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Mes Univers
15 mai 2008

De Deiteus Mythica, le Mythe des Demi-Dieux : Pages 575 - 581

empire_romainEn 32, un Temple dédié à Bêl est inauguré à Palmyre par un substitut de Tibère. Edifié sur une terrasse artificielle, il fait la synthèse entre la tradition Orientale des tours-autels et la tradition Greco-Romaine du périptère corinthien avec soubassement à six degrés.

L’année suivante, par contre, l’absence de numéraire à Rome entraîne la flambée des taux d’intérêt. La vente des biens immobiliers pour le remboursement des dettes amène la chute des prix fonciers. Tibère fournit 100 millions de sesterces aux banquiers pour financer des prêts sans intérêts. Dans le même temps, désespérée par l’exécution de son fils Drusus II, Agrippine – la veuve de Germanicus -, se laisse mourir de faim dans l’île où Tibère l’a reléguée. Un peu plus tard, celui-ci promulgue une loi contre les célibataires et les mariés sans enfant, pour lutter contre la baisse de la démographie. A la mort d’Hérode Philippe, il annexe la tétrarchie d’Iturée et de Trachonitide à l’Empire Romain. Puis, il désigne comme héritiers de ses biens privés son petit neveu Caius César – le petit fils de Germanicus – et son petit fils Tibérius Gémellus.

En 35, Tibère chasse le prince Parthe de son trône et met à sa place Mithridate d’Ibérie. Il aide Tiridate II – un client de Rome – à renverser le cousin de celui-ci en Iran, Artaban III ; et ce dernier est obligé de s’enfuir chez les Nomades du Nord est de son pays. Mais l’année suivante, Artaban III récupère son trône, tout en étant contraint d’accepter le protectorat romain sur l’Arménie. Il est alors reconnu comme roi des Parthes.

En 36 également, un violent incendie dévaste le Grand Cirque et l’Aventin. Tibère donne aux sinistrés 100 millions de sesterces pour reconstruire leurs maisons. Tandis qu’en 37, alors qu’il voyage sur le Continent, il meurt à Misène.

Dès lors, le Sénat proclame Empereur Caius César, dit Caligula, et casse le testament de Tibère, déshéritant ainsi Tibérius Gémellus. Reconnu seul héritier de Tibère, Caligula adopte son cousin Gémellus. A la fin de l’année, Caligula est victime d’une grave maladie. Il s’en rétablit, mais, prudent, il fait exécuter Tibérius Gémellus.

Malgré tout, la popularité de Caligula reste grande. Sa jeunesse – 24 ans -, le souvenir de son père Germanicus et les malheurs de sa famille décimée par Tibère, lui attirent les sympathies. Pourtant, ses relations avec le Sénat se dégradent vite. Et en réprimant la conjuration de Getulicus, le gouverneur de Germanie Supérieure, puis en menant une campagne avortée contre les Chattes, sa politique fait basculer le régime dans la terreur.

Caligula est alors le premier Empereur à se comporter ouvertement en monarque, rompant avec les attitudes « républicaines » d’Auguste et de Tibère. Il fait diviniser sa sœur et amante décédée depuis peu, Drusilla, pour imiter les traditions royales de l’Egypte. Il prétend se faire adorer à l’instar du dieu-Soleil et ne refrène plus ses pulsions sanguinaires. Il fait assassiner Ptolémée, et réprime les Maures affranchis qui s’opposent à l’annexion du pays en province romaine. Son goût de la provocation le fait taxer de folie. On assure qu’il veut décapiter la statue de Jupiter Capitolin pour y placer sa tète, ou encore élever son cheval au consulat. Mais ce « fou » est attentif à consolider les frontières. Il se rend sur les cotes de la manche pour organiser l’invasion de la bretagne. Mais l’impréparation de ses troupes l’oblige à surseoir à ce projet.

En 38, Caligula décide soudain de faire ériger une statue de lui au cœur du Saint des Saints de Jérusalem. Il ordonne ensuite aux Juifs de l’adorer en tant que substitut de Yahvé. Puis, en 39, il se met à protéger tous les membres des classes dirigeantes qui sont des Adeptes du culte d’Isis. La rumeur prétend même que Caligula lui même est un de ses Initiés ; et qu’il accorde à de nombreux Sanctuaires Isiaques établis dans Rome, d’organiser des cérémonies en son nom.

