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10 septembre 2009

De Deiteus Mythica, le Mythe des Demi-Dieux : Pages 1528 - 1530

France_moderneL’Etat français naît à Vichy le 10 Juillet 1940, à un moment où la défaite anesthésie totalement les Français, jetés sur les routes de l’exode, rassurés par la personnalité incontestable du vainqueur de Verdun, octogénaire couvert de tous les honneurs républicains. Le discrédit qui frappe le régime des parlementaires depuis des années est hâté par l’habilité de Pierre Laval qui, dans les couloirs des palaces, manœuvre ce qui reste des élus du Front Populaire. Majoritairement maréchalistes, les Français saluent en Pétain le substitut aux « palabreurs de la démocrassouille », le rempart contre l’occupant, l’espoir pour des centaines de milliers de soldats prisonniers en Allemagne. Dès le 11 Juillet, le maréchal signe les actes officiels de la formule régalienne : « Nous, Philippe Pétain… ». Le général de Gaulle est donc bien seul à Londres, d’autant plus que le bombardement par les Anglais de la flotte française de Mers el-Kebir bouleverse les français. Le culte rendu à Jeanne d’Arc rappelle ainsi que le plus ancien ennemi héréditaire est bien la grande-Bretagne. Autour du maréchal gravitent des éléments disparates et rivaux, membres des ligues, notables, traditionalistes, agrairiens, techniciens « apolitiques », soucieux avant tout d’efficacité, dont le point commun est l’hostilité à la démocratie.

Les nouveaux gouvernants appellent à une « révolution nationale », expression empruntée au vocabulaire de l’extrême droite, et dont ils précisent rapidement les axes principaux. Il s’agit d’un régime autoritaire, voire dictatorial, fondé sur la soumission à des valeurs traditionnelles, parfois même réactionnaires, qui remplacent celles de la république : la devise « Travail, Famille, Patrie » se substitue à « Liberté, Egalité, Fraternité » ; le maréchal invite au retour à la terre, qui, « elle, ne ment pas ». Il se préoccupe de la baisse de la natalité qui affecte le pays depuis quelques dizaines d’années. Le régime avantage les pères de familles nombreuses, alors que les fonctionnaires célibataires ou sans enfants doivent accepter n’importe quel poste. La révolution nationale glorifie les mères, pourvu qu’elles restent au foyer, les célébrant par un jour de fête officiel, le dernier Dimanche de Mai. les élections et les institutions représentatives sont supprimées. La souffrance des Français doit contribuer à leur rédemption, car, selon Pétain, la défaite est due au fait « qu’on a revendiqué plus qu’on n’a travaillé » et que « l’esprit de jouissance l’a emporté sur l’esprit de sacrifice ».

Les « mauvais Français », Juifs, Francs-Maçons, communistes, sont exclus des postes de responsabilité, les instituteurs, surveillés, les jeunes gens, formés à l’école « rude et saine » des Chantiers de la jeunesse. On perpétue l’éducation familiale, morale et civique ; le catéchisme, enseigné pendant les heures de classe, complète cette formation. Le divorce est interdit dans les trois premières années du mariage. Des corporations regroupent ouvriers et patronat, soustrayant les ouvriers au marxisme. La morale catholique est exaltée, le maréchal, homme providentiel, image du père, est l’objet d’un véritable culte, qui fait de lui le symbole du redressement moral et culturel. La légion Française des combattants, créée par Pétain et violemment anticommuniste, veille au maintien de l’ordre nouveau. Le régime de Vichy, son extraordinaire activité législative, son pragmatisme, séduisent une partie des cadres de l’Administration, mais ces technocrates ambitieux se heurtent très rapidement aux effets de la collaboration.

Car, dès le 24 Octobre 1940, à Montoire, le maréchal rencontre Hitler et leur poignée de main est aussitôt immortalisée par les photographes. Dès lors, pour la plus grande partie des Français, il est légitime de collaborer avec l’occupant, puisque le vainqueur de Verdun lui serre la main. Pourtant, c’est Laval, que Pétain déteste, qui incarne d’intégrer la france dans l’ordre nazi, de faire d’elle le brillant second du Reich dans l’Europe nouvelle, le chef de l’Etat étant perçu comme un « bouclier » contre les abus de l’occupation. De fait, inlassablement, Laval propose une collaboration toujours plus étroite à des nazis méprisants, devance les souhaits de Hitler, pour en obtenir d’infimes avantages et maintenir une souveraineté fictive ; les Allemands ne s’y trompent pas, tandis que Pétain le fait arrêter en Décembre 1940. 

La collaboration prend alors des formes multiples. Economique, elle passe par le versement d’indemnités d’occupation, la livraison de produits agricoles et industriels, aboutissant à un véritable pillage. Culturelle, elle associe les artistes à la propagande allemande, en zone libre et en zone occupée. Des partis issus des mouvements qui, dès l’avant guerre, ont admiré le fascisme, rivalisent de servilité envers l’occupant : Parti populaire français de Doriot, Rassemblement national populaire de Déat, Parti franciste de Bucard. Grâce à leur presse, très violente, ils ont une certaine audience, en dépit de leur faible nombre d’adhérents. « Je suis partout », « Gringoire », « le Pilori » appelle les Français à la haine raciale et à la délation. Dans leurs colonnes s’expriment des intellectuels, tels Pierre Drieu la rochelle, Robert Brasillach ou Céline, qui donnent une large place à la collaboration mondaine.  Administrative, la collaboration fait coopérer les autorités des deux zones, comme celles des colonies, aux directives de l’occupant. La caution du maréchal explique, par exemple, la docilité de la police et son efficacité lors des rafles de Juifs. Collaborer, c’est aussi, pour Vichy, inciter les jeunes Français à travailler en Allemagne au titre de « la relève », censée favoriser le retour des prisonniers.

Mais, très tôt, les Français cessent de se laisser prendre aux discours de leurs gouvernants. S’ils gardent encore un certain respect pour Pétain, ils ne font plus confiance à un régime incapable de mettre un terme aux restrictions – la ration quotidienne de pain passe à 175 grammes ; celle de viande tombe à 360 grammes. Commence alors le temps de la débrouillardise, le « système D » : on mange des rutabagas et des topinambours, on élève des lapins dans des garde-manger, on fait pousser des tomates sur les balcons, mais surtout, on recourt au marché noir. Les Français les plus fortunés s’y procurent des surplus sans tickets, à la campagne ou chez des commerçants complaisants, les « B.O.F. » - ou « beurre, œufs, fromage » -. Cette activité parallèle désorganise les circuits commerciaux, qui ne peuvent même plus fournir les produits prévus par les services de ravitaillement. Les citadins les moins favorisés sont les premiers à en souffrir : leurs enfants connaissent vite la faim.

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