Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Mes Univers
2 août 2017

Ma Famille et l'Argent :

X3Vous savez, lorsque j'écris sur ma famille des textes que je publie ici, je ne ne le fais pas de gaieté de cœur. J'aimerai qu'il en soit autrement, mais c'est le seul moyen de m'exprimer à son sujet. Car à chaque fois que j'aborde avec les membres de ma famille les thèmes que j'y développe, ceux-ci fuient ce que j'ai à leur expliquer. Ils m'obligent à me taire. Ils me fustigent de venir perturber leur tranquillité, leur sérénité. Je me retrouve donc mis sur le banc des accusés, coupable d'avoir bousculer l'ordre établi.

 

A chaque fois, lorsque je tente, vainement, de leur faire entendre ce que j'ai à leur dire, ça se termine par des cris et des larmes. Des récriminations et des accusations à mon encontre, parce que j'ai dit tout haut ce que j'avais sur le cœur. Et forcément, dans ces conditions, l'objet de mes propos passe au second plan. Ce qui est alors le plus important est le fait que le résultat de mon échange soit des larmes. Dès lors, on m'en veut, on me réprimande comme un petit garçon ayant eu sa grosse colère, qui a dérangé tout le monde, et qui doit en payer le prix fort.

 

Ce peut être pour n'importe quelle raison. Une anecdote, un détail de la vie quotidienne, comme quelque chose d'important ou d'essentiel dans la relation que j'ai avec l'une ou l'autre des trois femmes que composent notre maisonnée. Ce n'est pas ce que j'ai soulevé qui les chagrine. Parce que pour vous avouer la vérité, à chaque fois que je m'exprime tout haut sur le thème pour lequel je suis habituellement muselé, il s'agit d'un non dit. Quelque chose que tout le monde sait, que l'on évoque parfois en chuchotant pour ne pas que la personne concernée l'entende ; tout en espérant parallèlement qu'elle le perçoive plus ou moins afin de lui faire passer un message. Ce n'est pas un secret. C'est juste quelque chose de gênant, qu'on ne souhaite pas montrer de soi aux autres. Quelque chose qui écorne l'image lisse, respectable, honorable, gratifiante, que l'on désire dévoiler à son entourage : famille, amis, relations, etc.

 

Car, s'il y a quelque chose à laquelle ma famille tient particulièrement, et à laquelle je ne souscris pas parce que je considère cette attitude comme des faux-semblants et de l'hypocrisie, c'est l'image que les « autres » ont d'elle. Lorsqu'ils se rendent chez ma maman, chez ma grand-mère – et un peu différemment -, chez ma sœur, tout doit être parfait. On a pour obligation – impératif – de se montrer sous son meilleur jour, souriant, accueillant, chaleureux, etc. Peu importe si on vient de vivre un événement difficile, traumatisant, blessant, il faut être lisse. Il ne faut surtout pas dévoiler qu'on a pu être, quelques instants ou quelques heures plus tôt, bouleversé, chagriné, malheureux, effrayé… C'est considéré comme de la faiblesse. Et, dans ma famille, il ne faut surtout pas montrer ses faiblesses. C'est honteux, déshonorant, humiliant.

 

Personnellement, je pars du principe que chacun d'entre nous n'est ni tout blanc, ni tout noir. Nous sommes, en permanence, à la fais heureux et malheureux, triste et joyeux, fort et faible, réussissons et échouons, surmontons certaines épreuves et ne 'en surmontant pas d'autres, etc. Ça dépends des événements auxquels nous sommes confrontés, des gens en face de qui nous sommes, de notre passé, de notre personnalité, de nos capacités et de nos incapacités, etc. Ce n'est jamais figé non plus parce que nous évoluons en permanence. Notre éducation, notre histoire, notre milieu socio-culturel, notre métier, nos amis, nos amours, nos ambitions, y contribuent. Cette ligne de conduite, je l'ai toujours en tète à chaque seconde qui s'écoule. Que ce soit dans mes rapports avec les personnes que je croise sur le Web, comme avec celles que je fréquente dans ma vie « réelle ». Y compris vis-à-vis des membres de ma famille.

 

Je n'ai pas honte d'être parfois en état de faiblesse, d'être malheureux, d'être triste, d'être blessé… Je n'ai pas honte de me montrer sous un jour qui ne révèle pas forcément le meilleur de ma personne. Je n'ai pas honte d'être indigné, en colère, critique, en désaccord, d'avoir des convictions auxquelles je tiens. Je n'ai pas honte de dire haut et fort ce que je pense, ce que je sais, ce que je crois… que ce soit aux personnes avec lesquelles j'échange sur le Net, comme avec les membres de ma famille.

