31 janvier 2019
Destruction
Je ne suis rien, rien qu'un individu destiné à être, toute sa vie, malmené, réprouvé, humilié, fragilisé, excommunié. Je suis en vie pour subir ce que je suis, qui je suis. Je suis en vie pour être brisé, voué aux gémonies, damné. Et tant que je vivrai, chaque occasion a été, est, sera saisie pour me détruire un peu plus ; pour repousser plus loin les limites que je suis capable d'endurer.
Après tout, je ne suis qu'un handicapé. Je suis un être fragile, angoissé, aux émotions exacerbées. Et si je suis doué d'intelligence, si je suis alloué de raison, si je suis cultivé, doté des connaissances, de réflexions, de dons pour l'écrit, bref si j'ai de nombreuses qualités, ce sont avant tout mes défauts, mes imperfections, mes faillibilités, qu'il faut surtout labourer.
Non pas effleurer. Les taillader, les contraindre, les stigmatiser. Dépasser les limites fixées hier pour qu'aujourd'hui soit pire que naguère. Et pour que demain soit plus traumatisant que maintenant. Pour me pousser dans mes ultimes retranchements. Pour que, progressivement, je me transforme en monstre incapable de partager, de vivre en bonne intelligence avec quiconque. Pour que j'en arrive à me haïr moi-même. Pour que je finisse prostré, malade d'anxiété, ma santé définitivement détériorée. Jusqu'à cet épilogue inéluctable flirtant avec la démence et le trépas...
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