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Mes Univers
14 mai 2015

Chapitre Un, Dix-septième Partie :

 

A« C'est aberrant, le nombre d’imbécillités que vous venez de débiter. », avait d'emblée réagi ma mère. Elle avait été courroucée d'avoir été obligée de l'écouter. Et elle avait eu l'intention de le lui signifier. « Comment, vous, un étranger, qui êtes à Notre-Dame depuis quasiment six mois, vous arrogez-vous le droit d'accréditer de tels propos ? Vous vous entretenez quinze à vingt minutes dans la cour de de l'école avec Nathanÿel, et le voici doté du Don. Alors que vous ne bavardez que quelques instants avec lui, vous décrétez que c'est un enfant délaissé. Vous prêtez l'oreille à ses geignements, et vous parvenez à déterminer qu'il a dépravé mon esprit. Sans m'avoir adressée le moindre mot jusqu'à aujourd'hui, vous suggérez que je ne l'aime pas. Et vous vous vantez de décrypter ce qui est le mieux pour lui !

Mais pour qui vous prenez vous ? Mon mari et moi, cela fait dix ans que nous élevons Nathanÿel. Cela fait dix ans que ses infirmités physiques et mentales font de lui un paria ; qu'il en souffre ; que nous en souffrons. Et pour vous, il n'y a que parmi les Novices de la Citadelle Tellurique qu'il est capable de s'épanouir !

Depuis longtemps, nous cherchons en vain quel serait le lieu le plus adapté pour lui. Nous avons écumé l'ensemble des collèges bordelais, puis, du département. Lorsque nous leur avons expliqué qui est Nathanÿel, quelles sont ses spécificités, tous ont refusé de l'accueillir. Je suis donc désormais persuadée que c'est loin de notre métropole qu'il acquerra les rudiments de connaissances nécessaires à sa survie aux Chartrons ! Que ce n'est qu'en compagnie d'hommes et de femmes exclus d'une société qui ne les tolère pas, qu'il sera à l'abri.  ». Ma mère avait été proche de la crise de nerfs. La tension qu'elle avait accumulé au cours de cet interminable débat, l'avait épuisé. Seule, assise derrière le bureau de son agence immobilière – ses collaborateurs avaient quitté le local depuis trois-quart d'heure -, des larmes d'animosité et de révolte s'étaient mises à couler sur ses joues. Son mascara et son rouge à lèvres avaient dégouliné. Ses cheveux blonds cendrés étaient ébouriffés. Et elle avait laissé éclater sa colère et son chagrin. « D'ailleurs, d'où tirez-vous ces prétendues informations sur les Chartrons ? Vous vivez à à Bordeaux depuis un semestre, et à vous vous flattez d'en savoir davantage que ses insulaires ! Vous insinuez que le collège néo-catholique de Besançon est une institution où l'on torture physiquement et mentalement ses pensionnaires ! Comment osez-vous colporter de telles horreurs ?

En tout cas, je vous le répète, ce n'est pas au sein de l'une de ces Citadelles Telluriques que je veux envoyer mon fils. Plutôt le confier à une cohorte de Hurleurs ou de lupins des Pyrénées. Et même si la moitié des atrocités perpétrées par ce collège proche du Swÿtzland sont véridiques, il y sera plus à sa place que dans une Citadelle Tellurique. Même si les Chartrons sont le quartier le plus sordide de notre cité, il y sera entouré de personnes d'aussi piètre qualité que lui.

- Madame ? », avait tonitrué Maître Anthelme. Un orage aurait tonné aux tympans de ma mère que sa répartie n'aurait pas été plus impétueuse. « Vous êtes-vous représenté vers quel enfer vous expédiez Nathanÿel ? Vous rejetez votre fils parce qu'il ne répond pas à vos aspirations. Vous ignorez délibérément le Don dont il est le bénéficiaire ! Vous le rabaissez parce que ses pouvoirs vous dépassent et vous avilissent !

Moi, vous me condamnez parce que je ne suis pas entré en relation avec vous avant ! Vous me stigmatisez parce que je suis à Bordeaux depuis un semestre ! Vous me fustigez parce que j'en sais plus sur votre municipalité ou sur ce collège de Besançon que vous !

Alors, prêtez attention à ce que je vais vous annoncer. Car, je ne me répéterai pas !

