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Mes Univers
21 novembre 2016

Une journée ordinaire, seconde partie :

X3La journée s’écoule quotidiennement ainsi. Parfois, lorsqu’ils s’ennuient, ils s’en prennent plus ou moins ouvertement à moi. Toujours les mêmes méchancetés répétées, toujours les mêmes grimaces, toujours les mêmes remarques blessantes. Il n’y a pas un jour où l’un ou l’une de mes camarades ne me lance pas de pique concernant le fait que j’ai une tâche de naissance, parce que ma jambe droite boite légèrement, ou que mon bras et ma main droite sont plus malhabiles que mes membres gauche. Chaque jour, à ce niveau-là, est une véritable torture mentale qu’ils me font subir. Leurs moqueries ou leurs mots empreints de bêtise et de méchanceté gratuite me pénètrent au plus profond de mon cœur et de mon âme. Elles s’accrochent à mon esprit déchiré, blessé, humilié. Ils me font payer cher – trop cher – la différence dont je suis le porteur.

Mais cette différence, je ne l’ai jamais voulue. Je suis né comme cela. Trois fois par semaine, je vais chez un kinésithérapeute, qui me fait faire des exercices afin que j’entretienne et fortifie le coté déficient de mon corps. C’est dur, c’est pénible, c’est embêtant. Le plus souvent, surtout à la mauvaise saison, je n’aime pas y aller. Je préférerai être à la maison, à visionner les dessins-animés qui passent à la télévision à cette heure-là. Néanmoins, je n’ai pas le choix. Déjà qu’à cause de mes doigts manquant de dextérité, je ne parviens pas toujours à boutonner seul mon pantalon, et je suis incapable de lacer mes chaussures. C’est pour cela que ma mère m’achète toujours des chaussures à scratch. C’est plus facile pour moi. Quant au pantalon, elle m’apprend tant bien que mal à me débrouiller à l’aide de ma seule main valide. Or, combien de crises de nerfs, de torrents de larmes, ai-je déversé parce que malgré tous mes efforts, toute mon énergie, toute ma volonté, je ne réussissais pas à me boutonner ?

Que dire également des crises de convulsions épisodiques dont je suis la proie ? Généralement, je les sens arriver. A ce moment-là, tout à coup, j’ai l’impression de me trouver à l’intérieur d’un nuage cotonneux. Mes yeux voient la réalité qui m’environne de façon distordue, « irréelle ». La partie de mon corps dotée de l’hémiplégie est soudainement plus sensible au toucher. J’ai l’impression que mes muscles se tendent, que mes os sont enserrés dans un étau dont je ne peux me délivrer. Je suis obligé de m’asseoir car, si je n’ai pas de point d’appui, je vais tomber. Ma jambe ne me porte plus. Elle est emportée par une fulgurance que je ne maitrise pas. Une décharge électrique d’une violence inouïe s’en empare. Et des spasmes, d’abord légers, puis, de plus en plus brutaux et violents entrainent ma jambe et mon bras dans des mouvements convulsifs. J’ai l’impression que cela dure une éternité, alors que c’est assez court : à peine trois ou quatre minutes.

Pourtant, durant ce laps de temps, je souffre le martyr. Je me retiens de hurler. J’ai mal, tellement mal. Je serre les dents afin de ne pas crier. Je m’accroche au meuble le plus proche pour tenter de me retenir à tout ce qui peut encore me relier à la réalité. Ma tête part dans tous les sens, non pas parce qu’elle est prise par les convulsions. C’est le seul moyen à ma disposition pour essayer d’évader mon esprit de la souffrance intenable qui est la mienne.

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