Aussi, la vieille Religion Romaine voit peu à peu son influence décroître. Car, non seulement la religion d’Isis prend de plus en plus d’ampleur, mais celles de Dionysos, de Cybèle, ou d’Hécate, se renforcent. En outre, leur Enseignement Occulte se développe. Rome devient la plaque tournante du commerce de la magie. Les Sciences des Songes, de la parole, des Egarements de la pensée et du Corps, de la divination, de la médecine, de la conjuration et des Envoûtements, se diffusent partout. Et beaucoup affirment que la thessalie en est le centre Maudit.

Et, de son coté, les dogmes évoqués par la secte Chrétienne se propagent désormais chez les esclaves et chez les mal lotis de la ville Eternelle ; tandis que d’autres Romains – provinciaux pour la plupart – se retrouvent confrontés aux Mystères Druidiques.   

Mais, tout à une fin, et en 41 – à l’âge de 29 ans -, Caligula est assassiné par deux tribuns des prétoriens. Le lendemain, après de vaines délibérations sur le rétablissement de la république, le Sénat reconnaît Empereur l’oncle de Caligula, Claude.

Claude a 51 ans. Il est méprisé de tous, maladroit et bègue, gardant la bouche toujours ouverte et baveuse. Il est secoué de tics et traîne une réputation d’idiot. Pourtant, jusqu’alors, il se consacre à l’étude érudite, à la rédaction d’ouvrages d’histoire, et même à la philologie. Claude a également deux épouses : Messaline et Agrippine.

A peine monté sur le trône, Claude se montre actif et intelligent. Entouré de ses affranchis Pallas et Narcisse, il crée une administration centrale en organisant les bureaux de la chancellerie et des finances. Soupçonneux et cruel, il lui arrive de faire exécuter des sénateurs accusés de complot. Il élimine son rival Aedémon et envoie Suetonius Paulinus conquérir la mauritanie et pousser jusqu’aux portes du Sahara. Et il entreprend la construction d’un port à l’embouchure du Tibre, car le fleuve qui relie Ostie à Rome est trop étroit pour accueillir les navires.

Car, au cours des siècles, Ostie a vu croître son importance, devenant l’entrepôt de Rome. Il faut donc construire d’énormes digues et un réseau de jetées qui permette l’ouverture de vastes bassins : un phare gigantesque est édifié. Et l’historien Dion Cassius explique :

« A Rome, où presque tout le blé consommé est importé par voie d’eau, vient de sévir une grave famine. S’il n’assure pas un ravitaillement régulier, l’Empereur risque de voir éclater des révoltes. En effet, depuis Auguste, les Empereurs sont tenus de nourrir à leurs frais quelque 200 000 Romains libres, donc oisifs, mais sans ressources. Pour assurer leur subsistance, on a créé la préfecture de l’Annone, service public chargé de l’approvisionnement et de la distribution. On fait venir le blé d’Egypte, où 6 millions de fellahs fournissent près de 12 millions de boisseaux de blé par an, ainsi que de l’Afrique proconsulaire. C’est ce blé qui permet à l’Empereur de se poser en bienfaiteur du peuple romain. De plus, les grandes routes commerciales aboutissent ici : marins et négociants apportent vins, épices, parfums, tissus et objets précieux en provenance de l’Empire, de Chine ou de l’Inde ». Le port d’Ostie devient ainsi peu à peu une plaque tournante du commerce méditerranéen.

En 42, Pomponius Mêla l’Espagnol, qui est apparenté aux Sénèques, compose une merveille « Géographie Latine ». Et un peu plus tard, le Philosophe et exégète alexandrin Philon meurt, tandis qu’il tente de concilier les pensées juive et grecque.

En 43, comme Caligula avant lui, Claude ordonne la conquête de l’île de Bretagne. Il confie le commandement de ses troupes à Plautius. Dans le même temps, sachant que le successeur d’Hérode le Grand – Agrippa Ier – a réussi à reconstituer un royaume en Judée grâce aux largesses de Caligula, il annexe cette province à l’Empire Romain. En 45, troublé par la querelle de ses princes, il met la thrace sous tutelle. Et il introduit le culte d’Attis à Rome.   

