Ces enfers dans lesquels vous me plongez... :

Il y a des enfers que nul ne peut connaitre s'il n'est pas né différent. Il y a des enfers que même l'imagination la plus débridée, la plus exacerbée, ne peut pas concevoir si elle ne les a enduré. Il y a des enfers d'où l'on ne revient jamais ; qui ne vous laisse jamais en paix ; qui vous torturent jusqu'à la fin de l'éternité. Il y a des enfers également, que la chair et le sang ne sont pas capable de restituer. Il y a des enfers dont le cœur et l'âme sont les condamnés à perpétuité.

Les hommes et les femmes de ce monde sont inconscientes des tourments que ces enfers peuvent modeler. En effet, leur existence teintée de médiocrité, institutionnalisée, normalisée, n'a pas les moyens de les matérialiser. Ils n'en sont que les jouets, que les pantins désarticulés. Les démons et les diablesses dont ils sont les incarnations dépravées sont dénués de pitié. La compassion, la tolérance, l'amitié, sont des notions dont ils se moquent, qu'ils foulent aux pieds. Les enfers dont ils sont les seigneurs et maitres exacerbent leur mépris, leur indifférence, leur brutalité, leur manque d'humanité.

Ils préfèrent outrageusement la superficialité et l'éphémérité, la banalité du mal dont ils sont les sujets. Ils vénèrent l'image qu'ils ont d'eux-mêmes, la gloire et les richesses de ce monde, qu'ils ne pourront jamais s'octroyer. Ils admirent les dieux et les déesses qui les humilient et les soumettent ; les monstres infâmes qui font d'eux leurs esclaves, leurs subordonnés. Et ils traquent, ils exilent, ils annihilent volontiers, sans états d'âme, ces moins que rien qui n'ont que leur intelligence, que leur culture, que leur art, pour ne pas leur ressembler. Et ils les maudissent, ils les torturent, ils les écorchent vifs, parce que leur présence, leur existence même, est une insulte à leur trivialité.

Que sont quelques pauvres hères pour qui ces enfers sont pires que la mort, et qui ne veulent pas rejoindre les sombres cohortes dont ils sont les valets. Que sont ces individus qui ne souhaitent pas les intégrer ? Ils ne méritent que la suprême déchéance, que l'humiliation et la vindicte populaire. Ne sont-ils pas la lie de leur espèce, des éléments incontrôlables et incontrôlés ? Les démons et les diablesses qu'ils sont n'ont-ils pas vocation, par leurs paroles et par leurs actions, à leur faire courber l'échine, ne sont-ils pas là pour les briser ?

Oui, car les Enfer et les créatures qui les peuplent ne tolèrent pas que des individus sortent du lot ; que ceux-ci mettent en avant des valeurs autres que les leurs. Ces enfers et leurs hordes n'acceptent pas que d'autres vérités soient proférées. Alors, il faut les isoler, les museler, les bannir ; à tout prix, par n'importe quel moyen qui leur parait sensé. Il n'y a pas d'alternative en vérité.

Ce sont ces enfers où ils se sentent chez eux, ou le néant ; ils y sont conditionnés. Et moi, Dominique, je ne peux que pleurer, je ne peux que hurler de démence et de terreur, parce que dans ma chair et dans mon âme, par eux, j'ai été jugé et condamné à ce qu'il y a de pire : être maudit de par mon intelligence, ma culture, et mon érudition, qui sont vus par ces hommes et ces femmes comme des souillures et des indignités qu'il faut éradiquer...