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Mes Univers
14 janvier 2012

La Citadelle des Ombres - Troisième Jour, Première Partie

144A l’instant précis où j’ouvre les yeux, tout n’est qu’obscurité et silence. Au loin, j’aperçois malgré tout l’ouverture du corridor menant vers l’extérieur. Je distingue les premières marches de son escalier éclairées par le Soleil du matin. Et la mémoire me revient aussitôt ; je sais où je me trouve.
Je murmure le mot permettant aux yeux d’émeraude du dragon ornant mon anneau de s’illuminer.  Les ténèbres alentours se dissipent instantanément ; et je peux contempler le décor qui m’entoure.
Je jette un regard en direction de mon compagnon. Il semble assoupi, bien que ses membres soient parcourus de légers spasmes. Les traits de son visage sont crispés par les images hantant certainement son sommeil. Des gouttes de sueur dégoulinent de son front jusque sur ses joues constellées de cicatrices plus ou moins récentes – dont certaines qui sont à peine refermées - et le bord de ses lèvres. Ces dernières tremblotent et paraissent prononcer des paroles incohérentes. J’ai l’impression que les songes dont il est la proie sont loin d’être agréables ; cela ne m’étonne pas. Je me demande d’ailleurs s’il n’est pas en train de revivre en rêve les événements auxquels il a été confronté les jours précédents. Je pense notamment au combat contre les créatures reptiliennes qui l’a conduit dans la Crypte.  
Je tente de me lever afin de m’approcher de lui. M’appuyant contre la paroi, je crains de chuter. Heureusement, mes jambes me soutiennent. Celle sur laquelle le Spectre d’Oleÿth a un instant posé ses doigts est évidemment encore ankylosée. Je sens la froideur qui l’a engourdi m’envahir de nouveau. Pourtant, les picotements qui l’ont accompagné se sont maintenant dissipés. La douleur qui m’a hier submergé jusqu’au sommet de ma cuisse également. Je ne perçois plus qu’une sorte de lourdeur la remplir. Et, tandis que j’effectue un mouvement de bascule vers le haut, celle-ci se dissipe déjà progressivement.
Je suis conscient qu’il faudra tout de même un certain temps pour que mon membre retrouve son entière mobilité. Et je peux remercier les Dieux de l’avoir échappé belle. Parce que je sais qu’il s’en est fallu de peu pour que je ne m’en sorte pas vivant.
En quelques pas j’arrive auprès du jeune Mage. J’écoute ses marmonnements incertains. Je reconnais immédiatement des mots que j’ai déjà entendu sortir de sa bouche la veille : « Eÿloth… attention, nous… je… attaque… Opheÿlie… baisse toi, je vais… flèche… appelle Dagosh… Il faut absolument… Citadelle des Ombres… atteindre l’Orbe avant les autres. ».
Ce n’est en effet pas la première fois que j’entends Fÿn-loth évoquer le nom d’Eÿloth. Déjà, le jour précédent, après que nous ayons fait connaissance, ne m’a-t-il pas expliqué que c’est lui qu’il a l’intention de rencontrer à la Citadelle des Ombres ? Quant à cette mystérieuse Orbe, je ne sais pas de quoi il s’agit. Mais j’ai l’impression que c’est quelque chose d’important. Et je me demande si elle n’est pas rattachée à cette énigmatique mission qu’il a déjà mentionnée devant moi ? Cette charge dont il ne veut rien me révéler sous peine de me mettre en danger de mort ?
Je pose délicatement ma main sur son bras. Je le secoue légèrement, afin de le tirer du profond sommeil dans lequel il est plongé. Je l’entends gémir ; puis, ses mots s’éteignent progressivement. Je le vois remuer sur le sol, changer de position. Ses yeux se mettent à papilloter, tandis qu’un épais bâillement sonore s’échappe de sa gorge, avant de retentir contre les parois murales du corridor. L’écho en est d’ailleurs si démesuré que de la poussière tombe durant quelques secondes du plafond. Enfin, il s’étire les bras, se redresse, et jette un regard circonspect et interrogatif dans ma direction.
