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Mes Univers
12 août 2022

Les raisons de ma colère :

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Je profite des quelques minutes de tranquillité et de calme que j'ai devant moi afin d'apporter quelques précisions supplémentaires. Tout d'abord, vous devez savoir que si je partage beaucoup de textes sur Facebook, ils ne sont pas la majorité de ceux sur lesquels je travaille. En effet, l'essentiel de mon temps et de mon énergie, je les consacre à la rédaction de mes Mémoires, dont le titre plus ou moins définitif est "Maltraitances".

Depuis que je suis arrivé en Sarthe et que les choses se sont un peu calmées autour de moi - c'est juste une question de point de vue en fonction des circonstances auxquelles je suis confronté, mais celui-ci a son importance -, j'ai entamé la retranscription de la quatrième version de ces dernières. Est-ce mon environnement, est-ce autre chose ? je ne le sais pas ! Malgré les épreuves, malgré les soucis, malgré les peurs, malgré les solitudes, malgré le désespoir, malgré les souffrances, malgré le mal-être qui me mine quotidiennement, je ne sais pas, mais mon esprit se révèle plus véloce. Les mots me viennent plus facilement ; ma concentration et mon attention sont plus développées. Malgré la chaleur étouffante - et qui, habituellement, m'épuisent très rapidement -, celle-ci ne m’empêche pas d'aligner les phrases, les paragraphes, ou les pages. Tout est plus simple et plus facile à écrire ; et ce, quel que soit le sujet que j'aborde. Alors, les mots nécessaires à décrire ce qu'a été ma vie et ses vicissitudes jusqu'à aujourd'hui, ils coulent tout seul de mon âme et de mon cœur.

Car, énumérer les différentes phases de mon existence qui ont laissé une empreinte profonde sur les géhennes qui en ont résulté est certes éprouvant émotionnellement, mais elles remontent aisément à la surface. Malgré les années ou les décennies écoulées, elles s'impriment avec violence et appréhension par le biais de toutes les facettes de ma personnalité. Les relater, les détailler, essayer de les extraire de mon esprit au travers de ces Mémoires est une délivrance pareille à nulle autre.

A quel prix pourtant ? Le plus élevé, le plus pénible, celui qui est le plus source de souffrances et de malheurs, de tristesse et de désespoir. Celui qui exige des sacrifices monstrueux, des sacrifices chaque jour toujours plus dévastateurs ou traumatisants. A quel prix ? Au prix que ma compagne atteinte de sclérose en plaques, que moi, atteint de la maladie de Sturge-Weber et pourvu d'une hémiplégie du coté droit de mon corps, nous sommes seuls face à ce qui nous supplicie et nous torture.

Quand je dois essayer de la relever parce qu'elle a chuté, que j'y mets toute mon énergie et toute ma volonté, et que je n'y parviens pas parce que la portion handicapée de mon corps me rends malhabile, incapable de l'aider. Quand, malgré l'heure d'aide à la toilette dont elle bénéficie chaque jour et la kiné qui vient la visiter deux fois par semaine, je dois la "torcher", la changer de protections souillées. Quand l'air ou les draps sentent régulièrement l'urine parce qu'elle est dans l'impossibilité d'aller aux WC seules puisque ceux-ci et la salle de bains ne sont pas adaptés à sa maladie. Quand je dois la porter pour la mettre au lit ou pour l'en faire sortir pour la mettre sur son fauteuil roulant ! Quand je dois la faire manger, quand je dois m'occuper de tout le coté administratif ou médical. Quand je dois surveiller le moindre de ses gestes parce qu'au sinon, et malgré mes recommandations, et malgré que je lui montre comment se tenir correctement, elle oublie ou s'en moque. Quel sentiment d'impuissance est le mien !

Mon invalidité m'explose à la figure et lacère mon âme ; mon sentiment d'impuissance me propulse en enfer ou aux portes de la folie. Le plaisir que mes incapacités ont à trouver constamment de nouvelles façons de me maltraiter - et ma compagne avec moi, est permanent. Et il n'y personne vers qui je peux me tourner. "Les gens ont leur vie, ont leurs familles, ont leurs préoccupations, ont leurs priorités", m'assène-t-on régulièrement. "Tu es l'aidant, c'est toi qui doit tout endurer, c'est toi qui dois faire tous les efforts...", me rajoute-t-on. "Et puis, de toute manière, tu dois te priver, tu dois abandonner tout ce qui est important ou vital pour toi, tout ce qui peut te procurer un peu de joie ou de plaisir...", me martèle-t-on à l'envi.

