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Mes Univers
24 décembre 2008

De Deiteus Mythica, le Mythe des Demi-Dieux : Pages 1258 - 1260

France_moderneEn 1852, les types de propriété et l’organisation du monde rural sont en pleine mutation, la propriété paysanne devenant peu à peu l’idéal auquel aspire chaque agriculteur. En France, la terre est plus morcelée qu’ailleurs. S’il y existe une minorité de 100 000 très gros propriétaires, qui disposent de 33 % du sol, trois millions de paysans français se partagent difficilement 17 % des territoires disponibles. Malgré ce déséquilibre flagrant, nombre de petits propriétaires peuvent espérer augmenter la superficie de leur domaine, car l’acquisition des terres n’est pas entravée par des règles juridiques contraignantes.

Dans le Sud, ce sont en effet les grandes propriétés de type latifundiaire, qui dominent. La revendication paysanne du droit à la terre se renforce et commence à porter ses fruits. La généralisation de l’économie monétaire et l’entrée du monde rural dans les circuits du capitalisme aident au démantèlement naturel des grandes propriétés foncières. Peu à peu, la petite propriété agricole se répand, sans pour autant se généraliser.

La modernisation des techniques ne progresse pas non plus partout à un rythme identique. Si elle est plus rapide dans les grandes et moyennes propriétés des plaines et des bassins alluviaux que dans les zones montagneuses, elle est cependant inéluctable. La mécanisation progressive du travail bouleverse la production, même si l’introduction des machines dans les campagnes est lente. Les engrais d’origine minérale et chimique concurrencent très vite les engrais naturels : on découvre les phosphates, la potasse fait son apparition peu après et un nouvel engrais venu d’Amérique du Sud, le « guano », fait l’objet d’un commerce important.

La modernisation technique a des effets spectaculaires sur la production agricole. En effet, les disettes récurrentes qu’ont connues les économies de l’Ancien Régime disparaissent peu à peu. La première moitié du XIXème siècle connaît néanmoins cinq graves crises alimentaires, mais celle de 1853 – 1855 est la dernière dont souffre l’hexagone. La production agricole réussit ainsi à s’affranchir en grande partie de la répétition des accidents climatiques grâce à la modernisation technique. La plus grande efficacité des circuits commerciaux et la spécialisation régionale des cultures jouent aussi un rôle important dans le rééquilibrage de la production et dans la constitution d’économies agricoles stables.

Pourtant, la mécanisation de la production a ses revers : les besoins en bras sont de moins en moins importants. En outre, pour beaucoup de paysans, l’acquisition de terres est un but impossible à atteindre, surtout s’il faut investir dans des machines modernes. L’appel de la ville et de l’étranger apparaît alors comme un moyen de compléter et d’entretenir le patrimoine ou de s’installer définitivement dans un autre milieu. Que l’émigration soit saisonnière ou de longue durée, elle s’organise autour des solidarités familiales, villageoises ou régionales, qui subsistent fortement dans les grandes villes. Il y a celle des milliers de tisseurs flamands qui viennent s’installer à Lille et dans ses alentours ; elle bouleverse l’équilibre démographique de la région ; il y a aussi celle des maçons Limousins. Mais, la migration saisonnière la plus vive est celle des Savoyards qui, durant les mois d’hiver, assurent le ramonage des cheminées des immeubles parisiens et reviennent dans la ferme familiale au printemps pour relancer l’exploitation.

De fait, la population paysanne tend à diminuer peu à peu. Elle reste cependant majoritaire, même si elle décroît de manière constante ; le phénomène est d’ailleurs ressenti comme inéluctable. En 1780, 80 % des Français étaient paysans, en 1850, ils ne sont plus que 65 %. Cependant, le monde paysan est encore le premier secteur économique, il fournit des bras à l’industrie et des soldats pour les nombreuses guerres continentales et coloniales.

Le monde paysan est aussi bien encadré politiquement. En effet, le traumatisme de la révolution a fait naître chez lui deux types de sensibilité. L’une est conservatrice et reste fidèle à ses élites traditionnelles, nobles et prêtres ; l’autre est de tradition républicaine et jacobine, attachée au culte de Napoléon. Il faut pourtant attendre les élections au suffrage universel pour que le monde paysan ait droit de vote. Apparaît alors un net clivage entre une droit et une gauche paysannes, cette dernière étant essentiellement concentrée dans le Midi et dans le Centre tandis que l’Ouest vendéen demeure contre-révolutionnaire.

Mais, à gauche comme à droite, les paysans qui ont accédé à la propriété grâce à la révolution, redoutent les « partageux ». Ils préfèrent également confier la défense de leurs intérêts à des notables locaux plutôt qu’à des cultivateurs qui ne représentent, qu’1,8 % d’élus aux Conseils généraux. 

