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Mes Univers
23 mai 2020

Brève hebdomadaire du 24 Mai 2020 :

X1

Aujourd'hui, je suis fatigué. C'est quand même étrange comme le destin, souvent, vous fait payer très cher - les faits le prouvent systématiquement - les petits moments de joie et de bonheur que vous pouvez grappiller ici ou là. En tout cas, c'est de cette façon que j'interprète les événements que j'ai vécus cette semaine.
 
Bien entendu, j'ai écrit. Vous avez pu suivre les textes que j'ai publié ici durant la semaine qui vient de s'écouler : ces quelques phrases imagées évoquant l'imaginaire entourant mon travail d'écrivain-historien. Ma longue missive détaillant ma passion pour les figurines historiques. Cette passion qui est le prolongement naturel de cette vocation ; de ce sacerdoce auquel je me voue quotidiennement, et qui est à la fois chronophage et énergivore, mais qui est tellement exaltant, tellement enivrant.
 
Puis, il y a ces deux textes assez brefs - à mes yeux en tout cas - soulignant un aspect de ma personnalité que je mets très rarement en avant : la sensualité ; et la sensualité féminine plus particulièrement. Car, généralement, je le cadenasse, je le freine, je le musèle, je le cache, aux fins fonds de mon cœur et de mon âme. Pourquoi, alors que selon certain(e)s, je l’exprime si bien ? Je n'en n'ai pas honte, je ne le considère pas comme un aspect de ma personnalité qui est sale, méprisable, indigne, etc. Non, c'est parce que mon corps, doté de son handicap, des cicatrices sur mon visage, alourdi par son embonpoint, n'est pas forgé pour avoir le droit de partager et d'apprécier ce genre de beauté. Il n'est pas conçu pour exalter la sensualité féminine, pour l'honorer, pour la déifier. Comment pourrais-t-il en explorer ce qu'elle sublime - autrement que par les mots -, alors que la plupart des femmes auxquelles j'ai désiré un jour dévoiler cet aspect de ma personnalité, m'ont rejeté, humilié, blessé, détruit, parfois...
 
Alors, j'ai enfoui tout cela aux fins fonds de mon âme et de mon cœur. Alors, je me suis battu contre moi-même pour ne pas laisser cet aspect de ma personnalité se matérialiser. Moi qui, esthétiquement et charnellement, suis coupable de ce que la nature a fait de moi, je n'ai pas le droit de me régaler de ses plaisirs. Moi qui suis impur et contrefait, méprisable et abject corporellement, comment, de quel droit, pourrais-je chanter ou louanger ses magnificences ? Puisqu'ils me sont interdits d'accès, et qu'à chaque fois que je tente humblement de les glorifier, je suis rapidement rappelé à l'ordre. Le destin me charge de me rappeler ce qui m'est interdit ; et que de la lumière, je dois retourner à l'obscurité et au silence, à la solitude et au désespoir. Que je ne suis et ne serai jamais en capacité d'en éprouver tous ses bienfaits.
 
Alors, dans ce cas, pourquoi ai-je osé pour une fois ? Parce qu'exceptionnellement, j'ai croisé ici la route de deux personnes qui m'ont montré qu'elles m'accueillaient comme un "être humain normalement constitué" dans leur univers. Elles m'en ont ouvert les portes en dépassant les frontières du virtuel pour échanger avec moi dans le monde réel. Nous nous sommes téléphoné, nous avons discuté de longues heures ensemble par ce moyen. Nous nous sommes découvert des points communs, des centres d’intérêts, des visions de la vie ou_ du monde, qui nous rapprochaient. Sans arrière-pensée d'aucune sorte, sans jugement ou condamnation, nous avons appris à nous apprécier. Nous avons - et c'est toujours le cas - créé des liens amicaux qui se renforcent avec le temps. Et comme je le leur ai dit, pour mi, il s'agit là d'une véritable bouffée d'oxygène.
 
C'est comme si on me donnait tout à coup l'autorisation d'exister, de me montrer tel que je suis en vérité. C'est comme si on me permettait de vivre la vie - parce que je suis amicalement à leurs cotés - à laquelle j'ai toujours aspiré. Simple, naturelle, empreinte de lumière et d'empathie, de générosité et d'attention, de respect et d'instants de convivialité, une vie qui ne refusait pas ce que j'ai à lui apporter. Alors que dans l'immense majorité des cas, dès que je tends la main en direction d'une personne vers laquelle j'ai envie d'aller, celle-ci me fuit systématiquement.
 
De fait, lorsque ce miracle survient, c'est comme si je renaissais. C'est comme si la meilleure part de moi-même pouvait enfin se révéler. C'est comme si j'avais l'autorisation de me sentir plus léger, plus détendu, plus épanoui, plus heureux. C'est tellement exceptionnel que je ressens ces possibilités d'être moi-même comme une délivrance. Comme si, soudainement, on me libérait de mes chaines, comme si on m’ôtait mon bâillon. Comme si, après m'être battu au-delà des forces dont mon âme et mon cœur sont dotés, ils pouvaient s'afficher. comme si après que ceux-ci aient été si longtemps torturés, déchirés, persécutés, ils pouvaient se manifester tels qu'ils sont en vérité. Libérés de leurs entraves, ils pouvaient respirer normalement.
 
