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Mes Univers
12 mai 2020

Que c'est fascinant !!!

X2

Il y a une chose qui me sidère particulièrement, et la situation à laquelle nous sommes confrontée actuellement au travers de cette crise épidémique dont les répercussions n'en sont qu'à leurs balbutiements, le prouve une fois encore : tout au long de son Histoire, l'Homme a été viscéralement convaincu que l'époque à laquelle il vivait était destinée à durer éternellement. Comme si celle-ci était figée dans l'espace et dans le temps. Comme si rien ne viendrait plus jamais la bousculer, la transformer, la faire évoluer. Comme si les certitudes, les croyances, les lois, les modes de fonctionnement ne varieraient plus jamais. Comme si les idéologies, les méthodes de gouvernements, les économies, les industries, les sciences... que sais-je étaient figées pour jamais...

 
Évidemment, ce n'est pas vrai !!! Sinon, les civilisations humaines ne se seraient pas succédées ; au fil des siècles et des millénaires, les religions ne se seraient pas transformées ; les sciences, les savoirs, les technologies, n'auraient pas progressé. Que ce soit en bien ou en mal est une question de point de vue, de jugement personnel ou communautaire. Néanmoins, les faits sont là : qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, qu'on l'accepte ou qu'on ne l'accepte pas, qu'on l'apprécie ou qu'on ne l'apprécie pas, il en a toujours été ainsi. Et aujourd'hui, demain, dans dix ans, dans cent ans, ce sera toujours le cas.
 
Il y a quelque chose de fascinant et de passionnant dans cette notion à laquelle une grande majorité de personnes se raccrochent... presque désespérément. Quand on l'observe de plus près, c'est comme leur vie, leur santé mentale, en dépendait. "Non, ce n'était pas mieux avant. C'était juste différent !!!". Oui, il y a dix ans, il y a cinquante ans, il y a un siècle, il y a un millénaire, le monde, la société humaine, était différente. Il y avait de bons cotés à ces périodes de notre Histoire ; il y en avait aussi des mauvais. De la même manière que celle que nous traversons en ce moment.
 
Je me demande quelle est la personne qui souhaiterait revenir à l'époque des cerfs et des seigneurs, de l'Inquisition et de la toute puissance de la Religion. A l'époque où les voyages d'une ville à l'autre duraient des jours ou des semaines. Où l'on s'éclairait à la bougie, où le chauffage électrique n'était qu'une vue de l'esprit, de même que la télévision, Internet, le micro-ondes, le réfrigérateur... Une époque pas si lointaine ou l'on mourrait à trente ou quarante ans, où un enfant sur deux décédait avant l'age de dix ans. Une époque où la liberté de penser, de s'exprimer, de choisir son métier ou l'homme ou la femme avec lequel on, désirait fonder un foyer, n'existait pas.
 
Ah, bien sûr, il n'y avait pas de pollution. Le changement climatique n'était pas à l’œuvre. Le rythme des saisons était immuable. On n'était pas superficiel, l'éphémérité était une notion inconnue de la société puisqu'elle exigeait de construire sa vie sur la durée. Il y avait moins de pression et de stress vis-à-vis de son métier... pour les classes sociales les plus privilégiées. Les autres allaient aux champs dès l'aube et rentraient chez elles à la tombée de la nuit, n'avaient ni dimanches ni jours fériés. Les gens se rassemblaient plus aisément lors de veillées. La solidarité familiale, individuelle ou communautaire intergénérationnelle était une notion profondément ancrée dans les esprits. Mais rares étaient ceux ou celles qui savaient lire, écrire ou compter. La guerre - en Occident du moins - endeuillait régulièrement des populations entières. L'esclavage était considéré comme "normal"...
 
On vivait également en permanence de sa terre, mais les récoltes étaient maigres, les troupeaux se limitaient à quelques bêtes. La nourriture était saine, sans pesticide... mais beaucoup plus restreinte dans sa diversité et dans son abondance puisque de nombreuses personnes mourraient du manque de certains éléments essentiels. L'hygiène n'était un impératif essentiel ; même si beaucoup de gens étaient plus résistants à des maladie auxquels nous sommes désormais moins résistants. Les femmes étaient soumises, n'avaient pas le droit d'avoir un emploi. Leur unique vocation était de se marier, de s'occuper des taches ménagères, et d'élever leurs enfants.
 
Bref, tout était différent. Et ça sera différent demain, ne croyez pas que la civilisation qui est la notre est destinée à se perpétuer ad vitam eternam... A mon humble avis, ceux et celles qui pensent ainsi appartiennent déjà au passé. Un peu comme si un jour, à une époque où ils se sentaient particulièrement heureux et épanouis, jeunes et pleins de rêves, d'espoirs et de projets certainement, ils avaient tenté d’arrêter le cours du temps.
 
