Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Mes Univers
1 avril 2016

autobiographie, pages 76 à 78 / 314

X3Or, les promenades de ma mère étaient calquées sur un principe équivalent. Aussitôt le déjeuner et les informations télévisées de la mi-journée terminés, il était hors de question de rester à « flemmarder » au sein de notre habitation. En Été, mes grands-parents entretenaient ensemble le mûrier rivé à la paroi extérieure limitrophe des buissons et des arbres centenaires. En Hiver, ils rangeaient le bois pour la cheminée à la grange. En Été, mon grand-père tondait la prairie qui l'encerclait. Ma grand-mère taillait ses massifs de fleurs. Elle les arrosait ; elle les cisaillait. Elle détendait le linge sous un Soleil accablant, avant de le repasser et de le plier. Même si ce n'était pas nécessaire, elle lançait une machine par jour. Elle passait l'aspirateur de le long couloir coupant le bâtiment en deux. En Hiver, elle déblayait le cagibi ou l'ancienne écurie à coté du garage...

 

Les images défilent tandis que mes doigts jonglent avec le clavier de mon ordinateur. Je la revois nettoyer ses meubles en merisier de la salle à manger coté rue. Je la revois, vêtue de la robe-tablier légère qu'elle porte immanquablement lorsqu'elle est affairée à ses tâches quotidiennes. Aussi loin que mon esprit en a souvenance, elle a toujours endossé ce vêtement. Dès qu'elle revenait des courses ou de toute autre escapade en ville, elle quittait ses habits du Dimanche. Elle enfilait ceux-ci afin de s'y sentir à l'aise. Puis, elle partait à l'assaut de ses corvées ménagères.

 

Quelle que soit l'heure de la journée, il était donc indispensable que chacun se hâte à son ouvrage. L'important, c'est que nous soyons tous actifs physiquement.

 

Or, je suis un homme qui a davantage d'attirance pour les activités cérébrales que pour les activités physiques. C'est le cas maintenant. Çà l'a été jadis. Rien n'y a fait. Malgré l'obstination de mon entourage pour me convaincre que l'activité physique ou le sport étaient essentiels pour la bonne santé de notre organisme, je suis resté imperméable à leurs arguments. Je ne dis pas qu'ils ont tort. Ce serait une hérésie d'affirmer le contraire. Mais, pour des raisons sur lesquelles je reviendrai sans doute ultérieurement, elles ne m'ont jamais atteintes. J'ai, dès mon enfance, eu une inclination prononcée envers les Arts Créatifs tels que le dessin ou à la littérature. Je l'ai longuement mentionné dans les deux premiers chapitres de ces Mémoires, les livres ont, dès l'origine, eu une place essentielle dans ma vie. Et rien ni quiconque n'a réussi à me faire dévier de cette trajectoire. A croire que je suis né avec ça dans le sang.

 

De fait, bien que j'ai apprécié les excursions champêtres ou forestières en compagnie de ma mère, j'aurai largement aimé me consacrer à la lecture ou aux applications graphiques. Le soir, une fois couché, je bénéficiais d'à peu près une heure pour me plonger dans un roman de mon age. C'était – c'est toujours – les minutes les plus agréables et les plus sereines après le tumulte journalier ambiant. Chaque seconde penché sur les feuillets, à tourner délicatement les pages de l'ouvrage que je dévorais, était empreinte d'un plaisir infini difficilement descriptible. C'est dans le Doubs, installé douillettement dans mon lit, que j'ai ressenti certains de mes bouillonnements livresques les plus forts. Je me surprends notamment avoir dévoré « Misery », de Stephen King. Quand la tortionnaire casse les jambes de son écrivain favori qu'elle a recueilli dans son chalet au cours d'une tempête de neige, parce que, dans son dernier manuscrit, celui-ci fait mourir son héroïne favorite, je me suis cru à ses cotés. J'ai beau eu être sous mes chaudes couvertures, malgré le silence ambiant et la douce lumière de ma lampe de chevet, j'ai eu l'impression de me trouver dans la même pièce qu'eux.

 

C'est bizarre, des fois, comment de telles sensations peuvent vous envahir, vous submerger. Aucun autre réceptacle de la pensée humaine n'est susceptible, à mon humble avis, de vous procurer de tels saisissements.

 

Les « Rois Maudits », les premiers recueils de Patrick Cauvin, « Tant que la Terre durera », la saga d'Henri Troyat débutant au cours de la Révolution Russe de 1917 pour se terminer dans les années soixante, m'y ont offert les mêmes émotions. Combien de livres ai-je lu au cours de mes vacances d’Été là-bas ? Dieu seul le sait. Parfois, avant de quitter le pavillon de mes parents, je préparais une cargaison de livres. Au minimum une dizaine encombraient ma valise. Ils y prenaient presque plus d'espace que mes autres nécessaires de voyage. Ma mère était ahurie lorsqu'elle la contrôlait avant de le fermer définitivement. Dépitée, elle était assurée qu'il n'y aurait rien à faire. Mes livres étaient plus précieux à mes yeux que mon portefeuille, ma carte d’identité, mes pantalons ou mes pulls.

Publicité
Publicité
Commentaires
Mes Univers
Publicité
Visiteurs
Depuis la création 287 654
Derniers commentaires
Archives
Mes Univers
Newsletter
Pages
Publicité