En 47, Claude remplace le camp de légionnaires installé en Germanie, par une colonie romaine : « Colonia Claudia Ara Agrippinensium » - ou « Cologne » ; il s’agit alors de la plus ancienne cité de l’Empire située au delà du Rhin.

Dès lors, des vétérans s’y installent ; le culte impérial s’y organise. Claude lui accorde le titre de colonie honoraire. Elle est dotée du droit italique, statut avantageux mais faveur rare. Elle est donc exempte de tribut, son territoire étant assimilé à celui de l’Italie.

Les colons s’administrent à la manière avec leur curie, Sénat municipal formé de décurions et de magistrats. Cologne – comme Trèves – témoigne donc de la volonté impériale de faire progresser la romanisation en Germanie par la fondation coloniale et l’urbanisation.

En 48, l’Empereur Claude prône de plus en plus l’intégration des peuples soumis, et propose de permettre aux notables de la gaule « chevelue » d’entrer au Sénat. Un « sénatus consulte » est voté en ce sens, mais il ne concerne que les Eduens. Puis, sur le conseil de son affranchi Narcisse, il met à mort sa femme Messaline.

De fait, par un nouvel édit, il recommande aux maîtres la douceur et le respect pour les esclaves et les affranchis. En effet, les abus sont toujours nombreux alors qu’un réel humanisme, inspiré par les stoïciens, pénètre les mentalités. Mais l’esclavage, malgré la vague d’affranchissement, n’est pas remis en cause.

Dès lors, entre les esclaves et les hommes libres de naissance, un groupe social se développe. Il s’agit en général des esclaves les plus instruits. Claude a les siens, Pallas, Narcisse, Calliste, Polybe, des Orientaux fidèles et capables, cependant cupides et arrogants. Ils dirigent l’administration impériale avec beaucoup d’ambition. Tandis que d’autres gèrent des domaines privés, des entreprises commerciales ou bancaires.

Or, au même moment, bien qu’il domine encore la hiérarchie sociale, le Sénat voit son rôle diminuer. Le sénateur doit avoir un cens minimal d’un million de sesterces. Comme à l’époque républicaine, les magistratures de Rome lui sont réservées : questure, préture, consulat ou préfecture de la ville. Il peut être gouverneur de province avec le titre de proconsul. Dans les provinces armées, dites impériales, il commande les légions et est appelé légat. De plus, les 600 sénateurs, s’ils ne choisissent pas l’Empereur, lui confèrent l’investiture.

Cependant, la réalité du pouvoir appartient désormais à ce dernier, et « l’Adlectio » permet à l’Empereur d’introduire au Sénat les « homines novi » tandis que s’éteignent les dynasties de la « nobilitas » républicaine, frappées par les purges successives. La proportion de Romains et d’Italiens diminue au profit des Occidentaux puis des Orientaux.

Pourtant, le Sénat n’est ni indifférent ni passif. La mentalité évolue, certains adoptant la morale stoïcienne, d’autres l’épicurisme. Reste l’incontestable domination culturelle des Sénèque, Tacite et Hérode Atticus. 

En 49, Claude épouse en secondes noces, sa nièce Agrippine II, la fille de Germanicus. Peu après, il adopte son beau fils Néron, puis son gendre en se mariant avec Octavie. En 52, il assèche le lac Fucin ; et malgré un échec partiel, il parvient à faire dégager des terres destinées à être cultivées. Puis, fin 54, il meurt empoisonné par sa femme. Et celle-ci fait acclamer Néron – qui a 17 ans - par les cohortes prétoriennes et le fait confirmer par le Sénat dans la fonction de prince. Comme Caligula, dont il est le neveu, il compte parmi ses ancêtres Auguste, Livie et Antoine.