 

Il est vrai que ce n'est pas dans la façon de fonctionner, depuis toujours, des membres de ma famille. C'est l'un des points principaux – ce n'est pas le seul – où je me différencie d'eux. J'assume ce que je suis, dans sa globalité, dans sa complexité, dans son individualité. Et je n'ai pas l'intention de changer ce trait de ma personnalité si chèrement acquis. Car il m'a fallu des années de thérapie chez un psychologue – j'habitais Laval à l'époque – pour plonger aux tréfonds de moi-même afin de l'admettre, afin de le concevoir, afin de le comprendre, et afin de le mettre en pratique.

 

Jusqu'alors, je n'étais que soumis. J'étais le gentil fils qui acquiesçait à chacun, qui acceptait tout ce que l'on lui disait, qui faisait tout ce qu'on lui demandait. J'étais transparent, j'avais refoulé ma personnalité en moi-même afin de céder aux désirs et aux exigences de ma famille. Ah, il est vrai que j'étais alors le fils modèle. Jamais un mot plus haut que l'autre. Toujours prêt à se soumettre. Bien sous tous rapports. Il était exceptionnel que je montre mes véritables émotions, mon véritable ressenti. Je laissais les gens discuter autour de moi de ce qui les intéressait. Je les écoutais sagement, même si je m'ennuyais à mourir. Mais ne m'exprimant pas, cela ne préoccupait personne. J'étais une véritable plante verte que l'on déposait là pour faire joli à table, au milieu des conversations des uns et des autres. Tout était bien, tout était beau, dans le meilleur des mondes.

 

Plusieurs événements se sont produits en peu de temps, qui ont remis tout cela en question ; du moins en ce qui me concerne. Le premier est la dégradation des rapports entre mon père et ma mère à la suite de la mort de mon petit frère Aymeric le 25 Juillet 1998. Il est décédé dans un accident de voiture alors qu'il avait 18 ans. Ils étaient cinq à l'intérieur du véhicule. C'est le seul qui, après avoir traversé sa vitre, a été projeté à plusieurs mètres de là. Il est retombé violemment sur une pierre qui lui a brisé net le cou. Il est mort immédiatement ; il n'a rien senti. Les autres passagers de la voiture, eux, n'ont eu que des blessures sans grande gravité.

 

Quoiqu'il en soit, les relations déjà distantes entre mon père et ma mère qui existaient à l'époque, n'ont fait que s'éloigner. Ce n'est qu'en 2004 – année charnière dans de nombreux domaines – que la séparation serait effective, intensément douloureuse pour tout le monde dans notre famille. Des secrets remontant au début du mariage de mes parents seraient révélés, entraînant dès lors une déflagration généralisée dont je subis par certains cotés encore les conséquences aujourd'hui. Je m'en suis expliqué hier en détaillant le comportement de ma maman à mon égard.

 

Je dois avouer que le jour de l'enterrement de mon petit frère, j'ai juré sur sa tombe que je ferai tout pour qu'il soit fier de moi. Je lui ai promis qu s'il me regardait de là où il était – je ne crois pas en Dieu et en la Religion, je l'ai assez souvent mentionné, mais cela ne veut pas dire que je ne suis pas empreint de spiritualité par certains cotés ; une spiritualité différente, mais une spiritualité tout de mème – que je me battrai pour mon bonheur. Que quoiqu'il m'en coûte, il serait fier de moi de me voir heureux, épanoui, suivant la voix que je m'étais choisi. A ce propos, c'est le seul, dès les jeunes années où je me suis mis à écrire, qui a cru en mon talent au sein de ma cellule familiale. Alors que les autres membres de ma famille ne voyaient en cette vocation qu'un hobby, c'est le seul qui a vu le potentiel qui sommeillait en moi, et qui ne demandait qu'à se développer, qu'à s'enrichir. C'est le seul, à l'époque où j'écrivais des scénarios de jeux de rôles, qui, dans ma famille, a été fier du travail considérable, de l'attention, des recherches, de l'implication – déjà – qui étaient les miens. Evidemment, les joueurs de jeux de rôles le voyaient aussi, puisqu'ils en étaient régulièrement les réceptacles. Mais, dans ma famille, jusqu’à ce que je décide, également en 2004, de totalement changer d'orientation professionnelle, il a été le seul à me soutenir dans ma démarche.