Sauf que le temps à continué à s'écouler sans eux. Les années, les décennies peut-être, se sont envolées. Ils ont vieilli, leurs enfants sont devenu des adultes, des parents à leur tour éventuellement. Mais ceux et celles qui ne les ont pas accompagné - avec leurs bouleversements dans tous les domaines de leur existence et de notre société - se sont perdu en cours de route. Ils se sont cramponné à cette période de leur vie où tout leur paraissait à portée de main. Ils ont effacé de leur mémoire ses cotés négatifs, ses épreuves et ses difficultés, ses drames et ses expériences malheureuses. Ils l'ont idéalisée parce que, souvent, étaient alors à l'aube de leur propre histoire. Sauf qu'entre l'aube de leur histoire et aujourd'hui, ça n'a plus rien à voir.
 
Et je le répète, ni en mieux, ni en pire, quoi qu'ils en pensent, quoi qu'ils en disent, quels que soient les affirmations, les justifications, les discernements, les diagnostics... qu'ils mettent en avant, il n'est objectivement pas possible de comparer ce qui n'est pas comparable. J'avoue modestement que je trouve cette façon d'envisager les choses fascinante. Parce que selon moi, c'est une erreur monumentale de considérer tout ceci ainsi.
 
Pire, c'est un crime parfois. Parce que ça conduit certaines personnes à renouveler les erreurs qui ont été commises lors de ces périodes plus ou moins lointaines, à les pardonner ou à les minimiser. Elles n'en n'ont rien appris. Elles ne leur ont pas permis d'évoluer en même temps que le monde et la civilisation auxquels ils appartenaient. Par ailleurs, les solutions mises alors en avant pour se mesurer aux tourments de ces dernières ne sont pas transposables aux difficultés traversées par la notre. Puisqu'elles n'ont rien à voir l'une avec l'autre. L'exemple typique : c'est comme si on désirait labourer un champs avec les outils du Moyen-Age alors que des outils plus récents plus appropriés à la population du début du XXIe siècle existaient.
 
Il en est de même pour les répercussions qu'auront cette crise liée au coronavirus à laquelle l'Humanité toute entière est confrontée actuellement. Demain reste à inventer. Et se référer à ce qu'est notre modèle de société présent ou passé n'est pas la bonne solution. Notre civilisation post-industrielle, consumériste à l’extrême, à l'hyper-libéralisme vorace dans tous les secteurs, vit ses derniers feux. Nul ne peut le nier. Ceux et celles qui s'imaginent que nous pouvons - que nous devons - revenir en arrière, se comportent comme s'ils étaient resté figés dix, vingt, cinquante en arrière.
 
Bien-sur, nous pouvons en tirer de nombreux enseignements. C'est ce à quoi sert l'étude du passé justement. Et je suis bien placé pour la savoir. Il peut nous faire comprendre pourquoi et comment nous en sommes arrivés là. Néanmoins, il ne détient pas les solutions aux défis qui nous attendent. C'est à nous, du plus humble d'entre nous au plus puissant d'entre nous, d'inventer ce monde nouveau. Car, ne vous bercez pas d'illusions, le monde post-coronavirus sera totalement différent de celui que nous quittons présentement.
 
D'ailleurs, ces changements vont probablement s'accélérer, être de plus en plus visibles, de plus en plus irréversibles, dans les mois et les années qui viennent. Ils sont annonciateurs de bouleversements sans commune mesure avec ce à quoi nous confère le coronavirus. Il n'est que le premier coup de semonce d'un engrenage auquel aucun d'entre nous ne peut échapper. Nous vivons une période historique aussi décisive que la fin du Communisme en 1991 ou le 11 Septembre 2001.
 
Rien ne sera plus jamais comme avant. J'en suis conscient. Mes yeux fixés sur l'horizon qui se dessine devant nous, je vois les pièces de ce puzzle à l'échelle humaine se mettre en place les unes après les autres. Elles font peu à peu prendre forme à l'ensemble de ce qu'il représente. Et si je comprends que cela puisse faire peur, si je conçois que cela puisse briser nombre de vérités depuis longtemps étables, si je sais que cela met à bas bien des évidences, personnellement, tout cela ne me surprend pas. Et de ce fait, cela ne me terrifie pas.
 
Car en tant qu'historien, je sais que les civilisations naissent, vivent, et meurent. Au mieux elles se métamorphosent pour ne plus ressembler à ce qu'elles éraient auparavant, pour ne plus propager les mêmes valeurs, les mêmes idéaux qu'autrefois. Comme les Hommes ; ceci est la plus irréfutable des évidences. Que ce soit pour hier, pour aujourd'hui, ou pour demain, c'est ce que je trouve de passionnant et de fascinant à décrypter
 
 
Dominique Capo

 

 

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