Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Mes Univers
28 avril 2016

autobiographie, pages 127 à 129 / 314

X1Ce que je me souviens surtout, c’est de l’après. Car une fois par semaine, je devais me rendre à l’hôpital en séance externe. Un médecin devait gonfler, à l’aide d’une seringue contenant un sérum physiologique, les ballons que j’avais sous la peau. J’ai été la proie de multiples douleurs physiques au cours de mon existence. Je peux affirmer que je l’endure sans rechigner jusqu’à un niveau assez élevé. Malgré tout, ces séances, je les ai vécues comme de terribles et cauchemardesques tortures physiques. Rares ont été les fois où j’ai atteint ce degré de douleur. A chaque fois que ma peau se décollait et que le sérum physiologique grossissait ces ballons, c’est comme si on m’enfonçait une aiguille chauffée à blanc à l’intérieur du crâne. Une aiguille qui me le transperçait de part en part. Ma mère était à mes côtés. Heureusement, car je m’accrochais à elle, je bloquais ma respiration afin de ne pas me mettre à hurler. J’en avais les larmes qui me montaient aux yeux. Ces séances m’ont secoué comme jamais je ne l’avais été jusque-là.

 

Celles-ci ont duré tout l’été. Au début, j’ai pu sortir un peu en dehors de chez moi. Je suis allé voir des copains de lycée, ou des copains de copains de lycée. Mais, très vite, les ballons ont gonflé de telle manière que mon visage est devenu difforme. J’ai peu à peu eu l’impression de posséder la face « d’Eléphant-Man », pour ceux et celles qui ont visionné ce film de David Lynch. D’ailleurs, par la suite, j’ai mis très longtemps avant de pouvoir regarder ce film. J’ai essayé plusieurs fois. Quand il était diffusé à la télévision, je me disais : « Allez, ce n’est qu’une œuvre de fiction ; ce n’est que du cinéma. ». Pourtant non, au bout d’une vingtaine de minutes, je n’arrivais pas à en supporter davantage. Je me voyais à la place de l’homme monstrueux, de la bête de foire qu’il était. Et il me renvoyait à l’imager que j’avais de moi, à cette image que j’ai traînée durant toute mon enfance et toute mon adolescence. Ce n’est qu’il y a une dizaine d’années, qu’enfin, j’ai réussis à surmonter mes appréhensions, et que j’ai pu aller jusqu’au bout. Il m’a malgré tout secoué jusque dans mes fondements les plus intimes et les plus profondément blessés.

 

J’ai profité de cette période d’enfermement relatif chez mes parents, pour m’adonner à ma principale passion d’alors : le dessin. Comme je l’ai déjà expliqué, ma passion pour l’écriture, ma vocation, s’est décelée au moment où je suis entré à la Bibliothèque Nationale. Avant, mes penchants étaient plus portés vers cet autre art. J’ai donc passé tout l’été 1989 penché sur la table de la salle à manger. Armé de feuilles de papier canson, de crayons, de stylos feutres à pointes extrêmement fine, j’ai imaginé les contours d’un continent imaginaire. Un continent issu de mon imaginaire médiéval-fantastique qui commençait à se développer énormément. Il était constellé de déserts, de forêts, de fleuves, de montagnes, etc. Il était peuplé de villes, de mégalopoles, de villages, de nations et d’empires. J’ai inventé des noms de lieux, de provinces, de territoires. J’ai utilisé la quasi-totalité de feuilles canson que j’avais à ma disposition. Et, à la fin de l’Été, le périmètre de cette carte de contrées fantasmagorique a été de deux mètres sur deux.

 

J’ai scotché entre eux les nombreux pans de cette carte. Je l’ai accrochée au mur du studio attenant au pavillon de mes parents. Il était vide puisqu’à l’origine, il était destiné à accueillir mes grands-parents paternels. Ils ne l’ont utilisé qu’en deux ou trois occasions juste après la fin de sa construction. Puis, eux qui vivaient à Marseille – ville où je suis né et que j’ai définitivement quittée en 1975 lorsque mon père et ma mère ont déménagé pour la capitale - ils ne sont plus jamais monté nous voir. Ce studio a donc finalement été laissé en l’état. En 1987, au cours de la période qui a déchiré ma famille en profondeur, c’est là que mon père a logé plusieurs mois. Jusqu’à cette fameuse nuit apocalyptique sur laquelle je reviendrais peut-être plus tard. Ensuite, y a été installé le plateau de jeux de figurines que mon père avait fabriqué pour moi. Il l’a conçu à partir d’une esquisse apparaissant sur la dernière page du livre de règles de la première version du wargame « Warhammer ». C’était l’époque où je m’intéressais en parallèle à ce genre d’activité. Cet intérêt s’est poursuivi jusque vers 1995 environs. J’ai possédé une immense armée d’elfes noirs, accompagnée de hordes de gobelins et d’orcs. J’ai investi un bon paquet d’argent dans cette armée. De fait, pour une fois, mon père qui était un excellent bricoleur, a voulu me faire plaisir. Pendant plusieurs jours, il m’a construit ce décor. Et il l’a installé dans ce studio, où je me réunissais parfois avec mes premiers joueurs de jeux de rôles. Cela s’est produit épisodiquement. Nous nous y réunissions épisodiquement à partir de vingt heures le samedi soir. Et nous y terminions nos parties de jeux de rôles, ou de wargames, vers cinq heures du matin. Je me souviens en particulier d’une partie d’Advanced Donjons et Dragons », une campagne de mon cru tirée d’un scénario officiel intitulée « le Temple du Mal élémentaire », qui a débutée à vingt heures le samedi soir, et qui s’est conclue le lendemain, à midi. C’est certainement la plus longue partie de jeux de rôles que j’ai présidée.

Publicité
Publicité
Commentaires
Mes Univers
Publicité
Visiteurs
Depuis la création 287 617
Derniers commentaires
Archives
Mes Univers
Newsletter
Pages
Publicité