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Mes Univers
29 juillet 2022

A quel point les apparences peuvent être trompeuses :

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Si j'aime les livres, si je suis passionné d'écriture, si jamais je ne me débarrasserais des livres qui m'ont fait éprouver d'intenses et fascinantes émotions, c'est aussi le cas pour ce qui est des bandes dessinées et des films qui constellent les étagères de la maison que j'occupe désormais. Qui-plus-est, j'ai hâte d'en acquérir de nouvelles afin de transformer le garage adjacent à notre habitation en pièce presque exclusivement consacrée à l'exposition de mes 4500 figurines - davantage même - historiques et de collection ; pour le moment toujours entassées dans leurs cartons.

Mes proches m'ont souvent reproché de détenir autant de livres. Combien de fois en ai-je entendu me seriner que "je n'en n'avais pas besoin d'autant", qu'ils "prenaient inutilement de la place susceptible d'être utilisée pour des choses plus utiles", que c'était "de l'argent dépensé vainement", ou que "je ferais mieux d'en mettre davantage de coté" ; ce à quoi je m'emploie mois après mois d'ailleurs.

Mais il n'y a rien à faire. Comme si les livres, la lecture, et même l'écriture, étaient un sujet tabou pour mes proches. Comme si j'étais pourvu d'une tare parce que j'aime lire et écrire, qu'il s'agissait d'activités qu'il fallait cacher parce qu'honteuses et triviales. Lors de nos rassemblements ou de nos rencontres plus ou moins éphémères, parler de chevaux, de chiens, de poulets, de repas, pantagruéliques passés, présents ou à venir ; "disserter" à propos de préoccupations bien "terre à terre" comme le de jardinage, le bricolage, les rendements agricoles , que sais-je encore, là on se congratule, on se félicite. Là, on est fiers et on en discute en long, en large, et en travers, jusqu'à l'overdose, si-ce n'est plus.

Moi, attablé dans mon coin, j'espère qu'à un moment donné on va s'apercevoir que je suis là, que j'aurai des choses à dire sur des sujets qui me concernent plus directement. Au début, j'essaye de m'intéresser peu ou prou sur ce qui se dit. Je pose des questions, rêvant qu'on m'en pose ensuite sur ce qui est le centre de ma vie ; sur l'avancée de mes projets, sur ce sur quoi je travaille. Nada. Rien du tout. Alors, je m'ennuie, alors, je baille. Alors, je me lève pour aller voir ailleurs. Alors, je me réfugie dans une autre pièce pour visionner un film, pour lire un moment, ou pour me plonger dans la rédaction de mes textes.

Évidemment, lorsque je me lève, les reproches pleuvent. On me culpabilise de ne pas rester à écouter leur fatras. On me stigmatise parce que je ne me soumets pas à leur diktat. Parce que ne reste pas à la place que l'on m'a assignée. On me blâme parce que mon visage est marqué par la tristesse et le désespoir de ne pas pouvoir participer en me montrant tel que je suis, et non pas tel qu'on voudrait que je sois. On me condamne et me juge de ne pas "être ouvert et tolérant" envers les autres ; toujours ces "autres" qui passent avant moi, qui évoquent des choses plus intéressantes" que celles que j'aimerai partager. Histoire, littérature, art, cinéma, astronomie, informatique, sujets de société, et tout le reste, sont en effet passés par perte et profit. Si ce n'est leur petite existence et tout ce qui tourne autour de leur "petite vie", de leur "petit quotidien", rien d'autre n'existe.

On me reproche également de ne me "pas me mettre au niveau" des personnes qui sont là. Comme si on estimait que leur intelligence est si médiocre qu'ils ne sont pas capables de comprendre ou d'apprécier les thèmes, les centres d’intérêts, les passions, qui m'absorbent avec un plaisir et une joie sans commune mesure durant mes journées ; et jusque tard dans la soirée. A les écouter, ces proches et leurs convives auraient un QI d'huitre. Ils seraient inaptes à suivre une conversation élaborée, construite, argumentée, autorisant la controverse et l'usage de la dialectique. Leurs connaissances, leur éducation, leurs bagages didactiques, leur interdiraient de s'ouvrir à ce que j'ai à leur offrir.

Quelle pauvre et limitée vision des échanges entre les uns et les autres, où la soumission de celui qui est différent de la norme doit être mis de coté parce que ses activités et ses centres d’intérêts ne sont pas les mêmes que les leurs. Quelle monstruosité de le faire souffrir, de le brider, de l'écraser, parce qu'il faut absolument qu'il se conforme à ce que sont leurs priorités et leurs préoccupations. Quelle vision du monde et de la place que chacun doit y avoir, que de choisir d'autorité quelles fonctions et quelle dignité ils doivent détenir ; qui doit être respecté dans ce qu'il est fondamentalement ; qui doit être honoré du fait de son métier, de sa position, de son office ; ou pas.

C'est pitoyable. C'est une régression méprisable des relations entre les gens. C'est de la ségrégation ; surtout lorsque comme moi ou ma compagne Vanessa, en plus de cela, c'est une personne handicapée et malade qui en est victime. Surtout lorsque cette personne a le courage de se rebeller contre ce totalitarisme moral et identitaire. Surtout lorsque celle-ci ose tenter de se libérer de ce carcan qui l'enchaine à des principes surannés. Surtout lorsqu'on lui a jadis intimé l'ordre d'aller voir un psychologue afin d'avancer, et que celui-ci, au bout de moult entretiens, lui a permis de comprendre qu'elle également avait le droit à la parole, d'être écoutée et entendu, et que ses mots avaient autant de valeur que ceux prononcés par ses proches.