 

Et c'est là où je veux en venir. Il m'a fallu plusieurs années, entre 1998 et 2004 – et bien des épreuves – pour que je puisse tenir mon engagement fait à Aymeric. Il m'a fallu bien des séances chez le psychologue, pour que je me rende compte que mon individualité avait autant de valeur que celle de n'importe qui ; et surtout, autant de valeur que celle des autres membres de ma famille. Je peux vous dire que ça a été un cheminement douloureux, terrifiant, solitaire, éminemment intime.

 

Dans ma famille, nul ne s'est aperçu de rien. Chacun était concentré sur soi, tout naturellement. Et puis, visiblement, dans mes rapports avec chacun d'eux, rien n'avait véritablement été modifié ; en tout cas visiblement. Alors à quoi bon s'en préoccuper. Lorsque j'avais du chagrin, et que, pour reprendre l'expression favorite de ma maman, « je tirais une tète longue comme ça », cela voulait dire que quelque chose me rendait triste, malheureux, blessé, humilié, etc. Mais comme je ne m'exprimais pas, on me réprimandait parce que je ne faisais pas bonne figure devant l'ensemble du cercle familial. Comme un petit enfant, on se préoccupait davantage du fait que je perturbe la tranquillité des autres, plutôt que de s'inquiéter de savoir la raison de mon état ; et comment y remédier. Ça, ce n'était pas leur problème.

 

Le tournant, je m'en souviens presque comme si c'était hier. Il s'est déroulé lors de la séparation de ma mère et de mon père. Et lorsque le secret qui entourait mon père depuis le début de leur mariage a été dévoilé. J'ai compris que mon père m'avait menti toute ma vie sur lui. De fait, son infaillibilité, sa stature, ce qui faisait de lui à mes yeux un « être supérieur » me dénigrant en permanence, me rabaissant constamment, m'infériorisant quotidiennement, m'humiliant régulièrement, me criant dessus parce je n'étais celui qu'il aurait aimé que je sois, tout cela s'est écroulé d'un instant sur l'autre.

 

Je ne dis pas que je n'étais pas terrorisé. Au contraire, j'étais tremblant de frayeur. Mais, pour la première fois de ma vie, j'ai osé l'affronter. J'ai osé lui dire en face tout le mal qu'il m'avait fait depuis ma prime jeunesse. Nous en sommes presque venu aux mains. Mais il n'a pas eu le dessus. Enfin, j'ai pu extérioriser tout ce que je refoulais à son propos depuis mon enfance. Comprenant désormais les tenants et les aboutissants du secret qu'il cachait, et qui avait détruit pendant 40 ans l'ensemble de la famille ; dont il avait joué pour tous nous tenir sous sa coupe ; ma colère était alors plus forte que ma peur.

 

Depuis, celui-ci, en bon pied-noir qui se respecte, et dont l'orgueil avait été atteint du fait de la divulgation de ce secret au grand jour, et du fait que j'ai osé me mesurer à lui, il n'a jamais plus voulu entendre parler de moi. Il m'a renié. De la mème façon qu'il a effacé Aymeric de sa mémoire après son décès parce que ce dernier le faisait trop souffrir, il m'a voué aux flammes de l'Enfer. Après cela, je ne l'ai jamais revu. Et mème quand, à son tour, il est mort, il n'a eu aucun mot pour moi. Aucune tentative de sa part pour essayer de reprendre contact. Bien qu'il savait où j'étais parce que ma mère a gardé un moment un lien amical avec lui. J'avoue que moi aussi, de mon coté, je n'ai pas souhaité le recontacter. Après tout, il s'agissait là de son initiative de me renier, pas la mienne. J'attendais un geste de sa part, qui n'est jamais venu.

 

En outre, pour dire toute la vérité, cette altercation de 2004 a été, pour moi, une véritable libération. A cette occasion, j'ai déposé sur le coté un poids que je portais sur les épaules depuis ma plus tendre enfance. Soudain, presque du jour au lendemain, j'ai réalisé que j'étais capable, que j'avais le droit, de m'exprimer librement, sans contraintes. Que j'avais le droit, comme n'importe qui d'autre dans ma famille, de dire ce que je pensais, ce que je voulais, ce que je ressentais, ce qui était important ou pas pour moi, ce qui me caractérisait, etc. Le travail chez le psychologue avait porté ses fruits.