J'essaye de vous joindre depuis plus d'un mois. En vain. Je vous l'ai spécifié au début de notre entretien. Le jour de mon tête-à-tête avec Nathanÿel, immédiatement après l'avoir laissé retourner auprès de ses camarades, j'ai négligé mes cours. Je me suis enfermé dans la salle des professeurs. J'ai consacré tout mon après-midi à tenter de vous contacter. Je vous ai laissé de nombreux messages pour vous convier à me rappeler. Sans résultat. Le soir, une fois revenu chez moi, j'ai persévéré. Je ne me suis pas reposé ; je n'ai pas mangé. De dix-huit heures à vingt-deux heures, je me suis évertué à vous atteindre. Sans plus de résultats. Et ce n'est qu'en dernier recours que j'ai téléphoné à mon ami Elÿn. Je l'ai invité à me donner des conseils. Il m'a suggéré que Nathanÿel serait susceptible d'intégrer le Noviciat bordelais. Mais il m'a souligné qu'auparavant, il devait en référer à ses supérieurs hiérarchiques.

Le lendemain, puis les jours et les semaines suivantes, j'ai renouvelé mes tentatives. Au minimum quatre ou cinq fois par jour. Vous me l'avez reproché tout à l'heure. Chaque jour, j'ai interrogé Nathanÿel : « Est-ce que ta maman a consulté son répondeur ? ». Et chaque jour, navré, celui-ci m'a rétorqué : « Non. Mon père et ma mère ont franchi le seuil de l'appartement vers minuit ou vers deux heures du matin. » Ça dépendait des fois. « Ils ont gagné leur chambre pour y dormir. Au matin, ils sont partis de chez nous vers sept heures ; une demi-heure avant que je ne sorte de ma chambre et que je me dirige vers la cuisine pour y déjeuner. Il n'y avait aucun pli nulle part ; aucun avertissement que l'un d'eux désirait vous approcher d'une manière ou d'une autre. ».

Alors, ne m'accusez pas de ne pas avoir voulu vous avertir de mon conciliabule avec Nathanÿel ! Ne m'accusez pas d'avoir saturé votre répondeur ! Si vous aviez pris la peine de compulser vos messages avant aujourd'hui, les événements auraient évolué différemment.

Nous sommes à trois semaines des examens validant l'admission de votre enfant au collège. Or, ce n'est que maintenant que vous vous réveillez ! Vous lâchez que c'est à Besançon d'abord, et aux Chartrons après, que vous préméditez de congédier votre fils ! Tout cela, malgré le Don qu'il possède ; malgré les prodiges qu'il accomplit ! Tout cela, uniquement pour qu'il ne soit pas admis dans une Citadelle Tellurique ! Eh bien, moi, je vous jure qu'il va devenir Frère.

Vu votre réaction, je n'ai pas à vous raconter tout ce que je sais. Toutefois, je peux vous énoncer ceci : sachez que l'une des multiples prérogatives d'un Inÿtié est de démasquer les anomalies provoquées par le Don aux confins de notre Réalité. Dans cette perspective, il y a quelques mois, j'ai arpenté les allées du Lybrarium de Tours. J'y ai recensé des témoignages d'enfants précoces comme Nathanÿel. Et comme je vous l'ai signalé précédemment, leurs histoires ce sont terminées tragiquement. Plus tard, j'en ai répertorié quantité d'autres au cœur de Citadelles Telluriques. Quand j'ai sondé leurs Grands-Thaumaturges dans ce but, bien sûr, ceux-ci ont tout d'abord été réticents. Ils m'ont interdit l'accès à leurs Archives. Puis, finalement, après d’âpres délibérations, ils m'en ont ouvert les portes. Ils m'ont permis de les éplucher à ma guise. Mais, je n'y ai pas découvert de traces de gamins aux facultés aussi étendues que celles de Nathanÿel.

Ensuite, j'ai été mandaté à Bordeaux en tant qu'enseignant à Notre-Dame. Et mon esprit a été accaparé par une mission qui n'a aucun lien avec Nathanÿel, avec Elÿn, ou avec les Chartrons. Puis, le hasard m'a amené à être le Maître votre cadet. J'ai été pénétré par ses aptitudes phénoménales. J'ai pris sur moi d'en aviser les autorités compétentes. J'ai donc alerté mon ami Elÿn qu'un garçon d'une dizaine d'années investi du Don résidait dans la capitale du duché d'Aquitaine. Cette identification a engendrée diverses péripéties que je n'ai pas à vous communiquer. Des décisions ont été prises par Aelÿs. Et des dispositions spéciales ont été prévues par Frère Nÿcoeus...

- Et mon approbation? », avait grincé ma mère. « Je ne…

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