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Mes Univers
30 mai 2016

autobiographie, pages 189 à 193 / 312

X1Je suis persuadé, intimement convaincu, que chacun a le droit à la vie sexuelle et amoureuse qui lui est appropriée. Que ce soit aujourd’hui comme hier, j’ai toujours défendu ceux et celles qui sortaient des normes – peut-être parce que, tout comme eux, moi aussi je ne possède pas une existence « normale ». L’homosexualité, comme le handicap, ou d’autres sortes de choses qui sortent plus ou moins des limites de la société bien-pensante, socialement honorable ou tolérable, ont toujours été sujets de moqueries, de rejets, de solitude, de souffrance, de défiance. J’en ai subi les conséquences à de nombreuses reprises tout le long de mon existence. Je suis donc bien placé pour défendre les personnes qui portent cette différence comme une infamie et une source de malheur et de disgrâce. Ce que je n’accepte pas, par contre, c’est le mensonge ; c’est que l’on cache la vérité de son état à ceux et celles qui vous aiment et que vous aimez. Ce que je n’aime pas, c’est lorsqu’on rejette la faute sur les autres, qu’on les utilise afin de se valoriser soi-même, afin de briller à leurs dépens. J’aurai accepté et compris l’homosexualité de mon père. Ce que je n’ai pas compris, ce qui m’a fait souffrir, ce sont ses mensonges, même si j’imagine les raisons qui l’ont poussé à se comporter ainsi. Sauf qu’il a reporté son mal-être sur moi. Cela a été plus que je ne pouvais en supporter.

 

Ma mère a finalement accepté le retour de mon père au domicile conjugal. Elle a tourné la page. Et ils ont repris une vie commune brinquebalante. Evidemment, s’était créé un gouffre entre mon père et ma mère, que rien ne viendrait plus jamais combler. Les dégâts étaient trop importants cette fois, comparés à l’épisode s’étant déroulé entre 1987 et 1988 ; ils étaient irréparables. Malgré tout, pendant un temps, la paix est revenue dans la maisonnée. Mieux encore, il y avait des années que je n’avais pas vu mes parents aussi proches l’un de l’autre. Et j’ai cru que nous pourrions repartir sur de bonnes bases après tout cela ; et malgré la souffrance personnelle qui me rongeait l’âme et le cœur.

 

Hélas, cette éclaircie n’a duré que deux mois environs. Je me souviendrai toute ma vie de l’ultime rebondissement relatif à cette période. Ce soir-là, mes parents avaient invité à dîner leurs amis les plus proches de l’époque. Il s’agissait de ceux dont la femme nous avait accompagnés, ma mère et moi, à la gendarmerie après la perquisition de l’ordinateur de mon père. Nous étions en train de bavarder et de manger dans la cuisine de la demeure de mes parents. Quand, soudain, le téléphone a sonné. C’est mon père qui a décroché. Et là, oh surprise. C’était ce fameux Thierry qui était à l’autre bout du fil. Mon père s’est éloigné de nous avec le combiné portable. Ma mère a jeté un regard noir en direction de mon père. Leurs amis se sont soudainement sentis mal à l’aise. « Je croyais que ton mari n’entretenait plus de lien avec ce Thierry », a fait l’un des convives. « Je le croyais aussi. », a répondu ma mère, le visage décomposé. « Il m’avait promis que toute cette histoire était terminée. », a-t-elle poursuivi. « C’était une des conditions pour que j’accepte de lui pardonner. ».

 

La conversation entre ce Thierry et mon père s’est éternisée un bon moment. Lorsqu’il a fini par raccrocher et qu’il a repris sa place à table, ma mère l’a questionnée. Elle n’a pas été gênée par la présence de leurs amis puisque, de toute façon, ceux-ci étaient au courant de tout. Mieux encore, c’était principalement eux qui avaient été présents à nos côtés durant toutes ces turbulences familiales. « Qu’est-ce qu’il voulait ? », l’a-t-elle interrogé brutalement. « Je pensais que tu avais rompu tout lien avec ce Thierry. ».

Et là, l’horrible vérité a, de nouveau éclaté. Il nous a expliqué qu’en fait, Thierry avait rétabli le contact avec mon père depuis peu. Ce Thierry était toujours amoureux de mon père. Il souffrait, il lui manquait. Il ne pouvait pas se passer de lui.

 

Cette fois, pour ma mère, le dernier lien qu’elle avait essayé tant bien que mal de rétablir, tous les efforts auxquels elle avait consenti afin de surmonter cette crise, étaient définitivement anéantis. Elle lui a dit : « C’est lui ou moi. C’est cette existence ou ta famille. ». Mon père a alors tergiversé au cours des jours suivants. A un moment, il souhaitait réparer les dégâts avec ma mère. Le lendemain, son attirance pour Thierry était plus forte que tout le reste. Il jonglait sans cesse avec les nerfs de chacun d’entre nous. Ma mère pleurait souvent. Elle était de nouveau perdue, bouleversée, blessée, humiliée. Ma sœur, elle, vivait sa vie et s’occupait de son club hippique, mais se tenait informée de l’évolution des événements. Les amis de mes parents tentaient de résonner mon père, de lui donner des conseils afin de réparer le mal qu’il réinstallait en chacun de nous. Mes grands-parents maternels, pour leur part, ne voulaient plus avoir à faire à mon père en aucune manière. Pour eux, la solution était toute simple : ma mère devait divorcer de mon père.

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