 

Il m'avait également permis de réaliser que c'était a moi de décider quel chemin de vie je désirais suivre. Quelle orientation professionnelle je désirais prendre, moi pour qui les membres de ma famille avaient depuis toujours décidé de tout dans ce domaine à ma place.

 

J'ai fais des études Administration Commerciale et Comptable alors que j'étais un artiste dans l'âme – à l'époque, je voulais faire de la Bande Dessinée . Mes parents ont estimé que ce n'était pas un choix judicieux du fait de mon handicap. Ils ont décidé que la Comptabilité était la seule issue. Avec l'approbation et l'appui du conseiller d'orientation. Evidemment, ça a été un terrible échec. Je suis entré à la Bibliothèque Nationale. J'y ai découvert l'univers littéraire, de connaissance, de sagesse, aux sources desquelles je me suis abreuvé. Elles m'ont ouvert les portes d'un nouvel horizon pour lequel j'étais fait. De là est né ma vocation et ma passion qui transparaît toujours aujourd'hui dans mon métier d'écrivain et d'historien. Une fois la Bibliothèque Nationale quittée, je l'ai entretenue, je l'ai enrichie, je l'ai diversifiée. Vous en voyez des extraits lorsque je rédige certains textes ici. Les notes historique de « De Deiteus Mythica » en particulier, datent de cette époque et ultérieurement.

 

Mais non, là encore, jusqu'en 2004 environ, mes parents y ont opposé leur veto. Ils ont pensé que ce ne pouvait être, tout au plus, qu'une passion, qu'un hobby, qu'un passe-temps ; mais rien de plus. Ce n'est pas cela qui, matériellement, financièrement, me permettrait de vivre. Dès lors, j'ai enchaîné divers emplois, jusqu'au dernier dans l’Éducation Nationale où j'ai failli y laisser ma santé. Il s'est soldé par un « burn-out » - le terme n'existait pas encore à l'époque -, et un an où j'ai cumulé les séjours à l’hôpital pour des cures de repos. Jusqu’à ce que je réalise, grâce à mes séances chez le psychologue, couplé avec la levée du secret entourant mon père, que j'avais le droit de choisir quelle voie professionnelle je voulais suivre.

 

Or, depuis mon passage à la Bibliothèque Nationale, tout criait en moi que mon destin était d'écrire., Tout me hurlait que je devais me consacrer entièrement à cette vocation. A ce besoin irrépressible, qui est de coucher des mots les uns derrière les autres pour rédiger des histoires. Pour témoigner de mes expériences personnelles, des réflexions tirées de mes lectures, de mes connaissances en tel ou tel domaine. Là encore, en 2004, j'ai dû batailler dur pour imposer ma décision sans appel. Ma famille n'a pas compris pourquoi je m’entêtais ainsi. Longtemps, elle est revenu à la charge pour me faire comprendre que mon choix n'étais pas le bon. Mais j'ai tenu bon.

 

Car, voyez vous, l'autre aspect que je voulais aborder dans ce texte, pour en terminer définitivement avec ce malheureux et récent épisode, se situe dans le rapport qu'entretiens ma famille avec l'argent. Il révèle une facette peu glorieuse et peu honorable de ma famille. Je suis, là encore, le seul à ne pas me plier au diktat qui s'étend sur les trois générations que je décrypte.

 

Pour moi, l'argent n'est qu'un moyen. J'en ai. Je ne suis pas démuni. J'ai un revenu régulier qui me permet de vivre correctement. Sans faire de dépenses inconsidérées non plus. Mais assez pour ne pas à avoir à m'en préoccuper. C'est un privilège que peu de gens ont, j'en suis conscient. Au moins, mon handicap m'aura été bénéfique de ce point de vue là. Car cet argent vient de l'Allocation Adulte Handicapée qui m'est octroyée. Parfois, elle vient aussi des livres que je publie. L'un et l'autre de ces revenus m'autorisent à payer le loyer du bel appartement que j'occupe, me permet de me nourrir, de m'acheter mes livres, mes figurines, d'avoir une femme de ménage trois heures par semaines pour s'occuper de mon intérieur. Mon handicap rend certaines taches de mon quotidien difficile, voire impossible.

 

Bref, de ce coté là, je n'ai pas à me plaindre. Mais j'ai du me battre bec et ongles depuis 2004 pour en arriver là. J'ai connu les vaches maigres, les duretés de l'existence depuis que j'ai quitté le cocon familial. Tout ce que chacun et chacune doit affronter pour se bâtir une place dans la vie. Ni plus ni moins qu'un autre.