Voilà donc Néron cinquième Empereur de Rome, cinquième titulaire d’un régime, l’Empire, qui n’est plus contesté et que tout le monde reconnaît comme la meilleure forme de gouvernement. Cependant, depuis sa création et le règne d’Auguste, les difficultés qu’il comporte subsistent. Elles touchent aux relations entre le prince et le Sénat, aux sentiments du peuple qui, depuis Tibère, n’élit plus les magistrats, au rôle dévolu aux militaires et, en particulier, aux cohortes prétoriennes, toutes puissantes dans l’entourage des Empereurs : depuis Tibère encore, elles sont cantonnées à Rome. La dernière difficulté, mais non la moindre, concerne la conception de la personne du prince. Les provinces orientales de l’Empire, et certaines provinces occidentales, le considèrent comme un dieu vivant. A Rome, la divinisation du prince inspire plus de répugnance. Auguste et Claude sont devenus des Dieux. Mais après leur mort, Caligula, qui a voulu en être un de son vivant, est mort de cette ambition.

L’analyse que Néron fait de cette situation s’enrichit des conseils que lui donne son précepteur, le philosophe Sénèque. Un bon prince se doit d’être clément, à la fois par penchant naturel et par volonté politique. S’il règne par cette vertu, les citoyens deviendront progressivement meilleurs. Néron donne donc satisfaction aux élites, répugnant aux condamnations capitales, car étant épris de musique et de poésie. Il rêve également d’être un grand artiste, donne des fêtes grandioses au cours desquelles, il se produit sur scène comme Apollon Citharède ; et cela, même s’il qu’il court les tavernes la nuit, molestant parfois les passants avec ses compagnons.

Sénèque orne cette vision philosophique du gouvernement de comparaisons choisies : le bon prince se comporte envers son peuple comme les Dieux envers les hommes ; il est comme le soleil, il est comme Apollon. Mais, les premières années, Néron diffère la réalisation de certains aspects de ce programme. Il mène une politique d’ente avec le Sénat. Le meurtre de Britannicus, en 55, dont on l’accuse sans réelle preuve, ne lui porte pas préjudice. Même ceux qui le soupçonnent d’en être l’auteur comprennent qu’il se soit défait d’un rival potentiel.

En 56, Sénèque inaugure par ailleurs son consulat. Il subit alors la double influence de l’éloquence et de la philosophie pythagoricienne. Il écrit des traités tels que « De la brièveté de la vie » et « les Trois consolations à Marcia », réflexions sur la destinée de l’homme. Il s’adresse également à sa mère Helvia et à Polybe, l’affranchi de Claude, à qui il présente les contradictions du philosophe surmontant la solitude et l’ennui, et du courtisan désireux de rentrer en grâce. Il se voit encore confier, en compagnie du préfet du Prétoire Burrhus, le rôle de conseiller du prince. Et dans son « Apocoloquintose », il définit les termes de la réaction contre Claude ; tandis que son « De la clémence » pare Néron des vertus du Stoïcien.

En 57, Néron envoie le général Corbulon en Arménie pour y rétablir le protectorat romain. Celui-ci chasse Tiridate – le frère du roi des Parthes - d’Arménie, et installe Vologèse sur le trône. Or, son ambitieuse politique orientale est bientôt mise en échec : la paix de Rhandéia rétablit Tiridate roi d’Arménie, bien que celui-ci reçoive sa couronne des mains de Néron en signe d’allégeance. L’Empereur est instruit du premier accrochage entre Romains et Sarmates sur le bas Danube. Il expédie Suetonius Paulinus prendre l’île Bretonne de Mona, un Sanctuaire du Druidisme en 58. Il lui demande d’y découvrir ses Mystères, et d’y anéantir la plus grande partie du clergé Celte. Et au retour de ce dernier, il fait écraser la révolte de Boudicca, la reine des Icéniens du Norfolk.

Or, en 59, Agrippine, la mère de Néron, est de plus en plus possessive vis à vis de Néron. Elle est prête à tout pour le garder près d’elle, même à l’inceste. Néron la fait donc assassiner – ainsi que le prétendant à sa succession Britannicus – par son premier Conseiller Burrus. Peu après, il se transforme en Empereur tyrannique ; mais se laisse aisément manipuler par les deux Grands Clercs des Rites Solaires que sont le préfet du Prétoire Tigellin, et sa maîtresse, la belle patricienne Poppée.