Voila, ce que m'offrent ces deux personnes. Et ça me rends profondément, viscéralement, heureux. Plus que je ne saurai l'exprimer au travers de ces mots et de ces phrases. Dialoguer avec elles autrement que par le biais des réseaux sociaux est ce que j'ai toujours cherché, ce que j'ai toujours voulu. Croiser des personnes aux univers à la fois totalement différents et parfois proches des miens, a toujours été mon but. Approfondir mes relations amicales avec elles a toujours été mon rêve, mon espoir. Peu importe qu'elles soient éloignées de moi par des centaines de kilomètres. Peu importe que leurs parcours personnels, professionnels, familiaux, soient différents. C'est justement parce que nous sommes à la fois tellement semblables et tellement différents que la richesse et la diversité de nos échanges et si passionnante. Que nous ne nous lassons pas de découvrir des aspects insoupçonnés de qui nous sommes. Et que nous nous rendons compte que ça en vaut la peine. Que ça nous enrichit et nous fait évoluer humainement...
 
C'est donc pour toutes ces raisons que cette semaine, pour une fois, j'ai osé dévoiler un aspect de ma personnalité que je ne mets jamais en avant. C'est pour cette raison que j'ai rédigé ces petits textes sur la sensualité. Parce que j'étais confiant, j'ai ressenti cette joie de ne pas avoir honte de ce corps contrefait, maudit. Grace à ces personnes et nos dialogues téléphoniques, j'ai oublié qu'il était blessé au plus profond de sa chair. J'ai oublié les souffrances physiques et morales qu'il suscitait. J'ai oublié les symptômes de ce handicap qui me meurtrit. J'ai oublié le regard que la grande majorité des gens avaient à mon égard. Ce regard qui fait que j'ai honte de celui-ci, que je me sens laid, malpropre, indigne de cette passion pour la sensualité féminine que je tente d'exalter à ma façon.
 
De plus, malheureusement, comme je le spécifiais au début de ce texte, il y a toujours une contrepartie. La vie ne me fait pas de cadeau sans qu'il y ait un prix exorbitant à payer en retour. Comme toujours.
 
J'en ai déjà parlé : le vendredi précédant le début du confinement, j'ai fait un faux mouvement à proximité de la baie vitrée qui s'ouvre sur le balcon de l'appartement dans lequel j'habite depuis seize ans maintenant. Ma jambe handicapée a dérapé malgré moi, comme ça lui arrive lorsque je suis particulièrement fatigué physiquement. De fait, si le reste de mon corps a bougé, ma jambe non. Et ce dernier a violemment percuté la baie vitrée. Son double vitrage s'est fissuré. Son encadrement en bois s'est délogé de son emplacement. En urgence, j'ai contacté un vitrier afin qu'il la répare le plus vite possible. Heureusement, il est venu constater les dégâts une ou deux heures plus tard. Il a colmaté les brèches qui résultaient de ce malencontreux accident. Il les a camouflé avec du scotch de professionnel dans le but que l'air ne passe pas. Puis, il m'a expliqué que les véritables réparations, celles qui remplaceraient le double vitrage et l'encadrement disloqué, ne pourraient être effectués qu'après la fin du confinement.
 
Heureusement, cet ouvrier a bien fait son travail. Sa réparation provisoire a été parfaitement hermétique durant les deux mois qu'ont duré le confinement. Aucun souci, et l'un de mes premiers gestes lundi dernier a été de contacter un vitrier qui pourrait s'employer à changer le double vitrage, et à réparer son encadrement.
 
Celui-ci est venu mardi dernier. Il a pris les mesures. Il a examiné les dégâts. Il a marqué les travaux à effectuer pour qu'un devis me soit communiqué dans les plus brefs délais. Puis, il a rescotché "hermétiquement" l'ensemble comme son confrère l'avait fait deux mois avant. Sauf qu'il a utilisé les mêmes bout de scotch que celui-ci. Sauf que depuis vendredi, le nord Cotentin, et la ville de Valognes où je vis, sont parcourus par des rafales de vent importantes. D'un autre coté, comme en ce moment il fait chaud, j'ai ouvert les fenêtres de mon appartement, ce qui a provoqué des courants d'air bienvenus pour atténuer la lourdeur des températures. Pour autant, ces courants d'air ainsi que ces morceaux de scotch non remplacés, ont fragilisé la structure de ma baie vitrée. En vendredi, en début d'après-midi, à la suite d'un coup de vent plus fort que les autres, elle est brutalement sorti de son emplacement.
 