 

Cependant, il se trouve que mes grands-parents maternels ont toujours eu de gros revenus du fait de leurs emplois en tant qu'expatriés. Ils ont travaillé dans une multinationale de forage en eau, en gaz, et en pétrole, œuvrant sur tout le continent africain. Ils ont travaillé dur toute leur vie pour accéder au titre tant envié à leurs yeux cadres supérieurs ; avec les salaires qui allaient avec. Quand ils habitaient l'Afrique, c'était au Sénégal. C'est à Dakar que ma mère est née. Ils avaient une maison, une voiture, un « serviteur », payés par leur société. Une vie aisée et facile, alors que mon grand-père venait d'une famille très modeste du Doubs, alors que ma grand-mère venait de la région roannaise et de l'industrie du textile qui y était implantée au début du XXe siècle. Ils ont tous deux connu la guerre et ses privations. Ils se sont battus chacun contre les nazis. On peut donc comprendre qu'au sortir du second conflit mondial, alors que la France était à reconstruire, leur soif de réussit, de prospérer, ait été si grande. Qui pourrait leur en vouloir à l'époque des Trente Glorieuses dont ils ont pleinement profité.

 

Là où les choses dérapent, si je puis m'exprimer ainsi, c'est que la mentalité qu'ils se sont forgé – surtout ma grand-mère -, a été que l'argent pouvait tout apporter, tout vaincre, tout résoudre. Il en ont conçu un modèle de vie où celui-ci était le moteur de leur existence. Moteur qu'ils ont largement transmis à ma maman.

 

Il faut avouer que ma maman n'a pas eu le choix que d’être dépendante de cette vision des rapports humains. En effet, lorsqu'elle s'est mariée avec mon père, très vite, celui-ci lui a demandé d'abandonner ses études de droit pour se consacrer exclusivement à l'entretien de la maison, et à l'éducation des enfants. Mon père, en bon pied-noir qu'il était, avait sa propre vision de ce qu'était la famille et de son organisation. Lui travaillait pour ramener l'argent du ménage ; elle s'occupait des enfants et de la maison.

 

Souvenez vous que nous étions encore à la fin des années 60 et au début des années 70. Cette mentalité était encore profondément ancrée chez beaucoup de gens ; et notamment chez les pieds-noirs d'Algérie dont mon père était, et pour lesquels l'Homme était le centre de tout., C'est lui qui décidait, qui jugeait, qui condamnait. Pour mes grands-parents paternels, mon père était un demi-dieu vivant. Comme ma mère était fille unique, mon père était fils unique. Mon père était donc le plus beau, le plus intelligent, le plus savant, le plus fort. On peut le concevoir de son enfant, surtout s'il est unique. Mais chez mes grands-parents paternels, cette vision était exacerbée dans des limites que je n'ai jamais connu depuis. Avec des effets dévastateurs incroyables, même si cet aspect n'est pas lié au secret rattaché à mon père. Mais cet aspect a aussi fortement influencé ce qui allait suivre ensuite.

 

En outre, je suis né handicapé, et il a fallu, très tôt s'occuper de moi et des difficultés qu’entraînaient mon handicap. Docteurs, hôpitaux, rééducation, etc. Ma mère a bien été obligée de se plier aux exigences de mon père quant à la répartitions des rôles au sein de leur couple.

 

L'engrenage fatal pouvait dès lors se mettre en mouvement. Mon père ramenant l'argent du ménage, c'est lui qui tenait les cordons de la bourse. Son salaire atterrissait sur un compte en banque auquel ma mère n'avait pas accès. Mon père lui donnait une certaine somme pour le mois, afin de pallier aux besoins du quotidien : courses, entretien, etc. Cette façon de procéder a perdurer presque jusqu’à la fin de leur couple. Milieu des années 90 ou, à force d'insistance, ma mère a pu gagner progressivement une relative indépendance financière.

 

En effet, dès le milieu des années 80 et contre l'avis de mon père, elle a travaillé à mi-temps dans des clubs hippiques près des différentes maisons ou nous avons séjourné. L'équitation a toujours été la grande passion de ma mère. Ce n'est pas pour rien que, par la suite, ayant la vocation a son tour, ma sœur en a fait son métier. Ma mère a donc pu ramener un peu d'argent en plus « pour mettre du beurre dans les épinards ». Mais aussi, parce qu'elle y trouvait plaisir, y rencontrait des gens qui se passionnaient pour les chevaux comme elle. Et ensuite, lorsque ma sœur a monté son propre club d'équitation, l'aider à le faire tourner. Ce qu'elle continue de faire de temps en temps aujourd'hui encore.