En même temps, la classe bourgeoise, elle, a profité des soubresauts politiques de la révolution pour faire fortune. Les plus riches de ces nouveaux notables sont propriétaires fonciers, d’autres sont à la tète des premières grandes entreprises industrielles. A ces fortunes traditionnelles vient s’ajouter la nouvelle classe des grands commis de l’Etat.

Certains bourgeois développent bientôt des « utopies », des modèles de fonctionnement de société idéale. Ils placent leurs espoirs dans la transformation de la société industrielle pour en faire une notion de « prolétariat ».

Cette dernière est mise au jour, pour la première fois, par le socialiste Constantin Pecqueur. Pour lui, le prolétariat rassemble tous ceux qui ne possèdent rien, mis à part leur force de travail. Sans attache avec le monde juridique, exigeant la réalisation des principes égalitaires, le prolétariat est le sujet révolutionnaire qui doit jouer le rôle de Messie dans la régénérescence sociale et morale de l’Humanité.

Après lui, plusieurs écoles ou tendances socialistes utopiques naissent. Ces tendances illustrent les différents traits – le pragmatisme, la radicalité fondée sur une réflexion philosophique et sur une vision romantique, l’opportunisme politique -, mais aussi des influences culturelles et des états de développement inégaux de la classe ouvrière. En outre, elles s’enrichissent grâce aux expériences et aux réflexions d’auteurs aussi divers que Saint-Simon, Fourier et Blanqui, sans oublier Considérant, Proudhon, Cabet et Dézamy. La multiplicité des tendances tient en effet autant à la diversité des personnalités qui conduisent à l’effritement de certains courants, comme celui des saint-simoniens ou celui des icariens, qu’à leurs différentes perspectives : régénération morale, réforme politique ou sociale.

De fait, le socialisme utopique regroupe à la fois des pères de l’anarchisme, comme Proudhon et Dézamy, qui établissent une critique sévère de tout Etat, et des hommes nourris d’esprit scientifique, tels les saint-simoniens qui croient dans les vertus d’un progrès soumis à un socialisme étatique et s’appuyant sur les producteurs industriels.

Mais l’aspect le plus significatif du socialisme utopique reste la survivance des valeurs religieuses. Le rôle de sauveur est dévolu à des maîtres qui forment des communautés où les valeurs individuelles sont censées contribuer à l’harmonie sociale. Ainsi, Charles Fourier ou Etienne Cabet instituent la société parfaite.

Car, publiant ses projets de réforme sociale dans « la théorie des quatre mouvements et des destinées générales », Charles Fourier analyse avec férocité la société bourgeoise et expose sa « loi de l’attraction personnelle », qui régit les relations entre les êtres. Par ailleurs, dans une œuvre considérable – dont « le Nouveau monde industriel » -, il se fait le héraut d’une société idéale constituée de phalanges regroupant 1600 individus dans des phalanstères, ou unités architecturales, sociales et productives autonomes. Chaque membre est actionnaire du phalanstère, dont la direction est élue ; les bénéfices sont répartis entre le capital, le talent et le travail. L’organisation de l’Humanité en phalanstères aurait pour résultat « l’harmonie universelle ».

De son coté, Etienne Cabot publie un roman philosophique, « le Voyage en Icarie », qui connaît un grand succès. Dans cet ouvrage, il décrit une colonie égalitaire et communiste qui, par son aura sans violence, réformera l’Humanité. Cabet se réfère à l’Evangile pour justifier sa volonté d’instaurer une société nouvelle régie par un communisme chrétien.

Enfin, Auguste Comte, après une formation scientifique à l’Ecole Polytechnique, est un collaborateur du socialiste utopique Saint-Simon. Ayant rompu avec son maître, il cherche à fonder une doctrine philosophique sur laquelle asseoir le progrès de l’Humanité dont rêvent les utopistes. Dans « le Cours de Philosophie Positive » qu’il donne à Paris, il distingue trois états successifs de l’Histoire Humaine : le stade théologique, le stade métaphysique, au cours duquel les divinités sont remplacées par des entités abstraites, et le stade positif, où, libéré par la science et l’industrie, l’homme peut améliorer le Monde grâce à la compréhension des règles qui le régissent.

De fait, dénonçant la société capitaliste en voie de formation comme productrice d’inégalités sociales, individuelles et collectives, le socialisme utopique est à la recherche d’alternatives le plus souvent concrètes, mais aussi à caractère messianique. Cette perspective se heurte aux enjeux de la lutte ouvrière et sociale qui s’imposent. A cette date, Marx et Engels publient « le Manifeste du parti Communiste », où ils exposent les principes d’un socialisme matérialiste et scientifique, qui affirme dépasser le socialisme utopique.

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