Comment expliquer ce qui a suivi ? Malgré mon handicap, je me suis battu pendant près d'une demi-heure pour la lui faire réintégrer. Avec du gros scotch, j'ai essayé de remplacer l'usagé. A chaque fois que je voulais en découper un morceau, puis le mettre là où c'était nécessaire, je n'y parvenais pas. Mes doigts malhabiles, ma main inapte pour tout ce qui concerne les travaux manuels, étaient incapables de faire les mouvements adéquats. A chaque fois, le scotch se tortillait sur lui-même. Je ne pouvais pas faire les mouvements qu'il fallait pour que ce scotch puisse se coller là où il le fallait. Forcément, mon stress et mon angoisse sont monté. Je me sentais impuissant, inapte, gauche, un incapable. Une fois de plus, je me battais contre cette fatalité qui fait que, depuis toujours, je suis dans dans l'impossibilité de faire face à ce genre de difficulté ou d'épreuve.
 
Alors, je me hais, je m'en veux, de me déteste. Parce que malgré tous les efforts que j'effectue pour essayer de résoudre ces situations, elles m'échappent que je le veuille ou non, je finis par craquer nerveusement. C'est une souffrance qui me pousse aux portes de la folie et du désespoir. Je me rends compte que je ne peux compter sur personne. Aucun de mes voisins, aucune connaissance, est susceptible de me porter secours. Ma mère habite à plus de 300km de chez moi. Elle ne peut éventuellement que me conseiller au mieux par téléphone. Isolé, seul, abandonné, je n'ai personne vers qui me tourner. Et la rage, la violence contre mon handicap et ses conséquences sur ma vie quotidienne, me submergent systématiquement. Car, bien sûr, je ne peux pas non plus faire appel à Vanessa, victime de sa sclérose en plaques.
 
Heureusement, le kiné de Vanessa, justement, est arrivé au bout d'une demi-heure. Je lui ai demandé de réparer ce qu'il pouvait, avant de faire faire les exercices de kinési qu'il consacre à Vanessa. Son ouvrage n'a duré que le temps de l'après-midi. Les fortes rafales de vent se sont poursuivies vendredi, puis hier. Les morceaux de scotch qu'il a installé, évidemment, se sont décrochés. Et actuellement, ce n'est que parce que le poids du vélo d'appartement bloque l'ensemble de ce pan de la baie vitrée endommagée, que le tout tient. Néanmoins, un filet d'air passe par le bas. Le tout est donc à réparer d'urgence.
 
Lundi, j'appellerai le vitrier pour lui détailler tout ce que je viens de décrire. Ça m'a profondément déstabilisé. Je me sens perdu, anéanti. Comme à chaque fois que des incidents matériels surviennent, ça me détruit moralement. Un peu comme si le destin s'amusait à me scarifier, à me meurtrir, à me martyriser. C'est au-delà de mes capacités mentales et émotionnelles de subir ces épreuves. J'en ai trop vécu, j'en ai supporté, j'en ai trop enduré qui m'ont marqué au fer rouge, et dont je ne me suis jamais remis. Et aujourd'hui, dès que l'une d'elles se remanifeste à moi sous une forme ou sous une autre, elle me plonge dans des abysses infernaux. Elle me détruit. J'en ressors effondré.
 
C'est pour cette raison que je suis particulièrement heureux que l'une de ces deux personnes avec lesquelles je suis désormais en contact téléphonique épisodique, m'ait appelé comme promis dans les minutes qui ont suivi. Ce bonheur de partager autre chose, cette joie de lui offrit une part de moi-même que je n'ai pas l'habitude d'ouvrir aux autres, a été une bouffée d'air frais. Nous avons parlé une heure et demi durant, de tout et de rien. De qui nous sommes, de nos passions, de notre travail, de l'actualité, de nos centres d’intérêts, etc. Quelle fraicheur, quelle joie, de se sentir vivant, de se sentir exister pour les choses qui semblent peut-être anodines à la plupart des gens. Mais qui, pour moi, relèvent de l'exceptionnel. Qui, pour moi, sont un véritable parcours du combattant à atteindre, à exprimer. Qui sont un combat pour lesquels je dois dépenser une énergie considérable afin d'en profiter un minimum.
 
Voila, pourquoi je suis épuisé, aujourd'hui. Voila pourquoi je vais me reposer ce dimanche après-midi. Je vais regarder le huitième des neuf épisodes de la série documentaire évoquant la Guerre de Sécession. Je vais visionner un ou deux des nombreux films que j'ai en réserve. Ce soir, je vais me plonger dans le roman dont j'ai débuté la lecture hier soir. Et dès demain, je vais essayer de résoudre ces problèmes de baie vitrée au plus tôt. Et dès demain, je vais me replonger dans la rédaction de mon ouvrage sur l'aube de la Civilisation. Dans la semaine, je vais envoyer un sms à ces deux personnes afin de prendre de leurs nouvelles. Parce qu'en tant qu'amies, elles comptent pour moi. Et que j'aime partager avec des gens qui en valent la peine.
 
Je vous souhaite un bon après-midi. Profitez bien de ceux et celles que vous aimez et qui vous aiment, qui pensent à vous autant que vous pensez à eux. Préservez vous, protégez vous. Cette épidémie de coronavirus est loin d'être terminée, malgré le déconfinement débuté il y a deux semaines maintenant. Reposez vous, détendez vous. Je vous souhaite à tous et à toutes tout ce qu'il y a de meilleur en ce monde...
 
Amicalement votre.
 
Dominique Capo

 

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