 

La difficulté, là encore, c'est que mon père cachait à ma mère une partie de ses revenus, puisque c'est lui qui en gérait la totalité. Chaque mois, il donnait un chèque à ma mère, et celle-ci devait se débrouiller avec pour faire tourner le ménage. Le reste, nul ne sait ce qu'il en faisait. Nous allions le découvrir – ou du moins le soupçonner – en 2004 lors de la levée du secret qui l'entourait.

Mais, en tout état de cause, c'était parfois insuffisant. Et ce, dès le début de leur mariage. De fait, fatal engrenage, mes grands-parents ont pris sur eux d'aider ma mère financièrement. Chaque mois, ils lui ont donné un chèque supplémentaire afin de « l'aider à joindre les deux bouts ». A chaque fois qu'ils le pouvaient, ils accompagnaient ma mère pour faire les courses au supermarché. Ils payaient celles-ci bien entendu, à l'insu de mon père qui, lorsqu'il le découvrait, n'appréciait pas cette initiative. Ils nous achetaient nos vêtements, nous gâtaient autant qu'ils le pouvaient, que ce soit moi, ma sœur, mon frère, ou ma mère. C'était très généreux de leur part. Ayant eux mêmes vécu des moments difficiles dans leur jeunesse, leur hantise était que nous ne manquions de rien. Quitte à s’immiscer dans l'équilibre de la vie de couple de ma mère, quitte à en abuser.

 

Mon père s'est évidemment senti émasculé. Son rôle de chef de famille s'est retrouvé remis en question. En mème temps, cela l'arrangeait bien. Ainsi, il n'avait pas à expliquer ce qu'il faisait de cet argent qu'il ne consacrait pas au cercle familial. Parallèlement, mes grands-parents ont eu de plus en plus d'emprise financière sur notre vie à tous. Et la contrepartie, parce qu'il y en avait une, c'est que nous nous soumettions sans rechigner à leurs quatre volontés. Il fallait obéir à leurs désirs, mème si nous en souffrions, mème si cela nous plaisait pas. Ils nous offraient, de leur propre initiative, un vêtement dont les motifs ou autre ne nous plaisaient pas. Il fallait faire bonne figure, montrer que nous étions contents, montrer notre reconnaissance éperdue.

 

Ceci se déroulait dans tous les domaines de la vie quotidienne. Ma mère était pieds et poings liés vis-à-vis de mon père, elle l'était également vis-à-vis de ses parents de qui elle était redevable de lui payer tout ce dont elle avait besoin pour faire vivre son couple et sa famille. Alors, par respect, pour être reconnaissants, c'était à nous, enfants, de nous plier à leurs exigences.

 

Aujourd'hui, mon grand-père est mort, mon père est mort, mon petit-frère Aymeric est mort. Je vis de mon propre argent. Modestement, mais correctement. Ma grand-mère maternelle est venu vivre dans la maison de ma mère parce qu'elle a désormais plus de 90 ans. Mais ce système perdure toujours. Ma mère a une petite retraite, ma grand-mère en détient une très confortable. Dès lors, mème si elle vit chez ma mère, c'est elle qui paye l'immense majorité des besoins quotidiens. Le chauffage, les courses, les rénovations de la maison, etc. Non pas en fonction de ce qui plairait de manger ou autre de ma mère. Mais en fonction de ce qui plaît à ma grand-mère, mème s'il faut gaspiller la nourriture pour cela. Une fois encore, ma mère se retrouve enchainée, redevable, et par conséquent nous aussi, moi aussi en l’occurrence. Parce que quand elles viennent me voir chez moi, quand je vais chez ma mère pour quelques semaines de vacances, ce système mis en place il y a longtemps, est toujours présent.

 

La seule différence notable, notamment depuis 2004 et mon émancipation psychologique, c'est que je n'y souscris plus. Je mentirais si je disais que je ne suis pas heureux lorsque ma grand-mère me fait un chèque en cadeau pour mon anniversaire ou pour Noël. Elle s'y est d'ailleurs résolu parce qu'elle s'est aperçu que les cadeaux qu'elles me faisaient ne me plaisaient pas. Mais là où je diffère de ma mère, et de ma sœur, c'est que j'estime que si elle le fait, c'est de bon cœur. C'est parce qu'elle a envie de me faire plaisir. Ce n'est pas parce qu'en retour elle attend ma pleine et entière soumission ou obéissance. Ce n'est pas pour que je sois entièrement d'accord avec elle, avec la façon dont elle voudrait que je sois en sa présence, sur les propos que je je dois exprimer devant elle afin de ne pas la heurter.