Il ne semble pas me reconnaitre tout de suite. Ce n’est qu’au bout de quelques secondes d’indécision que son visage se détend tout à fait, et qu’il dit :
« Aÿcart, mon ami. Quelle étrange nuit. J’ai été la proie de plusieurs songes qui m’ont fait remonter loin dans le passé. Comme si j’avais revécu certains des moments les plus importants de mon enfance et de mon adolescence. N’est-ce pas étrange ?
-    Tout à fait, réponds-je, alors que mon visage se pétrifie d’effroi. ». Je réalise tout à coup que Fÿn-loth, lui aussi, vient de vivre des heures peuplées de souvenirs semblables aux miens. « Surtout en un lieu comme celui-ci, reprends-je, et après les péripéties que nous y avons enduré face au Spectre d’Oleÿth. Ce n’est pas l’endroit idéal pour se remémorer ses jeunes années.
Il acquiesce silencieusement et prend un air songeur : « Je crois que nous ne devrions pas nous attarder. Nous avons assez subi de péripéties en ce lieu. Je n’aimerai pas qu’il ne nous en arrive de nouvelles. Or, je crains que si nous restons ici trop longtemps, nous n’ayons encore de mauvaises surprises.
-    Tu as raison. Je ne sais pas, mais j’ai comme l’impression que cet endroit a été maudit. Il y a forcément une explication pour que l’Exilé et ses Serviteurs Spectraux soient enchainés à ce site. C’est d’ailleurs pour cela que je vais examiner de plus près les écritures hiéroglyphiques que j’ai aperçues hier au cours de l’orage ; autant celles qui se discernent sur les parois de l’autel, que celles qui se distinguent sur les façades des Pierres Levées constituant ce Sanctuaire Mégalithique.  
-    Crois-tu que cela soit bien raisonnable, s’enquiert-il. Tu ne crains pas de réveiller d’autres forces qui sommeillent peut-être ici ; des puissances éventuellement autrement plus dangereuses que celles desquelles tu m’as tiré ? ». Fÿn-loth fixe alors l’ouverture conduisant directement aux caveaux mortuaires d’Oleÿth et de ses acolytes. Et je m’aperçois que l’angoisse et le saisissement l’envahissent de nouveau. Puis, il s’appuie contre le mur auprès duquel nous nous trouvons afin de reprendre son souffle. Même s’il parait en meilleure forme, son état reste fragile, semble-t-il.
L’une de ses cicatrices parmi les plus récentes et qui se dévoile du haut de sa joue jusqu’à la base de son cou a maintenant pris une couleur sombre. Elle est en train de virer au noir. J’ai peur qu’elle ne se rouvre très vite. Je redoute également qu’elle ne laisse bientôt couler du pus, et que ce liquide bileux ne laisse échapper des miasmes qui l’affaibliront avant que nous ne puissions atteindre notre destination finale. Je crains en outre de ne rien pouvoir faire cette fois-ci pour le sauver, même avec toute la bonne volonté du monde, l’appui de tous les Dieux du panthéon Impérial, et l’aide de toute la Magie thérapeutique dont je dispose.
Je rétorque, plus brutalement que je ne le souhaite : « Je pense surtout que nous n’avons pas le choix. Comme toi, je ne sais pas quels autres dangers recèlent les Territoires Extérieurs, et la moindre information susceptible de nous en apprendre davantage à leur sujet peut, à un moment ou à un autre, nous sauver la vie. Je suis convaincu que, si j’avais pris cette précaution avant de pénétrer à l’intérieur de cette crypte, tout ceci ne serait pas advenu. Je nous en aurai fait sortir avant la tombée de la nuit. Tu n’aurais pas été ensorcelé et ensommeillé par les maléfices des créatures d’outre-tombe qui la hantent. Et tu ne serais pas meurtri autant que tu l’es actuellement. ».
