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Mes Univers
20 mai 2016

autobiographie, pages 171 à 173 / 312

X1Je ne sais pas combien de temps après, mais, soudain, nous avons senti une odeur de fumée. Puis, dans la foulée, comme si on cognait à la porte de séparant le pavillon du studio. Inquiète, ma mère s’en est approchée, et a écouté de l’autre côté. L’odeur de fumée y était plus forte. J’étais avec ma mère, ma sœur nous a rejoints dans la foulée. Heureusement, mon petit frère était couché. Il n’a pas assisté à ces événements. Nous avons perçu une explosion provenant du petit appartement. Des cris, suivis de nouveaux fracas. Ma mère, ma sœur et moi, nous sommes regardés. Devions-nous ouvrir pour voir ce qui se déroulait derrière la porte ou pas ? Devions-nous plutôt rappeler les pompiers ?

 

Finalement, ma mère a opté pour ouvrir la porte. Aussitôt, l’odeur de feu est devenue plus intense. Des fumerolles sont apparues provenant de l’autre extrémité du couloir. C’est-à-dire, du garage où mes parents rangeaient habituellement leur voiture. A cette époque, mon père de ma mère s’occupait d’associations de parents d’élèves. Et il arrivait qu’ils entreposent des paquets de prospectus, d’enveloppes, etc., à l’intérieur de ce dernier. Ce jour-là, une livraison avait été effectuée, et tout le long d’un pan de mur du garage était dissimulé par des rangées et des rangées de paquetages. Et ceux-ci brûlaient d’un feu d’enfer, lorsque ma mère s’est dirigée vers la source de la fumée.

 

Elle a immédiatement réagi. S’emparant d’un tuyau d’arrosage, elle a noyé le feu avant qu’il ne devienne trop important. De notre côté, ma sœur et moi avons constaté que la porte séparant le couloir du pavillon, avait été dégradé. Il semblât que mon père se soit acharné dessus à coups de hache. Nous avons de nouveau pénétré dans le studio. A l’intérieur, c’était comme si une tornade avait dévasté les lieux. Des objets disparates traînaient sur le sol. Des bouteilles vides de différents alcools gisaient sur le carrelage. Mais, surtout, je ne sais plus si c’était une chose ou un autre ustensile du quotidien, mais celui-ci avait fracassé le téléviseur trônant dans un angle de la pièce. Mon père, lui, était affalé sur son lit. Il pleurait et geignait comme un gamin.

 

J’ai rarement vu pleurer mon père. Trop fier, trop orgueilleux, pour se laisser aller à une telle faiblesse. Ma mère a souvent pleuré au cours de cette période, puis ensuite. Or, contrairement à mon père, malgré les pleurs, qui ne sont qu’une tristesse passagère chez elle, elle, reprend vite le dessus et s’organise pour affronter les épreuves auxquelles elle est soumise le plus efficacement possible. Il est vrai, qu’il est considéré comme infamant de laisser la peur, l’angoisse, le désespoir, prendre le dessus, dans sa famille.

 

La police a été appelée. Les ambulances aussi. Ni les uns ni les autres n’ont tardé. Quelques minutes sur place, ils se garaient devant chez nous et demandaient ce qui s’était déroulé.

 

C’est là où on peut s’apercevoir à quel point mon père était manipulateur. Car, bien qu’encore à demi-comateux à cause de l’alcool et des médicaments qu’il avait ingurgité – nous les avons découvert au pied de son lit moins d’une demi-heure plus tard -, il est momentanément sorti de son état de loque humaine. Il s’est présenté a peu près correctement aux gendarmes et aux infirmiers qui étaient là, et qui lui ont posé les questions d’usage. Certes, il puait l’alcool, et ses vêtements en étaient imbibés. Certes, sa voix était pâteuse, son esprit légèrement embrouillé. Mais, tout le long de l’entretien que mon père et ma mère ont eu avec les infirmiers et les forces de police, il a répondu assez correctement pour ne pas être inquiétés. Plus : il a fait en sorte qu’ils ne voient pas le départ de feu dont les débris jonchaient le parterre de notre garage.

 

Les policiers et les ambulanciers ont pourtant insisté. Ils ont demandé à ma mère si tout allait bien, si elle se sentait en sécurité, si elle ne souhaitait pas que mon père soit « interné » ; au moins pour quelques jours, le temps que celui-ci reprenne ses esprits. Elle a eu pitié de lui, il faut bien l’avouer. Et elle est allée dans son sens à chaque fois qu’il tentait de se présenter à eux sous un aspect le moins négatif possible. Mon père avait, en fait, peur d’une chose : c’est que cette « incartade » remonte la hiérarchie du Ministère de l’Intérieur, et qu’il y soit sanctionné d’une manière ou d’une autre. Lui qui brillait tellement auprès de ses collègues, qui était toujours le plus intelligent, le plus cultivé, le plus intéressant, etc., son image si lisse, si parfaite, aurait été détériorée pour longtemps.

 

Une fois les autorités parties, ma mère a tant bien que mal reconduit mon père jusque dans le studio. Elle l’a installée sur son lit, tout en veillant d’écarter toutes les bouteilles d’alcool qui étaient à portée de main. Elle a enlevé les boites de somnifères et autres médicaments qui traînaient. Et elle l’a veillé jusqu’à ce qu’il s’endorme. Je dirai même davantage, ma mère, ma sœur, et moi l’avons veillé une bonne partie de la nuit.

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