Comme si tout ce que la vie est, et ce, depuis très longtemps, ne peut être que douleurs, que peurs, que souffrances, que désespoirs, dont je serai le porteur malgré moi. Moi qui n'ai toujours aspiré qu'à une existence calme, apaisée, sereine, détendue, afin de pouvoir me consacrer à ce que j'ai à écrire, tout est fait pour m'en détourner. Mon combat quotidien, c'est de trouver l'énergie et le temps pour accomplir mon travail d'auteur. Dès que je m'y emploie, au bout d'un moment, il y a toujours une difficulté inédite, un obstacle sorti de nulle part, qui me contraint à le négliger. Je m'épuise constamment physiquement et nerveusement à batailler contre cette fatalité.

Alors oui, j'en veux à ceux et celles qui ne m'aident pas. J'en veux à ces gens qui considèrent que je dois porter tout ça seul sur mes épaules, que c'est mon rôle, et que je ne peux, et que je ne dois pas, y échapper. J'en veux à ceux et celles qui estiment que je n'ai droit ni au repos ni au répit, ni au calme ni à la tranquillité. J'en veux à ceux et celles qui me répètent que je dois me contenter de ce que j'ai, que je dois accepter de subir, que je devrais être heureux de ce que j'ai. J'en veux à ceux qui prétendent que je dois en sacrifier encore plus, que je dois renoncera tout ce que j'ai, à tout ce qui fais de moi la personne que je suis réellement.

Alors, oui, j'en veux à tous ces gens qui estiment savoir mieux que moi ce que sont les tourments de l'âme, du cœur, et du corps. J'en veux à ceux qui sont là, autour de moi, et qui ne bougent pas d'un poil en prétextant que nous devons nous contenter d'attendre le bon vouloir et un trou dans leur emploi du temps, avant qu'ils ne pensent à nous. Pour qu'ils viennent enfin à notre aide. J'en veux à tous ces gens, ici, qui nous plaignent - sincèrement pour la plupart j'en suis certain -, mais qui ne lèveront pas le petit doigt pour se regrouper autour d'une cause juste, qui serait de nous apporter leur concours. Je leur en veux d'autant plus lorsque l'on voit à la télévision les exemples d'entraide et de solidarité, de coopération et de secours vis-à-vis de certains et de certaines, vis-à-vis de mobiles pour lesquels ils se sentent concernés.

Et ça, ne leur en déplaise, à ceux qui sont autour de moi comme à ceux que je croise ici, je ne leur pardonne pas. Et ce n'est parce que d'autres souffrent ailleurs en France ou dans le monde, que notre souffrance, à moi et à ma compagne, a moins de valeur ou d'importance pour autant. Qu'ils doivent détourner le regard et nous marteler que "personne n'y peut rien", parce que ce n'est pas vrai. Je me bats, mais je suis seul. Qui-plus-est, je suis au bout du rouleau, à terre, épuisé comme jamais je ne l'ai été depuis mon burn-out en 2002. Et nul ne réagit. Alors, oui, je leur en veux.

Pourtant, ce n'est pas dans ma nature. Ce sont les circonstances, ce sont ces personnes qui se taisent, me regardent me flétrir, qui regardent ma compagne s'affaiblir sans ne rien faire, qui sont à l'origine de ma colère. Jour après jour, épreuve après épreuve, obstacle après obstacle, ils ont laissé les éléments de notre malheur et de notre désespoir se mettre lentement et irrémédiablement en place. Ces circonstances sur lesquelles ils auraient pu agir, pour lesquelles ils auraient pu me soutenir et m'aider, et qui n'en n'ont rien fait. Car il y a un moment où, à force que les blessures et les peurs s'accumulent, je ne pourrais définitivement plus me relever. Mais qui s'en soucie ?

Comme si ma compagne et moi avions choisi d'être handicapés et malades, et que nous devrions en assumer les conséquences ? Des conséquences que nous ne sommes pas aptes à endurer ou à dépasser. Pourtant, on l'exige quand même de nous. Débrouillez vous tout seul ; ce n'est pas notre problème, notre humanité s’arrête là où vous bousculez ce qu'est notre existence. Nos priorités, nos difficultés, ont plus de valeur ou d'importance que votre vie. Je leur répond alors : "Prenez notre place, juste quelques heures, juste quelques jours, et vous verrez si vous n'aurez pas besoin de toute l'aide que l'on peut, que l'on se doit, de vous apporter ; que ce soit individuellement ou collectivement."