Néron inaugure ensuite la nouvelle politique dont il a rêvé. Elle a été discutée dans un cercle poétique qu’il préside et dont le plus beau fleuron est le poète Lucain. Ce dernier, au début de sa « Guerre Civile » signe un éloge hyperbolique du prince. Dans le même temps on célèbre le retour de l’Age d’Or. Il lance une expédition vers le Caucase des Parthes. Officiellement, c’est pour y faire la paix. Mais, en fait, elle a pour but de ramener à Rome les Puissances Magiques liées au culte du Soleil Roi. Puis, il ordonner de fermer le Temple de Janus ; le dieu aux deux visages.

Un peu plus tard la même année, Néron donne des fêtes qu’il appelle « Jeux de la jeunesse ». Puis, en 60, il créé les « Néronia ». A l’instar des jeux Grecs, ces jeux quinquennaux allient la musique aux exercices gymniques et hippiques. Lui même y participe. Ce prince poète, initiateur d’un nouvel Age d’Or, n’oublie pourtant pas qu’il est coupable de matricide. Il choisit d’expier sa faute en interprétant des rôles qui rappellent singulièrement sa vie : sur scène, il est Oreste ou Œdipe. Il s’exerce aussi aux courses de char, pour y exceller, tel le soleil conduisant l’attelage qui éclaire le jour.

C’est une véritable révolution culturelle qui se prépare. Les valeurs du pouvoir, l’art et l’harmonie sur lesquels il entend se régler surprennent les classes dirigeantes. Alors, en 61, refusant toute critique, Néron commence à durcir sa position. En 62, il bannit, puis fait exécuter son épouse, Octavie, et se remarie avec Poppée. En 63, il accorde le trône d’Arménie à Tiridate. En 64, conscient que son programme n’est pas compris des Romains, il va se produire à Naples, ville de culture Grecque, où le public lui fait un triomphe.

En Juillet 64, le hasard fournit à Néron un spectacle qu’il n’attendait pas : un incendie ravage Rome. Ce qui lui permet de réaliser le palais de ses rêves. Construite selon de nouvelles techniques, luxueusement décorée, la « Maison Dorée » est gigantesque : un colosse de 40 mètres de haut, image de l’Empereur en divinité solaire, orne le vestibule. Des plafonds sont recouverts de caissons en ivoire mobiles afin de faire pleuvoir fleurs et parfums sur les convives. La coupole du grand salon semble tourner comme l’Univers. Puis, apparaît un péristyle élevé dans la continuité du Forum, autour d’une statue colossale d’Hélios avec une couronne radiée.

La maison Dorée est également un grand parc. On y voit un lac où se reflètent des pavillons ; des champs de blé, des vignes, des pâturages où paissent des moutons ; des bois hantés par des daims et d’autres bêtes sauvages. Et la maison elle même est ouverte sur ce paysage composé.

En entrant dans ce domaine, il dit : « Je vais enfin commencer à être logé comme un homme. » Ce mot paraît une insolence de plus alors qu’il exprime la certitude que rien n’est trop beau pour l’homme et que toutes les ambitions lui sont ouvertes. Mais du même coup, les moralistes condamnent les autres projets de l’Empereur : le percement du canal de Corinthe est abandonné, ainsi que le percement du canal entre la campanie et Rome, à travers les marais Pontins. Là encore, Néron veut réaliser l’incroyable. Il instaure une sorte d’humanisme triomphant qui, dans un monde où les Dieux se taisent, fait de l’homme son propre dieu.

Pour réaliser ses projets, Néron engage des dépenses énormes, et le Trésor, en difficultés depuis longtemps, subit une crise grave. Néron est obligé de dévaluer le denier et l’aureus. Il sacrifie ensuite les Chrétiens pour satisfaire le peuple, qui veut des coupables et apaiser les soupçons qui pèsent sur lui. Il fait crucifier Pierre, le pécheur Juif auquel Jésus a confié la charge de pasteur universel. Pour éviter à la ville rebâtie de telles tragédies, il prend des mesures qui allient sagesse et esthétique. S’il est discrédité, c’est qu’il songe à baptiser « Néropolis » la nouvelle ville. Il récupère surtout, en plein centre, de vastes terrains, pour y faire construire un palais, qu’il appelle lui même la « Maison Dorée ». Et ce n’est pas tant le luxe de cette demeure qui choque les Romains que les idées révolutionnaires qui y sont expérimentées.

