ne porte de jugement sur elle, sur moi, ou sur notre façon de vivre, sur ce que nous mangeons, sur sa manière de s’habiller, ou n’importe quel autre sujet que vous aurez trouvé à critiquer ? Êtes-vous capable d’entendre tout cela sans vous sentir mis en accusation, sans éclats verbaux, sans menaces ? Juste sereinement, objectivement, de vous rendre simplement compte que votre fille est heureuse ! Non seulement cela, mais qu’en plus, par votre attitude, vous passez à coté de son bonheur !

Pire encore, quelques unes de nos relations amicales ou autre, se demandent si vous ne voulez pas me pousser à bout en ce qui concerne mon état de santé, ou me faire craquer nerveusement, afin de pouvoir dire ensuite : « vous voyez, il n’est pas capable de s’occuper de notre fille ; donc, c’est a nous de prendre les choses en main. ». Personnellement, je ne sais pas… Mais ce que je sais, c’est qu’un certain nombre de personnes s’interrogent et sont furieuses de voir comment vous vous comportez vis-à-vis de moi, parce que je ne corresponds pas à vos attentes. Et que ces mêmes relations sont prêtes à nous aider à ce que nos voix soient entendues, à Vanessa et moi, si vous poursuivez dans cette direction.

Car, contrairement à ce que vous vous imaginez peut-être, nous ne sommes pas seuls. Beaucoup de gens sont au courant des péripéties que nous vivons depuis longtemps, beaucoup plus que vous ne le supposez. Et plusieurs sont prêtes à monter au front pour nous épauler dans notre désir de vivre totalement indépendant et autonome quant à ce qui concerne vos positions, décisions, points de vue, etc. Et il n’y a pas à aller chercher bien loin pour cela. Si l’envie vous en prenait de vouloir vous en prendre à nous, par vos invectives, vos hurlements, vos menaces, etc. – soit par téléphone, soit de visu -, il nous suffirait d’appeler nos voisins, qui viendraient aussitôt à notre aide. Et ainsi, également, pour qu’il y ait de témoins de vos agissements si cela devait dégénérer de la même manière qu’a notre retour de l’hôpital Pasteur le 5 Juillet dernier après avoir rencontré le docteur Lebiez.  

D’autre part, en ce qui concerne la lettre de Vanessa, je le répète,  que vous le croyiez ou non, que vous l’acceptiez ou pas, c’est un fait, n’est pas mon idée, mais la sienne et celle de sa psychologue de Siouville. Quant à la mienne, elle est destinée à vous expliquer ma position. Nous profitons donc tous les deux de ces circonstances pour vous dire tout haut ce que nous pensons tout bas depuis longtemps. Par ailleurs, un double de ces lettres a été envoyé à chacun des intervenants qui s’occupent de nous : Psychologue, Assistante Sociale, amis, parents, voisins, connaissances. Car, Vanessa, comme moi, avons jugé nécessaire que la situation que nous vivons, ainsi que la pression constante que vous exercez sur notre couple, soit connue de tous. Premièrement, parce que nous n’avons rien à cacher. Ensuite, parce que c’est toujours lorsque nous sommes seuls, Vanessa et moi, que vous tentez d’exercer votre intimidation, votre influence, d’imposer votre vision des choses. Je me suis d’ailleurs renseigné à ce sujet, et votre attitude constante est assimilée à du harcèlement moral – non seulement, vis-à-vis de moi, mais également, vis-à-vis de Vanessa. En outre, je suis persuadé qu’en lisant la lettre de Vanessa, vous avez immédiatement pensé qu’il s’agit d’une manœuvre de ma part, car il s’agit là réflexe naturel venant de vous,  de vouloir toujours accuser l’autre, l’étranger, et donc en l’occurrence, moi, de tous vos maux. Ce ne serait d’ailleurs pas la première fois ; la liste est longue de tous les maux injustifiés dont vous m’affublez depuis que je vis avec Vanessa. Et je suis parfaitement conscient qu’il s’agit là d’une technique de harcèlement moral destinée à me faire craquer et prouver que je suis incapable de m’occuper correctement de votre fille ; et que, donc, qu’il n’y a que vous que pouvez le faire. Or, heureusement pour moi, il n’est pas aussi facile et simple que cela, de me faire craquer. J’ai vécu assez d’épreuves dans ma vie qui m’ont permis d’apprendre comment me défendre et faire valoir mes droits dans ce genre de circonstances. Non seulement pour moi, mais également – et je dirai même, avant tout – pour le bien être, le bonheur, l’équilibre et la sérénité de Vanessa. Il est d’autre part en effet impératif, et je dis bien impératif, pour ne pas dire vital,  pour sa santé également, que vous cessiez ce genre d’agissements qui la rend malheureuse, qui la fait souffrir et qu’elle ne comprend pas.