 

Ma mère, hélas, à ce niveau là, fait l'amalgame entre soumission et respect. Ma mère considère parce que ma grand-mère est la plus âgée, et parce qu'elle paye beaucoup de choses avec son argent, nous devons tous nous soumettre à sa façon de faire, à sa façon de penser, à ce qui lui plaît ou ce qui ne lui plaît pas. Que ce soit quand je suis chez ma maman ou elles habitent ensemble, ou quand elles viennent chez moi, peu importe. D'une manière ou d'une autre, il faut se soumettre.

 

Ainsi, ça fait plaisir à ma grand-mère de faire les courses et d'amener la nourriture qui lui plaît chez moi. Évidemment, autant que faire se peu, elle achète des choses que j'apprécie. Mais il n'y a que ce qu'elle achète qui trouve grâce à ses yeux. Parfois, mon frigidaire, mon congélateur, mes placards, on beau être pleins parce qu'il n'y a pas longtemps j'ai moi-même fais courses. Mais non, elle ne veut pas y toucher parce que les produits ne viennent pas du fruit de son porte-monnaie. Comme s'ils étaient indignes de sa personne, pas assez « nobles » ou « bons » puisque n'étant pas liés à elle. Ma mère dira que c'est pour ne pas dévaliser mon garde-manger ; c'est probablement partiellement exact. Il n’empêche que le résultat est que je me me sens humilié, déshonoré.

 

Et il ne faut pas, non plus, qu'il y ait des restes, pour qu'elle puisse racheter de la nourriture très vite. Et ainsi entretenir ce lien de soumission auquel je n'adhère plus. Et qui, lorsque j'ouvre ma bouche pour dire que je ne suis pas d'accord sur telle ou telle façon de procéder, se termine toujours en cris et en larmes.

 

Car ma mère, sachant qu'elle est dépendante de ma grand-mère, ne la contredis jamais, ou très mollement parfois. De toute façon, mème avec le holà, ma grand-mère n'en fais qu'a sa tète, parce qu'elle sait qu'au final, elle aura le dernier mot. Sachant qu'elle est la doyenne – consciemment ou inconsciemment, c'est difficile à déterminer -, elle en joue, en profite pleinement. D'où le fait que je sois considéré comme un fauteur de troubles, quelqu »'un qu'on n'écoute pas, qui n'a aucune légitimité, aux yeux des trois femmes de la famille.

 

En outre, enfin, la difficulté est que ce qui est important pour moi ne l'est pas pour ma mère, ma grand-mère, ou ma sœur – qui sur tout ce qui vient de précéder, est en accord pratiquement total avec elles.

 

Comme ma mère de ce coté là, il faut que ce qu'on achète soit utile. Il ne faut pas dépenser dans ce qu'elle estime négligeable ou sans intérêt à ses yeux – à l'une comme à l'autre -. Ma mère, au fil du temps, en est, à ce niveau là, venu à adopter le mème comportement que ma grand-mère. Se faire un cadeau juste pour le plaisir qui n'a rien à voir avec l'essentiel est inenvisageable.

 

Combien de temps a-t-il fallu pour qu'elles admettent – du bout des lèvres – que les livres que j'achète, que mes figurines, que ce qui compose la colonne vertébrale de mon existence, est à mes yeux aussi essentiel que ce qu'est la nourriture à leurs yeux. Bien que je tienne mon budget correctement, que je ne suis jamais à découvert, et que j'arrive mème à mettre un peu d'argent de coté régulièrement, à leurs yeux mes dépenses sont souvent superflues. Acheter tant de livres, des figurines inutiles, quel dépenses inimaginables !! C'est impensable.