Mais non ! Depuis, rien n'a changé. Ces proches n'ont pas évolué d'un pouce. Cette personne que je suis a tout essayé pour se forger une place au milieu d'eux. Elle s'est rebellé, à crié, a tapé du poing sur la table, a bousculé leurs à-priori à leurs préjugés. J'ai essayé de leur dévoiler le bonheur qui était le mien lorsque je lisais ou lorsque j'écrivais. Sans succès. Leur attitude est toujours la même : Contraindre cette personne à rentrer dans le rang dans le but qu'elle ne fasse pas de vagues, pour que le "respect qu'elle doit à ses ainés ou aux autres plus généralement" passe devant celui qui lui est dû. La réprimer, la forcer, la traumatiser ou la blesser même, du moment qu'elle se taise et qu'elle demeure dans son coin, et aussi qu'elle accepte ces conversations absurdes et puériles qu'on lui impose.

Pour autant, je n'ai jamais plié, je ne plie jamais, et je ne plierai jamais face à cette fatalité. Je suis vu comme le "vilain petit canard", celui auquel on pense, auquel on s’intéresse, en dernier. On me regarde de haut "parce que je ne suis pas comme eux", que ce que je raconte n'a aucune importance. Parce que je lis et écris à longueur de journée, rendez-vous compte ! Quel affront, quelle injure. Je ferai mieux d'aller désherber le potager. Je ferai mieux de me lever à l'aube pour m'occuper des bêtes ou des pâtures. Même si je suis handicapé, je ferai mieux de savoir planter un clou ou de bricoler.

Malgré tout, jamais je ne courberai l'échine ; dussé-je me mettre tous mes proches à dos, j'ai le droit à la dignité et au respect. J'ai le droit de parler de ce qui me passionne et me fascine. J'ai le droit de lire et d'écrire parce que c'est un pilier fondamental de ma personnalité. J'ai le droit de ne pas me conformer aux normes si je les juge inadaptées à l'existence que je mène ou que je désire mener. Nul n'a à m’ôter ce droit, que ce soient des gens issus de l'extérieur ou issu de mon entourage proche.

Je ne suis pas quelqu'un de résigné. Je ne le serai jamais. Donc, je ne me résignerai jamais à cette situation qui me fait mal, qui me torture régulièrement même. J'aime mes proches plus que je ne saurai l'exprimer. Je me sacrifierai volontiers pour leur bonheur ou pour leur bien être. Ma compagne Vanessa peut en témoigner ; tout ce que j'ai abandonné pour elle. Tout ce dont je me suis détourné, sans remords ni regrets parce que je tiens à elle. C'est pareil pour l'ensemble de mes proches, même s'ils ne s'en rendent que rarement compte.

Je suis peut-être maladroit, je ne fait probablement pas tout comme il le faut. Je fais des erreurs, j'ai des fautes à mon actif. Cependant, qui peut se vanter d'être parfait ? Qui peut clamer qu'il a toujours tout accompli, et avec tout le monde, correctement ? Il faut être d'une arrogance, d'une vanité, et d'un orgueil inhumains pour en être persuadé. Tout le monde a des défauts. Et ils sont tout aussi influents sur qui nous sommes que nos qualités. Il n'y a pas de honte, se sentir coupable, ou les dissimuler à quiconque pour être une personne équilibrée et un tant soi peu heureuse.

Ce sont ceux et celles qui n'admettent pas qu'on est des êtres possédant des lacunes qui ne le supportent pas. Peut-être, tout simplement, parce que l'admettre serait reconnaitre qu'eux-mêmes veulent croire qu'ils en sont dénués ; ou qu'ils sont capables de les corriger. Ce qui n'est pas forcément vrai, évidemment. C'est pour cette raison que les personnes différentes, comme moi, ces gens, ils les stigmatisent ou les heurtent. Ils les meurtrissent ou les refoulent dans le silence et l'obscurité.

Un endroit où je refuserai toujours d'être cantonné parce que ces gens là sont les plus nombreux ; parce que c'est leurs normes qui ont naturellement droit de cité. Un endroit qu'ils ont bâti pour se rassurer, pour ne pas être obligés de regarder en face les défauts ou les faiblesses dont ils sont gratifiés. Et qui s'imaginent que des personnes comme moi leur renvoient en pleine figure. Tout sauf ça. Tout, plutôt que considérer les richesses et les ressources, le foisonnement et la profusion que leur humanité est susceptible de leur offrir en réalité.

Alors, oui, en partant de ces observations, je continue et continuerai à le crier sur tous les toits du monde, je continuerai à le clamer à mes proches, aux "autres", ou à quiconque : oui, j'aime lire et écrire. Oui, j'aime acheter des livres ou des bandes dessinées par exemple. Et ce, même si n'est pas leur "truc" et qu'ils me rabrouent pour cela. Oui, mes étagères croulent sous les livres. Oui, même s'il m'en reste encore des tas à dévorer, je n'hésiterai pas à commander de nouveaux si j'en découvre qui attirent mon attention au détour d'une librairie ou d'un rayon virtuel de la FNAC ou d'Amazon. Tout simplement parce que j'en éprouve un plaisir et une joie que leur petite vie terre à terre ne pourra jamais leur procurer...

Dominique Capo

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