De la même manière qu’elle ne comprend pas pourquoi vous souhaitez tant la mettre sous curatelle. D’autant qu’elle m’a affirmé haut et fort à plusieurs reprises, mais aussi à d’autres personnes de notre entourage, qu’elle n’en voulait pas. En effet, alors que Vanessa a vu une dernière fois l’Assistante Sociale de Siouville en ta présence, Danielle, cette dernière t’a expliqué que cette démarche était inutile, que l’état de santé de Vanessa ne le justifiait pas. Le Docteur Lebiez, de son coté, nous a détaillé de quelle manière elle s’était parfaitement remise de sa poussée inflammatoire, et nous a rassuré quant à son avenir ; que, grâce au protocole médical qu’il mettait en place, tout serait fait pour limiter les effets des poussées inflammatoires de la sclérose en plaques. Depuis, Vanessa et moi nous sommes renseignés auprès d’autres acteurs médicaux ou sociaux, qui jugent cette demande de mise sous curatelle inutile, pour ne pas dire insultante – certains nous l’ont affirmé aussi clairement – vis-à-vis de Vanessa.  En effet, c’est la rabaisser à quelqu’un que vous jugez incapable de quoi que ce soit ; sans parler de moi, que vous considérez dans ce cas, comme un incompétent, quelqu’un en qui vous ne pouvez avoir aucune confiance. Et je peux vous assurer que ce jugement sur Vanessa et sur moi me fait évidemment beaucoup de mal. Pire encore, il blesse Vanessa. Tout cela, uniquement, afin de calmer les peurs irrationnelles d’une mère, ainsi que son manque de confiance envers le compagnon de sa fille ; alors que celui-ci a toujours démontré, et depuis le début de sa relation avec elle, qu’il est capable d’assumer la vie de Vanessa en toutes circonstances ; que ce soit dans les moments heureux ou malheureux de sa vie de couple. Il a donc suffit qu’une seconde Assistante Sociale nous rencontre l’après-midi même de la sortie de Vanessa de Siouville, et que celle-ci s’appuie sur les angoisses d’une mère, pour changer d’avis. Pire encore, profitant des silences de Vanessa devant la forte personnalité d’une mère inquiète quant à l’avenir de sa fille, sans prendre en compte qu’elle a un compagnon qui sera toujours présent à ses cotés quoiqu’il arrive, Danielle, tu n’as pas entendu les réticences de Vanessa quant à cette démarche de mise sous curatelle. Et la pauvre Vanessa, impuissante, n’a pu qu’assister à des prises de décision la concernant, sans qu’elle puisse donner son avis. De même, par la suite, c’est uniquement toi, Danielle, qui a pris les choses en main en ce qui concerne la mise en application de cette décision ; puis au recueillement des documents nécessaire au montage du dossier auprès de l’Assistante Sociale allant dans ton sens. Et là, et c’est mon avis personnel, ce n’est pas penser à ce qu’il y a de mieux pour Vanessa, mais uniquement à te rassurer.

Car, en ce qui me concerne, même si vous ne me croyez pas, il n’y a qu’une seule chose qui me préoccupe quotidiennement et réellement dans ma vie : c’est le bonheur, le bien-être, l’équilibre, la sérénité, etc. de Vanessa. Depuis que je la connais et que nous vivons ensemble, cela a été, est toujours, et sera toujours, ma seule et unique préoccupation. Ce qui a de l’importance a mes yeux en effet, c’est de voir Vanessa heureuse, et faire tout ce je juge utile et nécessaire pour cela. Et je dis bien, que je juge utile et nécessaire, et non pas ce que vous jugez utile et nécessaire ! Et si jamais certaines choses ne lui conviennent pas, ne lui plaisent pas, elle est assez grande et a assez de caractère – en tout cas, c’est ce qu’elle me montre, ainsi qu’à d’autres, dans ce genre de circonstances – pour me le faire savoir et montrer sa désapprobation. Le plus important, donc, c’est Vanessa, ce qu’elle souhaite, ce qui lui plait ou ce qui ne lui plait pas, ce qu’elle aime ou ce qu’elle n’aime pas, ce qu’elle a envie ou pas, ses rêves, ses projets, ses espoirs, etc. et non les votre ! Les siens, pas les vôtres ! Et tout cela appartient à Vanessa et à moi, est de notre ressort, ne concerne que nous, et uniquement nous ! Ce sont des éléments de notre vie de couple qui nous appartiennent, et qui ne vous appartiennent pas. Et ceci, que vous soyez d’accord ou pas n’a aucune importance : c’est ainsi.