Je passe rapidement ma main sur son visage afin d’essuyer les perles de sueur qui y apparaissent encore. Mes doigts caressent délicatement les quelques cicatrices qu’ils rencontrent sur leur route. Ils s’arrêtent à peine une seconde là où se discerne la balafre qui coure sur le côté de sa figure : « Tu vois ce que je veux dire, insistai-je en l’affleurant tendrement. Celle-ci me préoccupe plus que les autres. Si jamais elle s’ébrasait ou s’élargissait davantage, ta vie serait en danger ; et je ne pourrais pas faire grand-chose pour toi. Alors, si nous nous étions renseignés sur ce site et ce qu’il cache... ».
Fÿn-loth acquiesce encore une fois silencieusement. En même temps, son visage parait ravagé par la détresse et la souffrance. Puis, très vite, sa face change d’expression, et une farouche détermination les remplace.
Reprenant le dessus, il réussit à lâcher le pan de mur sur lequel il s’appuie. Il jette un regard vers l’escalier qui remonte vers la surface. Comprenant son intention, je lui tends mon bras. D’un geste, il refuse mon attention, puis fais une demi-douzaine de pas vers la lumière du jour. Il contourne prudemment un bloc de roche encombrant le couloir. Il évite des pierrailles éparses, la terre crevassée qui parsème le sol. Il déchire les toiles d’araignées accrochées çà et là et qui rendent sa progression difficile.
« Que fais-tu, dis-je. Ce n’est pas en nous précipitant que nous échapperons aux périls qui nous guettent.
-    Possible. Mais, du moins, je serai sorti d’ici. Si toi tu désires rester dans cette Crypte plus longtemps, je ne t’en empêcherai pas.  Je suis conscient que tu as raison en ce qui concerne les énigmes qui se dissimulent ici. J’ai remarqué qu’elles t’intriguent énormément. Malgré tout, je ne souhaite pas rester une minute de plus à l’intérieur de ce souterrain. Et je te conseille de me suivre dehors.
-    Oui, je te rejoins dans un instant dans ce cas. Le temps de récupérer nos affaires éparpillées un peu partout, et j’arrive. ».
Il se remet aussitôt à progresser vers la sortie. Je suis sa silhouette chancelante déambuler un instant, jusqu’à ce que cette dernière atteigne le palier de l’escalier, et qu’elle commence à la gravir. Et elle finit par disparaitre de ma vue.
Je me mets à parcourir les quelques mètres qui me séparent du site où nous avons bivouaqué. Durant ce léger laps de temps, je sens ma jambe ankylosée et raidie être vrillée par une douleur sourde. Je m’empare du paquetage de Fÿn-loth trainant dans la poussière. J’en profite pour scruter l’obscurité au-delà de l’ouverture. Mais les ombres mouvantes qui s’y perçoivent ne sont rien d’autre que les reflets de mon anneau. Je ne m’attarde malgré tout pas. Je frissonne même en repensant au combat que j’ai dû y mener. Puis, j’attrape ma besace. Je l’installe sur mon épaule, l’y accrochant fermement afin qu’elle ne glisse pas le long de mon corps dès que j’effectuerai le moindre mouvement. J’essaye d’oublier que ni moi, ni Fÿn-loth nous sommes nourris. J’aurai pourtant apprécié un petit déjeuner consistant avant de partir, parce que je sais que la route va encore être longue avant que nous n’atteignions les Monts du Levant. J’aurai en effet souhaité que nous puissions progresser sur la plaine en pleine possession de nos moyens. Je me rassure en me disant que nous aurons certainement l’occasion de nous arrêter à un moment ou à un autre, et que nous nous restaurerons à cette occasion. Car je ne me vois pas continuer à marcher toute la journée le ventre vide. Et, finalement, d’un pas décidé, je longe à mon tour le corridor, je gravis l’escalier qui le termine, et j’entame mon retour vers la surface.           

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