A force de refuser l’impossible, de se plaire dans la transgression, Néron indispose depuis longtemps les conservateurs. Lorsque, après la mort de Poppée, il feint d’épouser un castrat qui ressemble à la disparue, c’en est trop : en 65, sous la conduite de Calpurnius Pison, une conspiration se forme. Elle n’a pas de programme politique révolutionnaire. Ce n’est pas le régime qu’elle met en cause, c’est le prince. Quand il en est informé, Néron est atterré. Il sévit, en homme déçu d’être contraint d’ensanglanter son beau rêve d’harmonie. Lucain, le jeune poète, l’ami d’autrefois, est impliqué : l’Empereur l’oblige à se donner la mort. Sénèque qui, depuis quelques temps s’est retiré de la cour, reçoit le même ordre. Il n’est pas innocent non plus. Et il en fait de même pour Pétrone – l’auteur du « Satiricon », ce roman de mœurs qui met en scène les aventures d’un jeune libertin - et le Stoïcien Thrasea, qui doivent s’ouvrir les veines devant lui.

Un an plus tard, Néron réaffirme son programme. Depuis le début de son règne, sous la conduite du général Corbulon, les Romains combattent leur ennemi héréditaire, les Parthes. Le roi des Parthes, qui a nommé son frère Tiridate roi d’Arménie, est chassé par Corbulon. Celui-ci négocie et obtient pourtant un arrangement : Néron couronnera lui même Tiridate si ce dernier vient en personne à Rome.

Tiridate vient donc, en 66. Il reçoit un accueil royal et reconnaît en Néron son suzerain et son dieu. Sur une toile tendue au dessus du théâtre, l’Empereur est représenté à l’image du soleil, conduisant un char au milieu d’un champ d’étoiles. L’heure est venue de fermer les portes du temple de Janus : le dieu n’aura plus à se porter au secours des Romains en guerre. Néron proclame la paix universelle.

A la fin de l’été 66, Néron part pour la grèce. Il veut participer à tous les concours musicaux, se produire comme acteur et comme cocher dans les jeux ; mais il veut aussi affirmer son attachement à cette terre, en conférant au Péloponnèse une sorte d’autonomie à l’intérieur de l’Empire. Pendant qu’il recueille les prix et s’épanouit sous les applaudissements, il ne s’inquiète pas des remous qui bouleversent l’Empire. En Judée, les Juifs se révoltent, donnant à Vespasien l’occasion de déployer toutes ses qualités militaires.

A Rome, les mécontents sont nombreux, et, lorsque Néron revient, en triomphateur, il ne perçoit pas l’importance des nouvelles qui lui parviennent des provinces et surtout de la gaule lyonnaise, dont le gouverneur Julius Vindex vient de se révolter.

Les événements, désormais, s’enchaînent rapidement. Vindex, qui a pris des contacts avec Galba, légat du Sénat et du peuple romain, et gouverneur de l’Espagne citérienne, est écrasé par les légions de Germanie, restées fidèles. Galba obtient alors le ralliement d’Othon, le gouverneur de Lusitanie contre l’Empereur. Néron prévoit d’aller au devant des révoltés et de chanter quelques airs de sa composition. Vain soubresaut d’un chimérique espoir d’harmonie. Les rebelles reçoivent bientôt l’appui des légions de Germanie.

Incapable d’affronter l’échec de son rêve, Néron ne réagit pas. Il laisse les rumeurs courir dans Rome, en particulier celle de sa fuite en Egypte, que croient les cohortes prétoriennes. Le peuple aussi, qui l’aime et le regrettera longtemps, est abusé. Abandonné par les prétoriens et déchu par le Sénat, Néron se donne la mort le 9 Juin 69 tandis que Galba entre à Rome. Il a 31 ans. Ainsi s’achèvent la dynastie julio-claudienne et le règne d’un homme moderne, passionné de nouveautés dans un monde conservateur. Son idéal a été généreux, mais intempestif. Son pouvoir a été grand, mais il l’a surtout employé à venger ses déceptions.

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