 

On en revient au mème mode de pensée que concernant mon métier et vocation d'écrivain. Avant tout, il faut que ce soit rémunérateur immédiatement.  Que ce soit un salaire fixe à la fin du mois. Ma sœur, bien entendu, suis ce principe, donc forcément, c'est valorisant. Mème si par derrière, ma grand-mère râle parce que ma mère est trop souvent « fourrée au club hippique », que les enfants de ma sœur sont mal élevés, etc. Elle est contente lorsque des gens viennent prendre l'apéro pour discuter un moment, mais derrière elle les traite de bouseux qui ne sont jamais sorti de leur campagne, alors qu'elle, par son travail et ses voyages, a plusieurs fois fait le tour du monde. Elle est contente quand je viens les voir chez ma mère, mais sachant que mon travail d'écrivain ne me permets pas d’être parfaitement ponctuel. Il faut que je fasse une coupure aisément rattrapable pour la session d'écriture suivante, sinon tout mon travail est perdu. Il n'y a pourtant rien à faire. A chaque fois, le reproche m'en es fait, bien que je tente de faire des efforts pour m'adapter « au mieux ». C'est pareil quand ma mère et ma grand-mère sont chez moi du reste. Je me fais « taper sur les doigts » pour la mème raison.

 

Ma mère abonde dans son sens parce qu'elle lui est redevable, et qu'en conséquences, par respect pour tout ce qu'elle fait pour moi, pour nous, je dois me soumettre aussi. Ce que je ne fais pas puisque je fais fi des non-dits, des chuchotements, pour dire tout haut ce que je pense, ressens, désire, ou pas.

 

Mais, comme je l'ai dit tout le long de ce texte et du précédent, j'en paie le prix fort à chaque fois. Surtout que, comme je l'ai dit hier, je suis le seul homme face aux trois femmes de la famille. Avec tout ce passé, tout ce passif qui est le mien, et dont je suis coupable et responsable.

 

Je pourrais d'autant plus entrer dans d'autres détails, d'autres épisodes, d'autres aspects, de tout ceci. Je crois que ces dix pages, plus celles d'hier, donnent un aperçu déjà assez considérable de ce à quoi je suis confronté au sein de ma famille. De ce que je combats avec toute la force de caractère que j'ai acquise au fil des années, comme je l'ai expliqué tout le long de ces deux textes.

 

Il me semblaient nécessaires et utiles, pour que vous compreniez une fraction de qui je suis. Une fraction où l'argent tient une place importante – trop importante à mes yeux – pour les autres membres de ma famille, puisqu'elle source de douleurs et de violences psychologiques. Car pour moi, si l'argent est utile, nécessaire, il n'est pas le centre de ce qui nous relie les uns aux autres. Il n'est pas ce qui fait de nous des personnes à part entière. Il ne nous détermine pas en tant qu'individus, n'a rien à voir avec notre personnalité, nos capacités ou incapacités. Il n'est pas l'objet d'honneur, d'orgueil, d'admiration, de vanité, etc. Du moins selon moi. J'ai trop vu au sein de ma propre famille quelles dévastations il peut engendrer pour avoir retenu la leçon. Il est juste utile, ni plus ni moins...

 

Chaque texte que j'écris développe un aspect, parmi d'autres, de l'homme que je suis, de ma personnalité, de ma vie, de mon passé. Ceux et celles qui veulent en découvrir davantage peuvent lire les pages préliminaires de mes « Mémoires » que je publie un jour sur deux. Une fois celles-ci terminées, je les retravaillerais afin de pouvoir les publier sous forme de livre. Ces pages déjà écrites se trouvent sur mon blog. Et dans le ventre de mon ordinateur. Ces deux textes les enrichissent. Comme ceux qui viendront pour mettre au jour d'autres fragments de mon existence, de mes expériences, de mes épreuves non dévoilées.

 

Car si je suis un homme comme les autres, si ce que je vis peut se voir chez beaucoup de familles, d'individus, etc. je n'ai ni honte ni gène à les dévoiler parce qu'ils font partie de moi. Et au mème titre que l'hypocrisie, les secrets, que je réprouve comme je l'ai démontré plus haut, les cacher serait comme me mentir à moi-même et aux autres. Ce serait comme mourir un petit peu du fait de dissimuler qui je suis réellement ; que ce soit dans ses bons ou ses mauvais aspects, dans ses bonheurs ou ses malheurs, dans ses victoires ou ses défaites, dans ses forces et ses faiblesses, etc. Et ce, parce que je suis quelqu'un d'entier, de vrai, dans sa globalité et son individualité, dans sa complexité et sa diversité, je m'y refuse...

 

Fin de cette aparté familiale, je reprends la rédaction de mon livre sur les Origines idéologique et ésotériques du Nazisme….

Publicité
Publicité
Commentaires
Mes Univers
Publicité
Visiteurs
Depuis la création 287 585
Derniers commentaires
Archives
Mes Univers
Newsletter
Pages
Publicité