Et, croyez moi ou non encore, mais Vanessa et moi nous battrons de toutes nos forces, utiliserons tous les moyens à notre disposition, ferons appel à toutes les personnes qu’il faut, afin de pouvoir préserver notre vie de couple. Nous ferons tout ce qui est nécessaire pour que vous ne portiez pas atteinte à notre bonheur. Nous ferons tout ce que nous jugeons utile pour sauvegarder notre mode de vie, notre calme, notre sérénité, notre équilibre. Car vous, et vous seuls le mettez en danger ; non pas le handicap ou la maladie de Vanessa. Uniquement vous et votre comportement, vos remises en cause permanentes, vos piques, vos préjugés sur moi, vos à-priori sur notre vie de couple !

Encore une chose : vous ne vous rendez même pas compte que je vous aime comme ma propre famille, mais que c’est tout ce que je viens de décrire dans cette lettre qui fait que je vous évite le plus souvent possible. Et je vous évite encore plus depuis le 5 Juillet dernier et ce qui s’est passé en voiture, sur la route du retour entre Cherbourg et Valognes. Vous ne vous rendez même pas compte que Vanessa est heureuse avec moi, qu’elle est fière d’être ma compagne. Vous ne vous rendez même pas compte que vous gâchez son bonheur par votre comportement. Vous ne vous rendez pas compte que vous la faites souffrir, que vous la blessez profondément. Beaucoup de gens autour de nous, d’ailleurs, se demandent – certains en sont persuadés – si vous ne serez jamais capable d’ouvrir les yeux sur tout ce que Vanessa et moi avons essayé de vous expliquer dans nos deux lettres.

Vous êtes des personnes attachantes, pleines d’amour, ouvertes, qui avez vécu beaucoup d’expériences, qui donnent beaucoup aux autres. Vous avez des tas de qualités. Vous êtes accueillants, le cœur sur la main. Depuis neuf ans, nous avons vécu beaucoup de moments intenses ensemble, parfois joyeux, parfois malheureux. Et cela continuera, je le souhaite du plus profond de mon cœur, longtemps encore. Car, même si, en ce moment, après lu cette lettre, parce que la colère et l’indignation font bouillir votre sang, vous ne me croyez pas, je vous aime et je continuerai à vous aimer de la même manière longtemps encore. Je vous considère d’une certaine manière, aussi, un peu comme mon père et ma mère. Comme ma mère considère un peu Vanessa comme sa seconde fille ; sans faire de distinction avec les autres membres de ma famille. Ma mère, ma grand-mère, ma sœur, etc. ne font en effet aucune discrimination, et se comportent avec elle, ont les mêmes attentions, la même envie de la voir heureuse, épanouie, équilibrée, etc. que vis-à-vis de moi. Elles souhaitent uniquement voir le couple que nous formons, Vanessa et moi, heureux ; parce qu’elles savent autant que moi, autant que vous, combien le bonheur peut être fragile parfois, combien les épreuves de l’existence – maladie, mort, manque d’argent, handicap, etc. – peuvent être cruelles et sans pitié. Vanessa a la chance d’avoir trouvé le bonheur avec moi – qui aurait pu l’imaginer, dans votre famille, il y a une dizaine d’années ? -, alors, ne le lui gâchez pas !

Sur ces derniers mots pleins de bon sens, je pense, je vous laisse en espérant que vous saurez y reconnaître tout l’amour que je porte à Vanessa ; sinon, c’est à désespérer de vous. J’espère que vous aurez pris le temps de la lire entièrement, même si de nombreux passages sont durs pour vous, même si vous vous êtes senti mis en accusation – ce qui, je le répète, n’a jamais été mon intention -, même si certains mots vous ont blessé – ce qui n’a jamais été mon intention non plus. J’espère encore également que vous aurez pris le temps de lire la lettre de Vanessa avec attention. Car ça doit peut-être être une des premières fois de sa vie qu’elle met son cœur a nu de cette manière devant vous afin de vous révéler le fond de sa pensée, alors qu’elle vous explique quel est son bonheur, quelles sont ses volontés. Enfin, j’espère qu’une fois sa lettre et la mienne lue, quand vous replierez ces feuillets, vous saurez agir sagement en ne vous en prenant ni à Vanessa ni à moi – surtout à moi, que vous considérez comme la source de vos malheurs -, et que vous penserez surtout et avant tout au fait que Vanessa est une femme heureuse aujourd’hui.   

Publicité
Publicité
Commentaires
Mes Univers
Publicité
Visiteurs
Depuis la création 287 585
Derniers commentaires
Archives
Mes Univers
Newsletter
Pages
Publicité