On dirait que tout ce qui nous arrive, en suivant le raisonnement de ces personnes, c'était de notre faute. Comme si c'était de notre responsabilité ; comme si nous en étions coupables. Et qu'alors, nous en devrions en payer le prix fort parce que nous n'entrons pas dans leurs normes. Tout est là, finalement. Parce que nous sommes différents, et ce malgré nous, ce sont avec des larmes de sang et des cris de désespoir que nous devons vivre. On ne nous laisse même pas l'opportunité qu'il en soit autrement.

Alors, oui, dans ces conditions, mon seul bonheur, ce sont les livres. C'est d'écrire. Quand j'écris sur Facebook, c'est pour partager, c'est pour tendre ma main dans la direction de mes éventuels lecteurs. Naïf ou crédule que je suis, je me dis que, peut-être, ces personnes vont diffuser les messages que je cherche à faire passer auprès de leurs proches. Je me dis que les textes historiques ou philosophiques que je leur offre, ils vont assez les apprécier pour les répercuter auprès de leurs contacts, qui, eux-mêmes; vont les répercuter auprès des leurs, et ainsi de suite. Quand j'écris un traité sur l'actualité et questionnant une des innombrables facettes de devenir de notre civilisation ou de l'humanité, j'espère qu'ils vont avoir une étincelle de "jugeote" ; qu'ils vont se reporter à mes textes plus anciens explorant une autre facette de ces thèmes que j'ai approfondi précédemment. Je souhaite qu'ils soient assez intelligents pour ne pas juger et condamner mes idées et mes savoirs.

Mais non, ces gens se plaisent à critiquer, à ne pas lire, ou alors de biais, ou alors, de prendre une phrase qui leur parle, qu'ils sortent de son contexte pour qu'elle alimente leur propre vision des choses. Malgré tout, je continue. Parce que c'est difficile ; comme tout ce que j'ai vécu dans mon existence. On m'a fait rentrer dans le crâne à coups de marteau, en me répétant sans cesse, que tout était difficile, que tout était compliqué, et que je serai toujours seul à devoir colmater les brèches de ma vie lorsque celle-ci s'effrite.

On m'a toujours bousculé. Les traumatismes qui sont les miens, je dois m'asseoir dessus, ou aller voir un psy pour que je me force à accepter l'inacceptable, et que bon nombre de gens n'accepteraient jamais d'endurer si c'étaient eux qui étaient à ma place. Pourquoi tant d'indulgence vis-à-vis de ces personnes "normales', et pas avec moi, avec ma compagne, qui avons besoin d'être soulagés et aidés. Pourquoi tant de mansuétude, de générosité, de tolérance, de compréhension, à leur encontre, et pas avec nous ?

Que j'étais heureux et épanoui lorsque je travaillais à la Bibliothèque Nationale, que j'effectuais mes recherches en histoire, en philosophie, en occultisme, en mythologie, en histoire de la vie, en archéologie, en tout un tas de domaines divers et variés en dérivant. Que j'étais heureux dans cette ambiance feutrée, dans cette quiétude, entouré de livres, passant des heures, des journées, des semaines, à les étudier, à disséquer les trésors littéraires qu'ils contenaient. J'ai essayé de retrouver cette ambiance quand je suis devenu écrivain à plein temps. Je me suis efforcé de recouvrer ce plaisir de l'écrit. De la partager, de l'approfondir, d'en explorer des routes que je n'avais pas encore empruntées.

Mais non, ceux et celles qui m'entourent veulent briser ce rêve, cet espoir, ce destin auquel je m'accroche parce que je sais que je suis né pour ça. Mais non, ici, je suis moqué, je suis montré du doigt, je suis humilié ou rabaissé parfois. Je suis jugé et condamné pour mes états d'âme, pour ce que je ressens, pour mes souffrances ou pour mes joie, pour mes différences surtout. Tout est prétexte à m'écorcher vif. Alors que je ne souhaite uniquement partager ce que mon esprit détient avec ces gens dits "normaux". Voila, pourquoi je vous en veux. Voila ce que je rêve de voir changer. Voila pourquoi j'écris mes Mémoires et que je lis autant que possible...

Allez, maintenant, donnez-en vous à cœur joie...

Dominique Capo

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